Gonet: l'actualité des marchés au 4 avril

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow -3,98%, S&P 500 -4,84%, Nasdaq -5,97%, Russell -6,59%, SOX -9,88%, Eurostoxx -3,59%, SMI -2,45%.

 

De retour du Cap, je constate que le marché a perdu le sien et le retrouve groggy et abasourdi face à la violence béotienne de la guerre tarifaire déclarée par le président des Etats-Unis à la planète entière (y compris notamment les îles Heard et Mcdonald, dont les seuls habitants sont des phoques et des manchots, qui devront désormais payer 10% au grand blond sur tout ce qu’ils consomment). Blague à part, cette anecdote montre une fois encore combien l’administration Trump est mal préparée et qu’elle navigue aux instruments. Cette approche désormais connue (frapper très fort dans un premier temps pour se donner de la marge de négociation) ne passe plus auprès des intervenants du marché, qui la jugent simpliste et surtout beaucoup trop dangereuse. L’écran de fumée est désormais total devant un marché qui déteste l’imprévisibilité plus que tout au monde. La réaction des pays ciblés n’est pas uniforme, on observe ceci dit que les «gros porteurs» montrent déjà les dents, qui peut imaginer l’Union Européenne se laisser faire sans sourciller? Cela ajoute encore un peu d’incertitude sur des parquets de trading en effervescence, impression croissante et malaisante que tout cela est parti pour durer, le locataire de la Maison-Blanche semble de plus en plus déconnecté de la réalité, la pression vendeuse prend logiquement le pouvoir à Wall Street Hier.

Au-delà des tarifs douaniers de Donald Trump, il ne faut pas oublier que la macro continue son bonhomme de chemin. Actuellement elle nous envoie des signaux plutôt inquiétants, le consommateur américain est redevenu prudent, la croissance semble ralentir tandis que l’inflation montre les dents à nouveau. Or les taxes douanières de Donald Trump, si elles sont vraiment implémentées, vont probablement provoquer une accélération marquée de l’inflation aux Etats-Unis, tout en freinant les ardeurs des consommateurs et, de ce fait enclencher un ralentissement de la croissance économique de la première économie mondiale. L’affaiblissement marqué du dollar ces derniers jours implique également des pressions inflationnistes accrue aux Etats-Unis, aujourd’hui plus que jamais le marché risque de chercher son sauveur en la personne de Jerome Powell, mais que peut donc faire le patron de la Fed? baisser ses taux? cela provoquerait de l’inflation. Ne pas le faire et abandonner la croissance du pays à son triste sort? Dilemme cornélien que celui-ci, le premier banquier de la planète s’exprime d’ailleurs aujourd’hui à 17h25 heure de Genève, nous l’écouterons. Les Fed Funds lui envoient désormais un message clair, ils veulent désormais quatre baisses de taux cette année encore.

Dans ce grand pataquès provoqué par un grand blond aux idées noires, il ne faut pas oublier les sociétés et la saison des résultats trimestriels qui va débuter pile dans une semaine. On garde en tête les avertissements récemment envoyés notamment par Nike, Accenture et DHL, toutes trois mentionnant les tarifs comme raison principale. Dans une semaine, le grand barnum des trimestriels va débuter, comment ne pas se dire que le plus grand nombre va faire de même?

L’aversion au risque prend les commandes hier Downtown Manhattan. Le billet vert, le pétrole, les rendements obligataires et les actions chutent tandis que la volatilité décolle comme rarement, le VIX gagne 39% à 30,02, un niveau qui devient très intéressant mais il est peut-être un peu tôt, patience. Hier marque la pire séance boursière depuis mars 2020 (à l’époque on s’en fichait un peu, c’était surtout notre santé qui nous préoccupait). Les intervenants jettent l’éponge, ils vendent, le moment de la réflexion viendra plus tard. Tous les secteurs de l’indice S&P500 (SPX) reculent sauf un, les biens de consommation de base, on s’y réfugie tout comment dans les valeurs de la santé, les télécoms ou encore les utilities. C’est sans surprise la tech qui concentre le plus de haine hier, Apple chute de 9%, Amazon et Meta font de même, Nvidia recule de 8% et je vous fais grâce par pudeur des plongeons des semi-conducteurs. Tout ce qui a trait de près ou de loin au transport et à la logistique souffre logiquement (par exemple AP Moller Maersk, Hpag-Lloyd), ces firmes sont directement liées au commerce mondial et sa dynamique. Les entreprises avec des chaines d’approvisionnement passant par l’Asie ne sont pas épargnées, telles que Adidas, Nike ou encore Logitech. Les valeurs du pétrole souffrent de la chute de l’or noir. C’est en Europe que l’on retrouve un peu d’espoir, l’immobilier est recherché en raison de son statut défensif.

