Le dollar et les bons du Trésor des Etats-Unis semblent de plus en plus radioactifs au yeux d’investisseurs déboussolés et fatigués par la politique erratique d’un Donald Trump chaque jour un peu moins crédible. Il y a quelque chose de pourri au royaume du Danemark grand blond, cette fin de semaine est marquée par une volatilité qui prend ses aises parmi nous, des rendements obligataires américains qui ne reculent pas, bien au contraire, un billet vert à l’agonie qui subit les assauts répétés de l’euro (qui n’en demandait pas tant) et surtout d’une aversion au risque croissante sur les parquets de trading, qui permet à l’or de s’approcher un peu plus près des étoiles, l’once traite ce matin à 3206$.
Il semble de plus en plus ardu pour les investisseurs de se positionner dans le contexte actuel. Un accord commercial entre les États-Unis et la Chine reste probable, en revanche les relations internationales sont fortement dégradées. On réalise chaque jour un peu plus combien la nouvelle administration en place à Washington est en mode improvisation. La scène virale montrant le représentant au commerce Jamieson Greer, surpris par une décision présidentielle dont il n’était pas informé, illustre ce désordre. La stratégie économique de la Maison Blanche repose sur plusieurs leviers, dont la baisse des rendements obligataires. Or, ces derniers repartent brutalement à la hausse (envolée record depuis 2001) en raison de ventes massives d’obligations, notamment par des investisseurs étrangers et d’un besoin accru de liquidités. Cette instabilité fragilise encore davantage le dollar. Si la période de transition évoquée par Trump s’éternise, une spirale négative pourrait s’enclencher, d’autant que les Américains tolèrent mal les périodes prolongées de difficulté. Dans ce climat de franche rigolade, les premiers résultats trimestriels des grandes banques américaines comme JPMorgan, Wells Fargo ou Morgan Stanley tomberont aujourd’hui. Les investisseurs surveilleront également de près les chiffres de la production et la confiance des consommateurs.
Les indices d’actions américains rendent hier soir une partie des gains massifs enregistrés mercredi. Les 7 magnifiques souffrent, particulièrement Tesla et Meta, les semis sont massacrés et le podium du jour du SPX se compose des biens de consommation de base (seul secteur à clôturer dans le vert hier), des utilities et de l’immobilier. La forte hausse de la volatilité (le VIX gagne 22% à 40,72) incite plus d’un à rester sur la touche, les rendements obligataire élevés également, le 10 ans US évolue ce matin à 4,43%, juste au-dessus de sa moyenne mobile à 100 jours (@4,41%). La paire EUR/USD grimpe à 1,1363, le money time est engagé et il est important. La tendance baissière de l’euro entamée en 2008 est clairement remise en question ce matin. Celle débutée en 2014 également, tentative de cassure en cours, tandis que la résistance horizontale de 1,1280 est également en jeu.
Si l’euro entame une tendance haussière face au dollar, cela pourrait avoir des effets significatifs à plusieurs niveaux. Pour la zone euro, cela rendrait les importations, notamment l’énergie, moins chères, ce qui aiderait à freiner l’inflation. Cependant, cela pénaliserait les exportateurs européens, en particulier l’Allemagne, en rendant leurs produits plus coûteux à l’international. Cette baisse de pression inflationniste pourrait aussi inciter la BCE à ralentir ou suspendre les hausses de taux. Aux États-Unis, un dollar plus faible rendrait les produits américains plus compétitifs à l’export, soutenant la croissance. En revanche, les importations deviendraient plus chères, ce qui pourrait raviver l’inflation et pousser la Réserve fédérale à maintenir une politique monétaire restrictive plus longtemps. À l’échelle mondiale, une telle évolution pourrait rediriger des flux de capitaux vers l’Europe et faire monter les prix des matières premières, généralement libellées en dollars. En somme, un euro fort favoriserait les consommateurs européens, mais pèserait sur les exportateurs, tandis que les États-Unis bénéficieraient d’un regain de compétitivité au prix d’une inflation potentielle plus élevée. Dossier important et à suivre donc.
