En Suisse, quasi-retour au niveau pré-crise

Marc Brütsch, Swiss Life Asset Managers

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Outre l’étonnante résilience de larges pans de l’économie tertiaire domestique, le secteur manufacturier profite de la forte demande de l’étranger.

Les étapes de réouverture initiées depuis mars alimentent la ré-accélération de la dynamique économique intérieure, et les données économiques positives ont afflué dernièrement. Sur le marché du travail, le pic du taux de chômage à 3,5% semble avoir été dépassé dès janvier, alors que nous attendions ce point de bascule pour le mois d’avril. 

Nous révisons également notre prévision de taux de chômage moyen pour 2021, de 3,6% auparavant à 3,2% aujourd’hui. 

La crise devrait détruire moins d’emplois que prévu, un constat recoupant les observations ailleurs en Europe et s’expliquant par la réponse budgétaire massive. Des questions restent en suspens. On ne sait toujours pas dans quelle mesure le marché du travail pourra absorber les nouveaux diplômés des hautes écoles et les jeunes en fin de scolarité ou si la fin du chômage partiel fera bondir le nombre de demandeurs d’emploi. 

Comme ailleurs en Europe, le PMI industriel
est proche de ses sommets historiques.

Nous prévoyons toujours que le PIB réel de la Suisse aura retrouvé son niveau du quatrième trimestre 2019 dès le troisième trimestre 2021. 

Outre l’étonnante résilience de larges pans de l’économie tertiaire domestique, le secteur manufacturier profite de la forte demande de l’étranger. Comme ailleurs en Europe, le PMI industriel est proche de ses sommets historiques. Le fait que les exportations vers la Chine aient atteint un nouveau niveau record en mars s’inscrit dans ce contexte.

En Suisse aussi, le risque de hausse de l’inflation anime le marché. Au premier trimestre, le volume de recherche du terme «inflation» mesuré par Google a atteint son plus haut depuis 2011. En effet, le taux d’inflation ira jusqu’à 1,0% d’ici décembre 2021. Selon nous, il s’agit d’une hausse temporaire, notamment alimentée par la hausse des prix de l’énergie et la demande accumulée.

Marchés financiers: importance et limite de la valorisation 

Il est souvent question de valorisation des marchés des actions. Que recouvre cette notion? Et pourquoi ne peut-on pas l’exploiter pour trouver le bon moment pour entrer ou sortir du marché? 

Investir dans des actions, c’est en réalité acheter une part des bénéfices futurs de l’entreprise. Donc, pour estimer le «juste» prix d’une action ou d’un marché d’actions, les investisseurs doivent estimer ces bénéfices futurs. Une tâche ardue, car la vie d’une entreprise n’est pas un long fleuve tranquille. Des produits et services en vogue peuvent devenir obsolètes, l’entreprise peut développer de façon inattendue une solution exceptionnelle source de profits considérables, etc. 

Les investisseurs s’entichent du potentiel des entreprises et oublient de vérifier
si le prix d’achat de l’action traduit une évolution réaliste des futurs bénéfices.

Une vaste incertitude est donc consubstantielle à l’estimation des futurs bénéfices, et différents investisseurs pourront avoir des opinions aux antipodes à leur sujet. Les valorisations, équivalant peu ou prou à la valeur actuelle des bénéfices futurs, varieront notoirement selon les estimations des investisseurs. Ainsi, les marchés remarquent les valorisations seulement quand elles sont extrêmes. 

Même dans ce cas, d’expérience, un très long moment peut s’écouler avant que les investisseurs réagissent, p. ex. lors de la «bulle Internet» au tournant du millénaire. 

La raison à cela? Souvent, les investisseurs s’entichent du potentiel des entreprises et oublient de vérifier si le prix d’achat de l’action traduit une évolution réaliste des futurs bénéfices. A l’époque, le potentiel de nombreuses start-up Internet était surestimé, un cas de figure pouvant se reproduire de nos jours pour la mobilité électrique et l’informatique par exemple. 

Outil puissant d’évaluation des risques et opportunités, la valorisation est déconseillée pour fixer un point d’entrée ou de sortie du marché.

Actions: une pause pour réfléchir 

Suisse

  • Le caractère défensif du marché suisse des actions a entraîné une nette sous-performance depuis le début d’année. Il a également pâti de mauvaises surprises dans le secteur financier. 
  • Les actions suisses sont désormais moins chères, mais à moins que le marché déprime sévèrement, il ne devrait pas se distinguer à court terme.

Zone euro

  • Après un très bon début d’année, la dynamique des actions en UEM a quelque peu fléchi. Ce marché reste moins cher qu’outre-Atlantique, la reprise des bénéfices est plus lente et les perspectives mitigées. La récente appréciation de l’EUR, phénomène que nous jugeons temporaire, est sûrement en cause.
  • La lenteur de la vaccination dans la région et les incertitudes liées à l’horizon politique en Allemagne et en France desservent le marché, qui devrait sous-performer son homologue américain. 

Royaume-Uni

  • La vaccination et, dans une moindre mesure, la hausse du prix des matières premières ont porté le marché britannique des actions.
  • La majorité des bonnes nouvelles est toutefois anticipée désormais, et la croissance attendue des bénéfices des entreprises fait pâle figure face à d’autres marchés. Le marché britannique devrait perdre de l’élan et signer une performance similaire à la zone euro, mais inférieure au marché américain en devise locale.

Etats-Unis

  • La rapidité de la vaccination et le plan d’infrastructure sur lequel planche l’administration Biden devraient porter un peu plus la reprise économique. Une bonne nouvelle pour les bénéfices, mais la valorisation élevée du marché devient un problème, les investisseurs exigeant des entreprises des résultats excellents plutôt que simplement bons.
  • Les marchés sont toujours indécis quant à l’inflation et aux taux, et sont nerveux à la moindre hausse des rendements obligataires. Bien que le marché américain des actions devrait surperformer, les risques ont selon nous augmenté dans une mesure non pleinement anticipée.

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