Dans ce contexte de retour d’un retour marqué de la peur, l’or recule ce qui peut étonner. Il est probable que des investisseurs aient vendu un peu de leurs positions dans la relique barbare pour répondre à des appels de marge ou réinvestir une partie de ces gains ailleurs.

En regardant de près la configuration technique des indices d’actions US, on constate que le SPX clôture légèrement en-dessous du bas de sa tendance haussière entamée en octobre 2022 et qu’une death cross se profile à un horizon d’une semaine. Fragilisation technique supplémentaire de cet indice donc, à suivre de près. Tableau encore plus sombre sur le SPW, son alter ego équipondéré, qui est tout proche de tester le bas de sa tendance haussière entamée en mars 2020 alors qu’une death cross est annoncée dans quatre jours. Sur le front des actions technologiques, le NDX a quant à lui clairement cassé sa propre tendance haussière, lui aussi est sous la menace d’une death cross, il clôture hier soir à 18'521 points, son prochain niveau de support se situe à 17'435 pts, c’est son plus bas en séance du 5 août 2024. Les volumes d’échanges décollent de 50% hier, le breadth est déplorable et le billet vert à genoux. La paire EUR/USD traite ce matin à 1,1021, elle se replie quelque peu après avoir touché 1,1144 hier en milieu de journée. Le niveau de 1,1050 – 1,1100 est fondamental, s’il est cassé à la hausse cela signifiera que la baisse de l’euro contre le dollar entamée en 2008 est remise en question. Sur la partie obligataire, le rendement du 10 ans US a cassé les 4%, ce matin il évolue à 3,96%, il voit son prochain support à 3,84%. 

Trump déclare que la réaction du marché était attendue, ajoutant qu’il est ouvert à une réduction de ses tarifs douaniers si d’autres pays peuvent offrir quelque chose de «phénoménal». JD Vance présente la chute mondiale des actions comme une douleur temporaire. Rappelons ici que le président américain ne cesse de répéter depuis son retour aux affaires qu’il se fiche de la bourse, il est donc logique qu’il l’ait commentée hier. 
JPMorgan estime à 60% les chances d'une récession mondiale, contre 40% précédemment.

L’UE prépare des amendes de plus d’un milliard de dollars contre X pour violation d’une loi visant à lutter contre les contenus illégaux et la désinformation, selon le New York Times. X affirme avoir «fait plus que ce qui est requis» pour se conformer à la législation européenne.

Au menu macro-économique du jour, les chiffres de l'emploi de mars aux Etats-Unis vont monopoliser l'attention à 14h30, avant un discours que doit prononcer le patron de la Fed, Jerome Powell, à 16h25.

Stellantis annonce le licenciement temporaire de 900 salariés américains à la suite de l'annonce de l'imposition de droits de douane. L'agence Fitch a réduit de BBB+ à BBB la notation crédit du constructeur à cause des mêmes droits de douane. Puma nomme l'ancien directeur des ventes d'Adidas, Arthur Hoeld, comme CEO, pour remplacer Arne Freundt, débarqué pour «divergences de vues sur l'exécution de la stratégie». AB Volvo investit 1 milliard de dollars dans son usine mexicaine. Volkswagen investit 580 millions d’euros en Argentine. Intel et TSMC auraient conclu un accord préliminaire pour créer une coentreprise dans la fonderie de puces aux Etats-Unis, a rapporté The Information. General Motors va augmenter sa production de camions dans l'Indiana à la suite des droits de douane imposés par Trump. Nissan va suspendre les commandes américaines de SUV Infiniti fabriqués au Mexique après les droits de douane imposés par Trump.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices reculent significativement. Tokyo perd 2,75% à la cloche, Hong Kong et Shanghai sont fermées, Séoul perd 0,86% et le Nifty50 abandonne 1,27%. Le future SPX recule de 26 points et l’Europe ouvre en repli de 0,8%. Le baril de WTI Light Crude traite à 65,48 dollars, l’once d’or à 3094 dollars.

Bonn anniversaire à Microsoft! Désormais fringante cinquantenaire. 

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