Je vous passe la configuration technique des principaux indices d’actions US, qui n’incite pas à sabrer le champagne, on reparlera en début de semaine prochaine, des «death cross» se profilent à l’horizon…
Au chapitre de la macro américaine, l’indice global des prix à la consommation (CPI) de mars baisse de 0,1% sur un mois, ce qui est plus faible que prévu, en raison de la baisse des prix de l’énergie. L’indice sous-jacent (core CPI) augmente de 0% sur un mois, en dessous de la prévision de 0,3% (les tarifs aériens et les voitures d’occasion voient leurs prix baisser). L’inflation sous-jacente recule à +2,8% sur un an, passant pour la première fois sous la barre des 3% depuis avril 2021. À noter que ce rapport date d’avant les annonces de nouveaux tarifs douaniers de ce mois-ci. Les nouvelles demandes hebdomadaires d’allocations chômage s’élèvent à 223’000, en hausse sur une semaine mais légèrement en dessous des attentes. Les demandes continues sont plus basses que prévu. La journée est marquée par de nombreuses prises de parole de membres de la Fed. Logan (Dallas) estime que la politique actuelle est bien positionnée, mais avertit que les tarifs douaniers pourraient raviver l’inflation et faire grimper les anticipations d’inflation à long terme. Schmid (Kansas City) souligne que la Fed devra peut-être de plus en plus équilibrer les risques d’inflation avec les inquiétudes liées à la croissance. Goolsbee (Chicago) note que les tarifs sont bien plus importants que prévu, et prévoit que les taux d’intérêt seront plus bas dans 12 à 18 mois qu’ils ne le sont aujourd’hui.
Donald Trump agite la menace de nouveaux droits de douane et de sanctions contre le Mexique, sur fond de tensions sur le partage de l’eau entre les deux pays. «Le Mexique vole l’eau des agriculteurs texans», dénonce le président américain sur sa plateforme Truth Social, accusant son voisin de violer un traité bilatéral signé en 1944 par les deux pays.
Bruxelles pourrait taxer les géants américains de la tech si des négociations ne parviennent pas à mettre fin à la guerre commerciale lancée par Donald Trump, déclare la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen dans une interview au Financial Times . Ursula von der Leyen se dit prête à intensifier ses menaces de représailles et à cibler les services américains si les négociations venaient à échouer.
Selon le South China Morning Post, les dirigeants de l'Union européenne prévoient de se rendre à Pékin fin juillet pour un sommet avec le président chinois Xi Jinping. Cette rencontre marquerait une exception au principe d'alternance des lieux des sommets UE-Chine, qui devait initialement se tenir à Bruxelles cette année. Le président Xi ayant décliné l'invitation à se rendre en Europe, les présidents du Conseil européen, António Costa, et de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, ont accepté de se déplacer à Pékin pour maintenir le dialogue au plus haut niveau.
Au menu macro-économique du jour, aux Etats-Unis l'indice des prix à la production (14h30) et l'indice du sentiment des consommateurs de l'Université du Michigan (16h00) sont en vue.
Novartis prévoit d'investir 23 milliards de dollars aux États-Unis pour la fabrication et la recherche. Logitech confirme ses prévisions 2025 mais retire celles de 2026, en raison des craintes pour le commerce mondial. BMW envisage d'augmenter la production de son usine américaine de 80’000 unités. Google licencie des centaines d'employés dans le groupe Android et Pixel, selon The Information. Harley-Davidson envisage la vente de sa filiale de financement pour un montant de plus d'un milliard de dollars, selon Bloomberg. Donald Trump a fait annuler les habilitations de sécurité de SentinelOne, coupable d'avoir embauché un cadre qu'il n'apprécie pas. Tesla lance une nouvelle variante à long rayon d'action du Cybertruck aux Etats-Unis, au prix de 69’990 USD. Tesla qui suspend par ailleurs la prise de nouvelles commandes de Model S et Model X sur son site web chinois.
Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en ordre dispersé. Tokyo perd 2,96% à la cloche, Hong Kong avance de 1,62%, Shanghai grappille 0,45%, Séoul rend 0,5% et le Nifty50 progresse de 2,21%. Le future SPX récupère 0,5%, l’Europe ouvre en hausse de 0,2%, c’est un peu le bazar sur les indices ce vendredi matin, il serait étonnant que le plus grand nombre achète massivement avant le weekend, qui vous savez peut dégainer à tout moment, good luck.