Gonet: l'actualité des marchés au 24 avril

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow +0,07%, S&P 500 +0,09%, Nasdaq +0,11%, Russell 2000 +0,10%, SOX -0,82, Eurostoxx +0,54%, SMI -0,11%.

Les marchés se mettent en mode pause la semaine passée, même si au final l’indice Stoxx Europe 600 grappille 0,5% et s’offre donc une cinquième semaine consécutive de hausse. On continue d’observer une résilience plutôt bluffante du joyeux royaume des actions mais du côté de Wall Street cela fait trois semaines que l’on évolue presque à l’horizontale. La balance hésite entre taureaux et ours, j’y reviens. En prenant un peu de recul, on observe que le Stoxx Europe 600 progresse de 7,7% depuis le premier janvier. Le CAC40 parisien fait nettement mieux que son président dans les sondages, il décolle de 17% sur la période, le secteur du luxe (LVMH et l’Oréal en tête) est passé par là. L’indice S&P500 (SPX) évolue quasiment main dans la main avec le Stoxx Europe 600 et le Nasdaq Composite progresse de 15,3%. En Helvétie, le SMI s’adjuge presque 10%, une performance ma foi fort décente lorsque l’on sait que Roche ne l’a pas aidé, sans parler de Crédit Suisse, qui retire à elle seule 68 points de l’indice sur la période, contre une progression générale de 731 pts. Le podium se compose de Nestlé (+218 points), Novartis (+175 points) et Richemont (+163 pts).

Le débat s’intensifie autour de l’état réel de l’économie des Etats-Unis. Les partisans d’un atterrissage en douceur (soft landing) invoquent un marché du travail solide, un consommateur résilient et un rebond du marché immobilier. Du côté obscur de la force, les adeptes d’un hard landing mentionnent une courbe des taux US profondément inversée (le 2 / 10 ans à -69 points de base ce matin, ils ont là un point), un assèchement potentiel de la liquidité du marché, l’ISM manufacturier en contraction et des indicateurs avancés en détérioration. Et au milieu, on retrouve probablement les résultats de sociétés, la saison 1 de 2023 est en cours et il est encore un peu tôt pour tirer un bilan, mais force est de constater que jusqu’à présent les résultats sont plutôt bons dans leur ensemble, Bloomberg Intelligence indique que plus des trois quarts des chiffres annoncés (20% des entreprises du SPX) sont supérieurs aux prévisions.

Le positionnement actuel dans le marché ne nous apprend pas grand-chose, je note juste que, du côté des investisseurs institutionnels (smart money), les bulls (haussiers) grappillent un peu de terrain vis-à-vis des bears (baissiers) la semaine passée. Ils en sont à 50,7%, leur niveau le plus élevé depuis novembre 2021. En revanche, chez les petits porteurs (AAII American Association of Individual Investors), le sentiment se détériore nettement au cours de la semaine du 12 avril, rappelons ici que c’est plutôt une bonne nouvelle pour le marché. Enfin, l'enquête d'avril de Bank of America sur les gestionnaires de fonds mondiaux met en évidence un sentiment plus morose, avec des investisseurs disposant de 5,5% de liquidités, la plus grande surpondération des obligations et la plus grande sous-pondération des actions par rapport aux obligations depuis la crise financière mondiale. En outre, JPMorgan note que sa dernière enquête auprès des clients a révélé que seuls 26% d'entre eux prévoient d'augmenter leur exposition aux actions, ce qui constitue un nouveau record à la baisse. Elle souligne par ailleurs que 90% des personnes interrogées s'attendent à une récession aux États-Unis d'ici le premier semestre de l'année 24. De son côté, Lipper nous apprend que les fonds du marché monétaire ont enregistré des sorties de 67,4 milliards de dollars au cours de la semaine du 19 avril, soit la troisième plus importante jamais enregistrée. Ceci dit, il ne faut pas tirer de conclusions hâtives de cette statistique, l’appétit au risque n’est pas forcément revenu en force à ce point, gardons en tête que les Américains sont en pleine période de paiement de leurs impôts.

