Gonet: l'actualité des marchés au 14 décembre

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow +1,40%, S&P 500 +1,37%, Nasdaq +1,38%, Russell +3,52%, SOX +1,55%, Eurostoxx -0,14%, SMI +0,34%.

Jerome Powell redevient officiellement colombe, Wall Street applaudit à tout rompre.

Hier soir la Fed maintient ses taux directeurs inchangés, c’était attendu. C’est le discours du patron de la Fed que tout le monde attend, le moins que l’on puisse dire est que Jay Powell ne déçoit pas les taureaux. Il reconnait implicitement que le pic de taux est passé (tout le monde le savait déjà mais il manquait la verbalisation de cet état de fait par le principal concerné). Le premier banquier du monde prend tout le monde ou presque par surprise et ouvre la voie à des baisses de taux l’an prochain, en adoptant un ton clairement orienté croissance. Le graphique «dot plot» qui montre les attentes des membres de la Fed pour l’an prochain indique désormais trois baisses de 25 points chacune, c’est moins que les attentes du marché (environ 125 bps) mais l’essentiel est ailleurs, du moins pour le moment. Ce que l’on retient sur les parquets de trading c’est qu’il l’a dit, les taux vont baisser, le sacro-saint robinet de liquidités va doucement se rouvrir, un rêve éveillé pour les actions. Cerise sur le gâteau, la Réserve Fédérale américaine revoit ses prévisions d’inflation pour 2023, 2024 et 2025 à la baisse. Le marché est rose de joie, son scénario le plus inavoué est en train de se réaliser, la Fed va desserrer l’étreinte et tiendra la main de la croissance économique en cas de besoin.

Les Fed Funds prévoient désormais une première baisse de 25 points de base à l’occasion du FOMC du 20 mars (90% de probabilités). Hier les attentes s’élevaient à 41%. Les rendements obligataires se cassent la figure, le 2 ans US passe d’un coup de 4,73% à 4,32%, il traverse donc sa moyenne mobile à 200 jours (4,65%) et lorgne désormais vers 4,26%, puis 4,00%. Le 10 ans passe de 4,21% à 3,95%, il casse également au passage sa 200 jours (4,02%) traite pile sur un support Fibonnacci, s’il le casse le prochain niveau se situe à 3,70%, la résistance à 4,02%. Les indices d’actions décollent, honneur au vénérable Dow Jones, qui clôture à un plus haut historique et dépasse le niveau de 37'000 points pour la première fois, porté notamment par Home Depot, Goldman Sachs, Amgen, Caterpillar et McDonald’s. Honneur aussi aux petites capitalisations, le Russell2000 (RTY) décolle de 3,5%, le repli des taux encourage les investisseurs à revenir dans ces sociétés en besoin quasi permanent de refinancement. Le RTY a progressé de 14% sur un mois, c’est à mettre en perspective avec les autres indices (SPX +6,8%, Dow +8,6%, NDX +6,8%, Stoxx Europe 600 +6,7%, SMI +6%). Cela permet également de constater que la tech US ralentit le rythme, que l’Europe se porte mieux et que la Suisse revient lentement mais surement dans la partie. On compare les mêmes indices depuis le début de cette année, et le RTY de passer à l’avant-dernier rang (devant le SMI) avec une hausse de 12,1% contre +24,5% au SPX, les petites capitalisations américaines semblent avoir de la marge à rattraper en termes de performance boursière.

