Nestlé a vu ses recettes reculer sur neuf mois, plombées par une faiblesse de la demande et une «normalisation des prix». Dans ce contexte, le géant veveysan de l’alimentation ajuste à la baisse ses objectifs de croissance et de marge pour l’ensemble de l’exercice.
De janvier à septembre, le chiffre d’affaires de la multinationale a reculé de 2,4% sur un an à 67,1 milliards de francs, annonce Nestlé jeudi dans un communiqué. La croissance organique s’est inscrite à 2%, tandis que la croissance interne réelle (RIG) a atteint 0,5%.
«Dans un environnement de marché caractérisé par une faible demande du consommateur, nous avons pu réaliser une croissance organique des ventes et une croissance réelle positive», a souligné en téléconférence Laurent Freixe, aux commandes du groupe depuis le mois dernier.
La «normalisation des prix, après deux années de hausses sans précédent et la défiance du consommateur pour les marques internationales, au vu des tensions géopolitiques» ont également eu une incidence sur la croissance. Le groupe a par ailleurs pris des mesures au troisième trimestre pour réduire les stocks de ses clients et mènera des actions supplémentaires en ce sens dans les mois à venir. Laurent Freixe a en outre affirmé vouloir «restaurer les investissements» et mettre l’accent sur l’innovation, notamment la connectivité avec consommateurs et clients, «avec pour mantra moins, plus grand, mieux».
L’effet de prix a été de 1,6%. «Café et cacao connaissent à nouveau des hausses de prix historiques», a encore relevé le CEO. Le café, avec ses marques phares Nescafé, Starbucks et Nespresso, reste le principal moteur du groupe, affichant une croissance autour de 5%. A l’inverse les produits laitiers et les produits culinaires, en particulier les surgelés, affichent une croissance négative.
Nestlé Health Science, qui fait l’objet d’un plan de relance, affiche une croissance organique de 3,8% qui a atteint les deux chiffres au troisième trimestre. La croissance interne réelle a été de 3,0%.
Croissance en Europe
Par région, les marchés émergents et l’Europe (+3,3% et RIG 0,8%) ont soutenu la croissance organique et compensé la baisse des ventes en Amérique du Nord (-0,3% et RIG -0,9%). Sur le Vieux continent, le groupe s’est heurté à «d’âpres négociations avec la grande distribution qui ont pesé à hauteur de 50 points de base sur la croissance interne réelle», a relevé la directrice financière Anna Manz en téléconférence. Sur l’ensemble des marchés développés, la croissance organique a atteint 1,1%, portée par un effet de prix et une RIG positifs. Dans les marchés émergents, l’effet de prix a été de 3,5%.
Ces chiffres s’inscrivent en deçà des attentes des analystes qui tablaient sur des revenus de 67,7 milliards de francs sur neuf mois. La croissance organique était attendue à 2,4% et la croissance interne réelle à 0,7%.
Pour l’ensemble de l’exercice, «compte tenu de la faible demande et des actions supplémentaires menées pour réduire les stocks des clients au quatrième trimestre», Nestlé revoit encore une fois ses perspectives vers le bas, anticipant désormais une croissance organique des ventes autour de 2%. En présentant son bilan à mi-parcours fin juillet, le groupe avait déjà abaissé ses objectifs de croissance organique à «au moins 3%», contre 4% précédemment.
«C’est une remise à zéro très douloureuse pour Nestlé et sans précédent dans son histoire récente», commente Jean-Philippe Bertschy chez Vontobel, qui peine à comprendre l’optimisme du groupe jusqu’en juillet. Mais ces nouvelles ambitions semblent «atteignables» ce qui le cas échéant permettrait à Nestlé de renouer avec la confiance, souligne Patrik Schwendimann de la Banque cantonale de Zurich (ZKB).
La marge opérationnelle sous-jacente devrait atteindre 17%, contre 17,3% en 2023, tandis que le bénéfice par action devrait demeurer stable sur un an. «Les marges pourraient encore temporairement reculer l’an prochain, moins fortement cependant que cette année», a indiqué Anna Manz.
Le groupe a par ailleurs annoncé un vaste remaniement de sa direction et une réorganisation de ses régions effectifs dès le 1er janvier, «afin de gagner en agilité», a souligné le CEO. La stratégie sera détaillée lors de la journée des investisseurs mi-novembre et les nouvelles perspectives seront présentées à l’occasion du bilan annuel en début d’année.
La direction semble avoir rassuré les investisseurs lors de sa conférence téléphonique: le titre progressait de 2,2% à 85,76 francs vers 10h40 redressant au passage un SMI désormais en hausse de 0,21%. A l’ouverture des marchés, la nominative plongeait de plus de 2% à son plus bas niveau pluriannuel, tenant la lanterne rouge.