Résumons: le marché est tiraillé, les deux camps ont des arguments et c’est assez logiquement que les indices se mettent en mode horizontal, dans l’attente de voir émerger un vainqueur. L’ombre de la Fed plane encore et toujours au-dessus de Downtown Manhattan, ce matin les Fed Funds prédisent 90% de probabilités d’une hausse de 25 points de base lors de la prochaine réunion de la Réserve Fédérale américaine, qui se tiendra le 3 mai. L'accent de la réflexion en cours est également mis sur la liquidité, en particulier avec le récent rejet de l'idée d'une nouvelle expansion du bilan de la Fed pour aider à faire face aux turbulences du secteur bancaire en tant qu'assouplissement quantitatif.

On retourne à Wall Street, qui grappille quelques points à la cloche de vendredi, ce qui n’empêche pas le Dow, le SPX et le Nasdaq100 (NDX) de reculer sur la semaine. Le podium du jour du SPX se compose de la consommation discrétionnaire, des biens de consommation de base et de la santé. Pas grand-chose à signaler d’un point de vue technique, tandis que la volatilité du SPX rend encore du terrain, le VIX clôture à 16,77, il a techniquement de la place jusqu’à 15. Son grand frère obligataire, le MOVE, se stabilise à 120, niveau qui reste élevé mais on y respire nettement mieux qu’à 198,71, le top du 15 mars. Les bons du Trésor US reculent, leurs rendements récupère du terrain et progressent sur la semaine, ce matin le 2 ans US traite à 4,15%, le 10 ans évolue à 3,54%. Notons au passage que le SPX réagit systématiquement à l’inverse depuis pas mal de temps désormais. L’or repasse sous la barre des 2'000 dollars l’once et le pétrole a reculé la semaine passée, le baril de WTI Light Crude traite à 76,79 dollars. Le dollar reste plutôt faible, la paire EUR/USD évolue à 1,0976, elle regarde 1,1033 comme prochaine résistance (plus haut de la séance du 2 février) puis 1,1076 (plus haut de la séance du 14 avril).

Pierre Wunsch, qui siège au conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne, n'acceptera d'interrompre les hausses de taux d'intérêt que lorsque la croissance des salaires commencera à diminuer, rapporte le Financial Times, citant une interview. «Je ne serais pas surpris si nous devions passer à 4%», indique M. Wunsch, qui est à la tête de la banque centrale de Belgique. «Nous attendons que la croissance des salaires et l'inflation de base diminuent, ainsi que l'inflation globale, avant d'arriver au point où nous pourrons faire une pause». Selon lui, les investisseurs sous-estiment la hausse des coûts d'emprunt dans la zone euro. Les chiffres de l'inflation ne vont pas encore dans la bonne direction. Il ne voit pas d'indication que ce que fait la banque est excessif. Il voit des signes évidents d'«effets de second tour», les travailleurs cherchant à obtenir des salaires plus élevés pour compenser le coût de la vie, ce qui pousse les prix à la hausse.

En France, la cote de popularité d'Emmanuel Macron baisse de deux points à 26%, son niveau le plus bas depuis plus de quatre ans, après l'adoption d'une réforme controversée des retraites, selon un sondage Ifop pour le Journal du Dimanche.

Les États européens réagissent fortement après qu'un diplomate chinois a remis en question l'indépendance des pays de l'ex-Union soviétique. Certains n'ont pas de statut de souveraineté effective au regard du droit international, déclare l'ambassadeur en France Lu Shaye. La Lettonie, la Lituanie et l'Estonie annoncent qu'elles convoqueraient les envoyés de Pékin, et Paris exprime sa «consternation», alors que les efforts d'Emmanuel Macron pour obtenir l'aide de la Chine afin de mettre fin à la guerre de la Russie semblaient se retourner contre lui. Pékin n'a pas encore fait de commentaires.