Le SPX récupère le niveau de 4700 points, traite en territoire nettement suracheté et se situe désormais à 2% de son record historique. Le momentum est clairement présent en cette fin d’année, le rallye de Noël semble difficile à stopper. À noter que la volatilité ne recule guère plus, le VIX grappille 1% hier à 12,19, cela est plutôt sain. Le NDX est dans la même situation que le SPX, il se situe à moins de 2% de son record de tous les temps. Rappelons ici que les actions ont historiquement tendance à bien se comporter entre le pic de taux de la Fed et la première baisse effective. On assiste à d’importantes couvertures de positions shorts hier sur le NYSE, les volumes d’échanges repartent à la hausse, le breadth du marché est très nettement positif, les ours ont momentanément disparu des parquets. Côté sentiment, les petits porteurs sont sans surprise redevenus extrêmement optimistes. En parallèle, les institutionnels le redeviennent aussi, dans des proportions plus mesurées. Mes indicateurs internes de marché indiquent un risque sur les actions à court terme et un marché obligataire neutre. Il faut tenir compte de ces paramètres, le faible niveau de volatilité permet par exemple de couvrir une exposition en actions à bon compte, en parallèle le momentum actuel semble puissant, c’est à garder en tête également, tout comme les montagnes de cash que détiennent encore les investisseurs.

Le dollar est mis KO par les propos de Jerome Powell, le Dollar Index (DXY) glisse à 102,79, son prochain support se situe à 102,46, puis 102,00. La paire EUR/USD remonte à 1,0892, elle casse sa 200 jours (1,0828) et attend d’écouter Christine Lagarde cet après-midi. Nous aurons donc droit aux décisions de la BCE, de la BoE, de la BNS et de la Banque de Norvège, sachant que celle qui compte le plus (et de loin) pour la finance mondiale est déjà tombée hier soir.

La question désormais est de déterminer que faire avec le marché obligataire après de tels mouvements sur les rendements. Jeffrey Gundlach prévoit que les rendements de référence tomberont dans la fourchette basse de 3%, tandis que Bill Gross pense que le rendement est déjà là où il devrait être, à environ 4%. Les avis divergent donc. Le trader en actions que je suis regarde les rendements ce matin et se dit que 5,0% à 5,5% sur une obligation investment grade en dollars à 5-8 ans cela ne reste pas mal du tout. En Euros, on obtient encore 3% et plus, je m’abstiens de mentionner le franc suisse.

Le pétrole profite à peine du repli du billet vert, le baril de WTI Light Crude tente de récupérer le niveau de 70 dollars, ce n’est pas gagné pour l’instant. L’or traverse la barre de 2'000 dollars par once à nouveau, à suivre.

Le géant pharmaceutique Pfizer est le plus mauvais élève du SPX hier, avec une chute de 6,7%, après que l'entreprise a averti que son chiffre d'affaires pourrait chuter l'année prochaine en raison de la baisse de la demande pour les produits liés au Covid-19. L'entreprise a eu du mal à prendre le train en marche du traitement de l'obésité.

Au menu macro-économique du jour, de multiples annonces de banques centrales: la BNS à 9h30, la BoE à 13h00 et la BCE à 14h15. Aux Etats-Unis, les nouvelles demandes d'allocations de chômage (14h30), les ventes au détail (14h30) et les stocks d'entreprises (16h00) seront disponibles.

Vivendi envisage une scission en trois entités cotées en bourse : Havas, Canal+ et une société d'investissement comprenant Lagardère. Carrefour est durement affectée par l'annonce de la dévaluation du peso argentin. Le pays pèse 4% des revenus annuels du distributeur. Adobe, confronté à des problèmes antitrust, prévoit un chiffre d'affaires inférieur à ses estimations. Le titre perdait 5% hors séance. UBS fait la chasse aux centaines de millions de primes en espèces versées par le Crédit Suisse à ses traders pour les convaincre de ne pas quitter le navire avant la chute. Apple doit faire face à une ordonnance antitrust de l'UE sur les règles de l'App Store. Tesla rappelle 2 millions de véhicules pour mettre à jour l’Autopilot. Walt Disney et Comcast augmentent leurs dépenses publicitaires sur Instagram après avoir abandonné X. Shell acquiert 100% du champ de Kaikias dans le golfe du Mexique. Berkshire Hathaway achète 589 millions de dollars d'actions d'Occidental Petroleum.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en ordre dispersé. Tokyo rend 0,73% à la cloche, Hong Kong progresse de 0,81%, Shanghai perd 0,33%, Séoul avance de 1,34% et le Nifty 50 monte de 1,29%. Le future SPX gagne encore 15 points et l’Europe ouvre en hausse de 1,1%.

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