Retour des colombes en septembre

Eric Vanraes, Banque Eric Sturdza

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Chronique des taux de la banque Eric Sturdza.

 

Trump, oui mais…

Au lendemain de la tentative d’assassinat de Donald Trump, un journaliste (dont nous avons malheureusement oublié le nom ainsi que celui de l’organe de presse) a trouvé un titre très évocateur: la balle a blessé Trump et tué Biden. Quelques jours plus tard, Joe Biden jetait l’éponge et la course à la Maison Blanche est depuis relancée. Donald Trump, même s’il reste favori, n’a pas gagné d’avance.

Ce qui nous a toujours gêné avec les affirmations des uns et des autres affirmant que Trump était bon pour Wall Street et mauvais pour les taux longs (steepening plus prononcé), c’est qu’ils faisaient fi de la couleur politique du Sénat et de la Chambre des Représentants. En effet, Trump à la Maison Blanche combiné avec les deux chambres dominées par le GOP, ce n’est pas très bon signe pour la partie longue de la courbe. Mais si les sondages mettent toujours en tête le Républicain, ils sont très indécis en ce qui concerne l’issue des deux autres scrutins. Une victoire absolue du parti à l’éléphant semble difficile.

Même si nous avons émis quelques doutes sur la théorie du «Trump steepening», elle reste une hypothèse tout à fait valable.

Jerome Powell a affirmé de son côté que la Fed était insensible au calendrier électoral et que si le FOMC devait prendre une décision de politique monétaire, il ne tiendrait absolument pas compte de cet élément. Une baisse de taux le 18 septembre fait désormais la quasi-unanimité dans les marchés. Elle sonnera le glas des plaisirs éphémères qui consistent à bloquer des taux courts à des niveaux supérieurs à 5%. Que faire pour les remplacer? De la duration, cela semble logique, mais les niveaux actuels des taux longs présentent deux handicaps.

Premièrement, ils ne sont pas attrayants car un 10 ans au-dessous de 4% n’est pas une hypothèse crédible à court terme. Deuxièmement, le «Trump steepening», même si nous avons émis quelques doutes sur cette théorie, reste une hypothèse tout à fait valable. Il reste les crédits de bonne qualité à duration faible et moyenne: les spreads sont chers et devraient faire fuir les investisseurs mais ces derniers ne regardent plus que le rendement. Avec une telle stratégie, il est en effet encore possible de bloquer des taux en «buy and hold» que pouvaient encore offrir les Treasuries au mois d’avril.

Nous avons trouvé Christine Lagarde un peu plus dovish que ce que nous avions anticipé.

BCE: baisse de taux en septembre

Nous avons trouvé Christine Lagarde un peu plus dovish que ce que nous avions anticipé. Nous étions persuadés que la BCE devait baisser ses taux rapidement (idéalement une seconde fois le 18 juillet) compte tenu de la dégradation de la conjoncture mais un grain de sable est venu contrarier récemment cette conviction. Il s’agit du manque d’homogénéité des niveaux d’inflation dans les principaux pays membres. Le CPI de la zone euro s’élève à 2,5% mais celui de l’Italie est d’à peine 0,8% tandis que celui de la Finlande s’affiche à 1,3%. A l’autre bout de la liste, nous trouvons la zone Belgique Pays-Bas à respectivement 3,7% et 3,2% ainsi que la péninsule ibérique avec une Espagne à 3,4% et un Portugal à 2,8%.

Nous avons régulièrement mis en avant les différences entre une banque centrale d’un seul pays et celle d’une zone qui en regroupe plusieurs. Pour la BNS, les disparités entre Lugano, Lausanne et Saint-Gall ne sont pas un problème majeur. Idem pour la Fed qui ne va pas modifier sa politique monétaire fédérale pour des considérations régionales. En zone euro, baisser les taux aujourd’hui pour des raisons a priori évidentes, c’est jeter de l’huile sur le feu dans le Benelux et la péninsule ibérique. Nous avons donc craint à un moment donné que Christine Lagarde recule et nous surprenne par un discours moins dovish que prévu. Cela n’a pas été le cas et le 12 septembre, la BCE va sans doute annoncer une baisse de taux supplémentaire.

Nous ne pouvons pas terminer cette revue des colombes de la rentrée sans évoquer la Chine. Face à un risque grandissant de «japonisation» de l’économie chinoise, la PBoC n’a pas attendu et a baissé deux taux de référence la semaine dernière. Selon toute vraisemblance, il ne s’agit que d’un apéritif avant de passer aux choses sérieuses. Le rendement du 10 ans chinois en monnaie locale s’élève à 2,20%. Cela se passe de commentaire.

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