Le Kremlin pourrait riposter si le G7 décrète une interdiction totale de la plupart des exportations vers la Russie en se retirant de l'accord de transit sécurisé qui permet à l'Ukraine d'expédier des céréales à partir des ports de la mer Noire. Moscou envisagerait également d'interdire l'exportation de certains de ses propres produits, déclare Dmitri Medvedev. Par ailleurs, l'Union européenne devrait proposer d'interdire de nombreux produits transitant par la Russie.

Les États-Unis demandent à la Corée du Sud d'exhorter les grands fabricants de puces Samsung et SK Hynix à s'abstenir d'augmenter leurs ventes en Chine au cas où Pékin interdirait à la société américaine Micron d'y vendre ses produits, rapporte le FT. Cette décision intervient avant la visite d'État du président sud-coréen Yoon Suk-yeol aux États-Unis aujourd'hui. La Chine a lancé une enquête sur la sécurité nationale de Micron, mais on ne sait pas encore quelles mesures seront prises.

Les armées américaine et britannique évacuent leurs diplomates du Soudan, tandis que d'autres pays s’efforcent d'accéder à l'aéroport de Khartoum après la dissolution apparente d'un cessez-le-feu temporaire entre les belligérants. Selon le Washington Post, 16’000 autres citoyens américains qui ne travaillent pas pour le gouvernement – pour la plupart des personnes ayant la double nationalité – restent au Soudan. Plus de 420 personnes ont été tuées et au moins 3’700 blessées, selon l'OMS.

Au menu macro-économique du jour, l'indice Ifo de confiance des affaires en Allemagne (10h00) précèdera l'indice d'activité de la Fed de Chicago aux Etats-Unis (14h30).

C’est une grosse semaine qui débute pour les entreprises du monde entier, la saison des résultats du premier trimestre accélère, pas moins de 180 firmes de l’indice S&P500 publient leurs chiffres et pas des moindres (notamment GOOGL, MSFT, META, AMZN, V, BA, EBAY, MA, CMCSA, MRK, BMY, LLY, CAT, ABBV, HON, INTC, GILD, ATVI, CHTR, XOM, CVX). À noter qu’UBS publie ses résultats demain.

Dans le calendrier macro-économique américain, nous aurons des données sur l'indice des prix des logements Case-Shiller, les ventes de logements neufs et la confiance des consommateurs mardi; les commandes durables et les stocks de gros mercredi; les demandes hebdomadaires d'allocations chômage, le PIB préliminaire du premier trimestre et les ventes de logements en attente jeudi; et nous terminerons la semaine avec l'indice de base PCE, les dépenses/revenus personnels, l'indice du coût de l'emploi, l'indice PMI de Chicago et le sentiment des consommateurs du Michigan d'avril vendredi.

Credit Suisse: les sorties de fonds ont atteint 61,2 milliards de francs au premier trimestre, pour une perte nette de 1,3 milliard de francs. Le rapport trimestriel de la banque devrait être le dernier avant son rachat par UBS. Philips: le groupe néerlandais va prendre une provision de 575 millions d’euros dans le cadre du contentieux pour le rappel des appareils respiratoires. Les résultats du premier trimestre sont plus élevés que prévu. ISS recommande de voter contre la proposition de scinder les activités de HSBC en Asie. Tesla prépare l'exportation de la Model Y vers le Canada depuis la Chine, selon Reuters. Silver Lake rachète l'allemand Software AG pour 2,2 milliards d’euros (30 EUR l'action) avec la bénédiction du conseil d'administration. La branche santé grand public de Johnson & Johnson va commencer à tester l'appétit du marché pour une introduction en bourse, selon le Wall Street Journal. Lyft va supprimer 1200 postes additionnels pour réduire ses coûts.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en baisse, hormis Tokyo qui grappille 0,1% à la cloche. Hong Kong abandonne 1,38%, Shanghai perd 0,78% et Séoul recule de 0,82%. Le future SPX rend 19 points et l’Europe ouvre en repli de 0,2%.

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