
La volatilité des actions s’est également accentuée en raison de l’actualité fluctuante sur le front des droits de douane.
Une économie américaine «en bonne santé»
Le président de la Réserve fédérale américaine (Fed), Jerome Powell, a récemment déclaré que l’économie américaine restait «en bonne santé». Toutefois, face aux récentes statistiques économiques, les investisseurs redoutent que la politique de l’administration Trump ne freine l’économie.
Le Livre beige de la Fed fait état d’un fléchissement de la croissance et d’une pression inflationniste persistante dans des secteurs clés, tandis que l’indice ISM manufacturier a signalé un ralentissement de l’activité économique, avec une hausse des coûts des intrants liée aux droits de douane.
151'000 emplois salariés non agricoles ont été créés en février, soit un peu moins que les 160'000 prévus par le consensus. L’augmentation du taux de chômage, passé de 4 à 4,1%, reflète probablement une certaine faiblesse dans l’enquête auprès des ménages.
Dès lors que faut-il penser? Explication en quatre points.
- La faiblesse des actions trahit l’inquiétude face aux droits de douane
Les investisseurs craignent que les droits de douane n’entraînent un regain d’inflation et ne pèsent sur la croissance économique. Si la correction était uniquement imputable au ralentissement de la croissance, les rendements obligataires auraient probablement baissé en même temps que les actions.
A en juger par les marchés à terme, les investisseurs s’attendent à ce que la Fed baisse ses taux de 71 points de base d’ici la fin de l’année.
- Le spectre des droits de douane mine le moral des entreprises
Le Texas est depuis longtemps un bastion électoral du président Trump. Toutefois, le dernier Livre beige de la Fed de Dallas a mis en évidence une incertitude grandissante chez les entreprises, dans l’industrie manufacturière comme dans les services.
Préoccupées par la politique commerciale de la Maison Blanche, les entreprises sondées redoutent une hausse des coûts des intrants liée aux droits de douane. Cet effritement de la confiance suggère que même dans les régions historiquement acquises au président Trump, l’incertitude quant à la politique menée pourrait peser sur l’investissement et sur les créations d’emplois et, par ricochet, sur la croissance économique générale.
En outre, l’indice ISM manufacturier publié récemment et les récents indices PMI indiquent une hausse des coûts des intrants liée aux droits de douane, ce qui accentue la crainte de tensions inflationnistes liées au commerce extérieur.
- Le discours de croissance de Donald Trump moins convaincant que celui de Friedrich Merz
Les actions américaines ont rebondi dans le sillage de l’élection de Donald Trump, son programme politique étant jugé favorable à la croissance. Néanmoins, la réaction du marché aux droits de douane annoncés récemment témoigne d’un scepticisme grandissant quant à sa capacité à maintenir une croissance vigoureuse. L’écart de performance entre les actions américaines et les actions européennes il y a dix jours, ainsi que depuis le début de l’année souligne cette dynamique, et ce alors que les investisseurs réajustent leurs anticipations.
Selon la Recherche d’UBS, l’expansion budgétaire envisagée par l’Allemagne, centrée sur l’augmentation des dépenses de défense, est susceptible d’améliorer les perspectives d’investissement au niveau national et dans le reste de l’Europe. Le DAX allemand est en hausse de 16% depuis le début de l’année.
- Le manque de cohésion accentue l’incertitude politique
Le décalage entre la posture agressive du président Trump et l’approche plus pragmatique du secrétaire au Commerce Howard Lutnick – qui est parfois suivie de concessions de la part du président – rend le message de l’administration moins lisible. Lorsqu’il a signé le décret offrant un sursis au Canada, Donald Trump a réaffirmé que les droits de douane étaient une nécessité et que leur suspension serait «de courte durée».
Ce manque de cohésion crée de l’incertitude sur les marchés financiers et risque de retarder les décisions d’investissement car les chefs d’entreprises et les investisseurs se demandent si les mesures de l’administration Trump stimuleront ou freineront la croissance économique.
