Les autorités chinoises montrent des signes de vie

Felipe Villarroel, TwentyFour AM (Boutique Vontobel)

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Après des années de déclin du marché immobilier chinois, des détails sont apparus ces dernières semaines concernant un plan plus cohérent pour arrêter l'hémorragie.

 

Les déséquilibres économiques de la Chine ne seront pas résolus par un communiqué de presse, mais nous pensons que les mesures prises ces dernières semaines sont positives et qu'elles réduisent la probabilité d'un mouvement de marché bien plus grave. Même si ce dernier n'était pas notre scénario de base, il est juste de dire qu’il devenait de plus en plus probable.

Pour rappel, la crise immobilière chinoise résulte d'une explosion de la construction et de l'investissement de plusieurs années qui a commencé à tourner à la catastrophe en 2020, lorsque le gouvernement a renforcé la réglementation applicable aux promoteurs immobiliers, provoquant des défaillances généralisées dans le secteur et une contraction significative de l'activité immobilière. En Chine, les collectivités locales tirent une grande partie de leur financement de la vente de terrains, ce qui n'est pas chose aisée lorsque de grands promoteurs immobiliers sont en défaut de paiement. Par conséquent, les gouvernements locaux ont dû se serrer la ceinture pour faire face à une situation financière aggravée. Une grande partie du patrimoine du consommateur chinois étant liée à l'immobilier, l'effondrement du marché s'est fortement répercuté sur sa confiance. En parallèle, le gouvernement a pris des mesures hostiles à l'encontre des entreprises privées des secteurs de l'éducation, des jeux et d'internet, ce qui a également plombé l'investissement privé dans l'économie nationale. Le résultat de ce cocktail toxique est un désendettement général, des pressions déflationnistes significatives et une croissance plus lente avec peu de signes de reprise, ce qui a pour effet secondaire de nuire aux recettes fiscales.

Les gouvernements locaux seront autorisés à émettre des obligations spéciales pour acheter des logements sur le marché.

Le plan le plus cohérent pour faire face à la crise croissante a commencé à émerger à la fin du mois de septembre, lorsque la Banque populaire de Chine (PBOC) a annoncé une série de mesures qui ont dépassé les attentes du marché. Divers taux directeurs ont été réduits, ainsi que le ratio de réserves obligatoires pour les banques. Le montant des apports pour les prêts hypothécaires sur les résidences secondaires a été réduit, de même que les taux sur les prêts hypothécaires existants, et un nouveau mécanisme de soutien au marché des actions a été créé. Quelques jours plus tard, lors de la réunion du politburo de septembre, les déclarations ont laissé entendre un plus grand sentiment d'urgence de la part des autorités en ce qui concerne la situation économique et les éventuelles mesures de relance budgétaire ciblées sur le marché du logement.

Le week-end précédent, c'était au tour du ministère des finances, et bien qu'aucune mesure directe ciblant la consommation n'ait été annoncée et que les marchés soient encore quelque peu avides de détails, quelques points importants méritent d'être mentionnés.

Le plus important d’abord, le gouvernement relèvera le plafond d'endettement des collectivités locales, ce qui leur permettra d'émettre de nouveaux emprunts et de refinancer la dette de leurs véhicules financiers locaux (LGFV). Ce n'est pas la première fois que la Chine procède à un échange de dette, et même si l'ampleur de ce programme reste inconnue, le ton indique qu'elle sera importante. L'échange permettra de réduire les coûts d'intérêt, d'allonger les échéances, d'améliorer les liquidités des entreprises locales qui verront leur dette réduite et de payer les factures en retard des entrepreneurs locaux. En outre, les gouvernements locaux seront autorisés à émettre des obligations spéciales pour acheter des logements sur le marché. Il a également été confirmé que le ministère des finances émettrait des obligations spéciales dans le but d'augmenter le capital des six plus grandes banques publiques. Nous ne pensons pas que ces banques ont un besoin urgent de capitaux, mais une meilleure capitalisation contribue évidemment à l'appétit pour le prêt, même si cela ne résoudra pas le manque de demandes d'emprunt. Cela peut également signifier que les banques seront plus disposées à directement reconnaître leurs pertes et passer à autre chose, plutôt que de « prolonger et feindre » des prêts qui devront de toute façon être restructurés. Enfin, le ministre des finances Lan Fo'an a déclaré que le gouvernement central dispose d'une grande marge de manœuvre pour augmenter les déficits et émettre davantage de dette, ce qui est un signe fort que le gouvernement est à la fois inquiet et désireux d'agir pour fournir une sorte de plancher à l'économie.

Les actifs chinois ont connu des fluctuations importantes alors que les marchés digéraient les dernières mesures, qui, même pour ceux qui ne sont pas directement exposés aux actifs chinois, restent très pertinentes. Bien que le PIB de la Chine soit inférieur à celui des États-Unis en termes nominaux, sa croissance est beaucoup plus élevée malgré le malaise qui règne dans certains secteurs. La Chine représente environ 18 % du PIB mondial, mais devrait représenter environ un tiers de la croissance mondiale en 2024. Le fait que les autorités chinoises proposent enfin un plan plus coordonné et plus important est sans aucun doute une bonne nouvelle pour l'économie mondiale et pour ceux qui, comme nous, pensent qu’elle ne se dirige pas vers un atterrissage brutal. À la marge, nous pensons que cela donne de nouvelles opportunités aux acheteurs de crédit et d'autres actifs à risque.

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