Une récession sans désinflation

Axel Botte, Ostrum AM

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Le risque d’un recul du PIB ne semble pas altérer la détermination de la Fed à ramener le renchérissement à 2%.

©Keystone

Récemment, le risque de récession est au centre des conversations sur les marchés financiers. Pour ne rien arranger, Jerome Powell a rappelé l’engagement inconditionnel de la Fed à ramener l’inflation à l’objectif de 2%. Sous-entendant que la banque centrale assumera une récession. Au même moment en Europe, le plongeon des indices des directeurs d’achats a déclenché un mouvement de baisse sur les taux d’une ampleur inédite depuis 14 ans. Le Schatz allemand perdait 25pb en deux séances. C’est-à-dire, autant qu’en mars 2008 après l’annonce du rachat de Bear Stearns par la banque JP Morgan, six mois avant l’effondrement du système bancaire. Ces rachats de positions vendeuses démontrent l’importance des changements du sentiment des investisseurs dans des marchés volatiles avec un positionnement consensuel marqué.

Les risques des différentes capitulations

Tandis que les cryptomonnaies, comme le Nasdaq, restent à l’affût de toute accalmie sur le taux, la tendance haussière du dollar s’affaiblit mais le billet vert fait toujours figure de valeur refuge. Même si la situation conjoncturelle américaine s’infléchit depuis le début du deuxième trimestre. Les enquêtes manufacturières régionales dessinent en effet un ralentissement, qui n’est pas encore visible dans les données de production. Une croissance nulle est donc plausible entre avril et juin. Cependant, la question n’est plus de savoir si un ralentissement économique aura lieu, mais quel sera son potentiel désinflationniste?

Les problèmes d’offre alimentant l’inflation persisteront au-delà de l’affaiblissement cyclique de la demande. Dans ce cas, l’inflation demeurera trop élevée, invalidant les anticipations d’inflation du marché et la trajectoire monétaire prévue par la Fed. Il s’agit d’un risque considérable pour les gérants. Ceux-ci, espèrent une capitulation de la Fed et des banques centrales après le rebond des actions consécutif au violent rally des marchés de taux. A l’inverse, Le risque est une capitulation des actions et du crédit, dans le sillage des flux des marchés de taux, si la Fed maintient le cap face à l’inflation. Cette forte tendance ne saurait être masqué par les rachats hebdomadaires sur les fonds obligataires mondiaux, les plus importants depuis avril 2020 (23,5 milliards de dollars) et qui au total sont à 193 milliards en 2022. La décollecte accélérée des fonds actions, au bénéfice des liquidités ou de l’or, est sans doute plus significative que le léger rebond des prix après un plongeon de 9% en juin sur les principaux indices.

La BCE confirme ses intentions

Dernièrement, l’action des prix sur les marchés de taux est sidérante. Le Bund s’est échangé entre 1,35% et 1,79%, les intervenants effaçant 50pb de resserrement de la Banque centrale européenne à l’horizon de décembre 2024. La BCE a pourtant confirmé la hausse de 25pb en juillet. Parallèlement, la mise en œuvre prochaine d’un mécanisme anti-fragmentation n’a pas empêché une remontée des spreads italiens vers le seuil de 200pb. Les craintes d’une baisse de l’activité et une diminution des positions ouvertes avant la clôture semestrielle ont motivé ce reflux. Mais, le nouvel outil de politique monétaire expose probablement davantage la France que les autres pays.

Pourtant, les Obligations Assimilables du Trésor sont stables à 54pb contre le Bund ignorant aussi les blocages politiques à venir. Le rally obligataire rappelle l’importance du marché directeur américain. Le T-note a cassé à la baisse la fourchette 3,20-3,50% qui semblait compatible avec la dernière réunion du Comité fédéral Open Market. Les points morts d’inflation se tassent quelque peu dans la baisse des taux nominaux. La révision baissière des anticipations d’inflation des ménages est un facteur stabilisant. Elle diminue dans le sillage de la baisse du pétrole et d’autres matières premières industrielles. La plupart des marchés se sont fortement appréciés à l’inverse des discours des banques centrales. L’inflation canadienne à 7,7% en mai préfigure une hausse de 75pb prochainement, la Norvège a surpris en montant son taux de 50pb suivant la Banque nationale suisse ou encore la Banque de réserve d’Australie au cours des dernières semaines.

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