Les actifs suisses confirment leur statut défensif

Arthur Jurus, ODDO BHF

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Dans un contexte économique mondial de plus en plus volatil, la Suisse continue de démontrer une capacité unique à conjuguer stabilité, agilité économique et anticipation stratégique.

 

Confrontée à la menace de surtaxes américaines de 31% sur ses exportations, la Suisse n'a pas cédé à la confrontation politique. Au contraire, elle a mobilisé ses acteurs privés pour construire une réponse offensive: un plan d’investissement de 150 milliards de dollars aux États-Unis et porté par ses grandes entreprises comme Novartis et Roche. Cette stratégie permet de contourner les barrières douanières en localisant les activités sur le sol américain et donc satisfaire les exigences américaines. Il est important de noter que la Suisse n'explique que 5% du déficit commercial américain, une part marginale comparée à la Chine ou au Vietnam, ce qui souligne l'excès de mesures uniformes imposées par Washington. La réponse est donc advantage venue des lobbies que des seules autorités suisses. Les négociations restent toutefois en cours.

Sur le plan macroéconomique, et au vu des conditions commerciales actuelles, la Suisse devrait afficher une croissance de 0,9% en 2025 selon le FMI, alors que la France ralentirait à 0,6% et que l'Allemagne connaîtrait une stagnation à 0%. Ce différentiel est d’autant plus remarquable que la Suisse est l'une des économies les plus ouvertes du monde, donc théoriquement plus vulnérable aux chocs externes. Pourtant, sa spécialisation sectorielle dans des industries de haute valeur ajoutée, telles que la pharmacie, l'horlogerie ou les équipements médicaux, lui permet d'amortir les cycles mondiaux. De manière significative, la contribution nette du commerce extérieur suisse au PIB a doublé en cinq ans, atteignant 12%, ce qui témoigne de la compétitivité de son appareil exportateur.

La maîtrise de l'inflation constitue un autre pilier de cette résilience. Après un pic à 3,5% en 2022, l'inflation est retombée à 0,3% en 2025. Cette normalisation rapide s’explique par une combinaison de facteurs structurels: l’appréciation continue du franc Suisse et l’absence d’excès budgétaire. Cette stabilité des prix permet à la Banque nationale suisse de maintenir une politique monétaire accommodante, avec un taux directeur attendu à 0% en fin d'année, contre 3,5% pour la Réserve fédérale américaine et 1,5% pour la Banque centrale européenne. Désormais, la question portera déjà davantage sur le risque de taux négatif avant 2026, en particulier suite à la nouvelle appreciation du franc Suisse de 10% face au dollar américaine en 2025.

Du côté des marchés financiers, la structure défensive de la place suisse se confirme. L'or libellé en francs suisses s'est apprécié de 34,9% depuis le début de l'année, confirmant son statut de valeur refuge dans un environnement mondial incertain. Le marché actions helvétique affiche une progression plus modeste mais solide: +3,1% pour le SPI et +1,6% pour le SMI, alors que le S&P 500 exprimé en francs suisses accuse une chute de 17,5%. Les grandes valeurs suisses, comme Nestlé, Novartis ou Zurich Insurance, offrent une visibilité sur les résultats et un faible bêta par rapport aux marchés mondiaux. De même, l’immobilier suisse, représenté par l’indice SWIIT, a su préserver sa stabilité malgré des tensions sur les taux. La baisse de cet indice a ainsi atteint 2,5% depuis début avril soit 4 fois moins que les indices traditionnels. 

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