Cotiser dès 20 ans, profiter à 65 ans

Edric Speckert, PensExpert SA

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La possibilité de cotiser dans sa caisse de pension dès l’âge de 20 ans permettrait de faire bénéficier à tous de rentes plus élevées, y compris aux salariés plus âgés.

En Suisse, les salariés gagnant plus de 22’680 francs par année et âgés d’au moins 18 ans sont assurés contre les risques de décès et d’invalidité dans le 2e pilier. C’est ce que stipule la Loi fédérale sur la prévoyance professionnelle (LPP). Toutefois, l’épargne obligatoire liée au financement de la retraite ne débute en principe que sept ans plus tard, à partir de 25 ans.

Aujourd’hui, ce décalage est difficile à justifier. Cette réglementation date de 1985 et n’a jamais été révisée au cours de cette période. Or, en 40 ans, le contexte a beaucoup changé : le taux d’intérêt minimal pour les avoirs obligatoires est passé de 4% à 1,25%, voire 1%. Concernant la prévoyance surobligatoire, aucun taux minimal n’est imposé, et les rendements y sont parfois encore plus faibles. Les avoirs de prévoyance progressent donc bien plus lentement qu’au moment de l’introduction de la LPP au milieu des années 1980.

Des rentes plus élevées grâce aux intérêts composés

Allonger la durée de l’épargne améliorerait la situation. Les entreprises pourraient d’ores et déjà ajuster leur plan de prévoyance pour permettre à leurs employés de cotiser dès l’âge de 20 ans.

Les frais administratifs liés aux prestations d’assurance sont facturés, que l’épargne commence à 20 ou 25 ans. Une personne avec un salaire annuel moyen de 60’000 francs et une déduction de coordination de 26’460 francs entre 20 et 25 ans verserait 2’350 francs par an à sa caisse de pension, financés à parts égales par l’employeur et l’employé.

Avec un taux d’intérêt moyen de 2%, cette personne aurait accumulé un capital de prévoyance de 12’218 francs après cinq ans, alors qu’elle n’aurait versé que 5’870 francs à titre de cotisation d’épargne. Le solde serait financé par l’employeur (5’870 francs) et les intérêts composés (480 francs).

A première vue, cette somme peut sembler plutôt modeste. Mais sur toute la vie active, elle augmente considérablement grâce à l’effet des intérêts composés. A la retraite (65 ans), ces 12’218 francs auraient plus que doublé pour atteindre environ 27’500 francs. Avec un rendement annuel de 3%, l’avoir atteindrait 4’900 francs après 40 ans, et même 63'500 francs avec un taux de 4%.
L’effet serait encore plus marqué si l’épargne commençait à 18 ans, mais beaucoup de jeunes sont en apprentissage à cet âge et leur revenu se situe généralement à ce moment en dessous du seuil d’entrée de la LPP fixé à 22’680 francs. À l’âge de 20 ans, davantage de travailleurs atteignent ce seuil et leurs charges fixes restent faibles, leur permettant de cotiser environ 100 francs par mois.

Par ailleurs, une partie du capital de prévoyance peut être retirée pour financer une activité indépendante ou l’acquisition un logement principal. Cette flexibilité pourrait encourager les jeunes à cotiser plus tôt, sachant qu’ils n’auront pas forcément à attendre la retraite pour pouvoir retirer leur capital de prévoyance.

Un potentiel de rachat plus important

Les employeurs souhaitant encourager l’épargne de leurs jeunes employés pourraient prendre en charge l’intégralité des cotisations avant l’âge de 25 ans. Compte tenu des revenus plus ou moins modestes des salariés de cette tranche d’âge, l’effort financier pour l’entreprise serait limité tout en renforçant son attractivité auprès de cette classe d’âge.

Un âge d’entrée plus bas présenterait aussi un avantage en termes de potentiel de rachat et des bénéfices fiscaux associés. En abaissant l’épargne obligatoire à 20 ans pour tous, même pour les assurés ayant commencé à travailler à l’âge de 25 ans, on optimise de la sorte leur potentiel de rachat.

Ce rachat ne concernerait pas seulement la partie obligatoire, mais aussi la partie surobligatoire, y compris les plans 1e pour les revenus dépassant le seuil de 136’080 francs. D’un point de vue fiscal, il est important de signaler que cette mesure devrait toutefois s’appliquer à tous les employés et non pas seulement aux cadres disposant de plans de prévoyances spécifiques.

En conclusion, opter pour le financement de l’épargne dès 20 ans dans le 2e pilier représenterait une amélioration substantielle pour l’ensemble des assurés. En prolongeant la durée d’épargne, les salariés bénéficieraient de rentes plus élevées et les employeurs renforceraient par la même occasion leur attractivité. Une telle réforme contribuerait à un renforcement significatif du système de prévoyance dans notre pays. 

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