Des figures influentes de la presse financière sont très critiques à l’égard du programme de Donald Trump, dont la cote de popularité a baissé, notamment sur des questions telles que le commerce extérieur, la politique étrangère et l’inflation. Sa politique d’immigration reste néanmoins très populaire.
Les objectifs des droits de douane
Compte tenu de ces facteurs, la Recherche d’UBS a récemment revu les probabilités attribuées à ses scénarios relatifs aux droits de douane.
La volonté d’imposer des droits de douane aux pays alliés comme aux adversaires témoigne de la détermination de l’administration américaine à atteindre une série d’objectifs qui ne relèvent pas uniquement de la politique économique, ce qui amène à réduire la probabilité d’un environnement de droits de douane limités ou symboliques. Désormais on attribue une probabilité de 15% à la réalisation de ces scénarios haussiers, contre 25% auparavant.
En revanche, les droits de douane supplémentaires de 25% qui visent le Mexique et le Canada relèvent du scénario d’une politique commerciale très agressive de la part des Etats-Unis s’ils s’inscrivent dans la durée. Même si ce ne sera probablement pas le cas, la Recherche d’UBS a choisi de porter la probabilité de ce scénario baissier à 35%, contre 25% jusqu’ici. En effet, le risque que ces droits de douane restent en vigueur assez longtemps pour peser sur l’activité économique s’est accentué.
La situation reste très fluctuante mais le scénario de base – des droits de douane élevés mais ciblés qui accentueront la volatilité sur le marché sans faire dérailler l’économie – est toujours crédité d’une probabilité de 50%.
Comment investir?
Le message fondamental est toujours de rester investi dans les actions, en mettant l’accent sur les Etats-Unis, sur l’intelligence artificielle (IA), sur l’électricité et sur les ressources, mais aussi de couvrir ses expositions aux actions pour gérer les risques à court terme.
Avec la date butoir du 2 avril pour l’entrée en vigueur de nouveaux droits de douane et le débat imminent sur le plafond de la dette des Etats-Unis, l’incertitude devrait rester marquée. Les investisseurs doivent également veiller à ce que leurs portefeuilles soient bien diversifiés au moyen d’actifs tels que les obligations de qualité, l’or et les actifs alternatifs.
Composer avec les risques politiques
Compte tenu de l’incertitude liée aux droits de douane et aux aléas de la politique commerciale, il faut absolument diversifier les portefeuilles et gérer les risques. En ce qui concerne les actions, les stratégies de préservation du capital peuvent permettre de limiter les pertes potentielles tout en conservant une exposition à d’éventuels rebonds.
On privilégie toujours les obligations de grande qualité, telles que les obligations d’entreprises investment grade, qui peuvent permettre de se couvrir contre les tensions commerciales. Il en va de même pour les positions longues sur la paire USDCNY. En revanche, il convient de couvrir ou d’éviter l’exposition au CAD et au MXN à court terme.
La Recherche d’UBS est d’avis que l’or reste une couverture efficace contre le risque géopolitique et le risque d’inflation. Par ailleurs, certaines stratégies de hedge funds peuvent améliorer la résilience d’un portefeuille.
Le potentiel de hausse des actions n’est pas épuisé
Même si les craintes autour de la politique commerciale et de l’IA ont pesé sur les actions américaines, la forte demande en puissance de calcul pour l’IA et pour les investissements continus dans l’infrastructure sont de nature à soutenir la croissance à long terme.
L’essor des investissements liés à l’IA confortent dans l’idée que l’IA est un moteur de croissance structurel malgré la volatilité à court terme. La croissance des bénéfices et les investissements dans l’IA devraient encore soutenir les actions et le S&P 500 devrait atteindre 6600 points d’ici la fin de l’année.
On peut également toujours recommander de s’exposer au DAX par le biais de stratégies structurées. Par ailleurs, les valeurs industrielles de la zone euro et les petites et moyennes capitalisations de cette même région semblent toujours attrayantes.