Inflation et crise politique, le cocktail de l’été

Axel Botte, Ostrum AM

2 minutes de lecture

La Fed pourrait monter les taux de 100pb, alors que le risque politique italien revient hanter la BCE.

©Keystone

Depuis plusieurs semaines, le risque de récession domine les marchés. La contraction de l’économie chinoise s’est rapidement traduite par une forte baisse du pétrole. En parallèle, un tour de vis monétaire par le biais d’une hausse de 100pb des fonds fédéraux est évoqué après la publication de l’inflation de juin, ce qui relance l’aplatissement de la courbe des taux. Tandis qu’en zone euro, le scénario d’une crise politique en Italie semble s’accélérer. Le président du Conseil Mario Draghi a mis sa démission en jeu dans l’espoir de préserver le gouvernement d’union nationale. Les spreads italiens repartent à la hausse au-delà de 210pb à 10 ans alors que les contours de l’outil antifragmentation de la BCE ne sont pas encore connus.

Dilemme pour la BCE

La crise politique couve en Italie. Le M5S s’est désolidarisé du gouvernement d’union nationale au pouvoir depuis février 2021. Le président Sergio Mattarella a rejeté la démission de Mario Draghi dans le but d'éviter une crise politique en le maintenant en poste jusqu'aux élections prévues au début de 2023. Mais, la Lega et Forza Italia appellent à des élections anticipées. Cette situation précaire place la BCE face à un dilemme. La Banque centrale s’apprête à dévoiler son outil d’intervention dont le principal bénéficiaire serait…l’Italie, or la BCE n’agit que pour assurer une transmission uniforme de sa politique et non pour corriger les risques asymétriques engendrés, de surcroit, par une crise politique. Par ailleurs, l’inflation en zone euro ne montre aucun signe de ralentissement. Les tensions sur les prix attisent les revendications salariales de sorte que les effets de second tour ne peuvent être ignorés.

Les prix des services élevés, notamment les coûts du logement et de la santé, engendrent une forte inertie des prix, difficile à combattre pour la Fed.

Du côté de la Fed, l’inflation est aussi au cœur des préoccupations. L’inflation annuelle ressort à 9,1% en juin, au-delà des estimations les plus pessimistes. L’indice hors éléments volatils reflue certes à 5,9% mais sa hausse mensuelle de +0,7% est la plus élevée depuis un an. De plus, les prix des services élevés, notamment les coûts du logement et de la santé, engendrent une forte inertie des prix, difficile à combattre pour la banque centrale. En outre, les ventes au détail se sont redressées en juin. La demande de crédit des ménages, toujours soutenue, n’a pas fléchi depuis le début du resserrement monétaire. La Fed va encore durcir le ton, de sorte qu’un relèvement de 100pb est évoqué pour fin juillet. Néanmoins, la légère diminution des anticipations d’inflation entrevue dans les enquêtes constitue une bonne nouvelle, qui réduit la probabilité d’un tel mouvement. Cela étant, les prétentions salariales reflétées par ces mêmes enquêtes continuent d’augmenter.

La Fed suit la Banque populaire de Chine

Les courbes de taux s’aplatissent fortement de 18pb sur le 2-10 ans américain et de 15pb sur le Bund. La possibilité d’un relèvement de 100pb des fonds fédéraux à la fin du mois, sans doute impensable avant la dernière décision de la Banque Populaire de Chine (+100pb), induit une pression à la hausse sur le 2 ans. Les points morts d’inflation n’ont pourtant pas monté. Au contraire, la perspective d’un reconfinement en Chine a beaucoup pesé sur les cours du brut et les projections d’inflation du marché. Le ralentissement attendu pèse parallèlement sur les taux longs.

En zone euro, la situation italienne entretient la demande de Bund. Sur les maturités courtes, la hausse des taux anticipée de 25pb semble insignifiante au regard du risque inflationniste. Si les spreads core ont bien résisté, l’écartement du BTP italien (220pb) engendre un décalage des spreads des dettes ibériques.

Les tensions sur le marché du crédit européen ont été ravivées par la hausse des swap spreads. Le Schatz s’échange à 84pb contre swap en hausse de 4pb sur la semaine. L’écartement s’explique par un manque de collatéral qui amplifie l’aversion pour le risque souverain italien. L’élargissement des swap spreads, qui s’observe sur l’ensemble des maturités, pourrait déclencher une nouvelle phase d’écartement des spreads de crédit européen. Le crédit IG en zone euro se traite actuellement à 207pb contre Bund. Malgré le rebond des actifs risqués en fin de semaine, la demande de protection reste très forte. L’iTraxx Crossover s’échange ainsi de nouveau au-dessus de 600pb. Le high yield en euros cote 660pb.

Sur le marché des actions, les premières publications bancaires ont été diversement accueillies par les marchés. Globalement, les surprises à la hausse sont majoritaires pour les 33 premières publications du S&P. Les chiffres d’affaires publiés montrent une croissance annuelle agrégée de 7%. Le rebond de 2% de vendredi n’efface pas la faiblesse du début de semaine. Le S&P 500 abandonne 1% en cinq séances et les grandes valeurs technologiques perdent jusqu’à 4%. L’Euro Stoxx 50 surnage mais les marchés asiatiques sont impactés par le risque conjoncturel chinois.

Quant aux devises, l’euro-dollar s’est échangé sous la parité, le dollar bénéficiant toujours de son statut de valeur refuge.

A lire aussi...