Le Japon sous les feux de la rampe

Archibald Ciganer, T. Rowe Price

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Le marché japonais étant fortement orienté vers la reprise mondiale, les perspectives sont optimistes.

Alors que les actions japonaises ont enregistré de solides résultats au cours du premier semestre, le TOPIX gagnant 8,5% depuis le début de l'année*, la performance a finalement été moins important que sur d’autres marchés d'actions. Causé en partie à la forte surperformance du Japon en 2020, cela reflète également des problèmes idiosyncratiques, tels que la lenteur du déploiement du vaccin contre le coronavirus et, plus récemment, l'imposition de confinements localisés dans certaines villes, dont Tokyo.

Le thème dominant au cours du premier semestre a été la rotation continue du marché, initiée fin 2020, des valeurs de croissance aux valeurs de rendement. Cette tendance s'est véritablement accélérée à partir de février, avec l'arrivée du vaccin Pfizer contre le coronavirus. Ayant été retardé au Japon, le déploiement du vaccin a stimulé les espoirs de réouverture économique, encourageant les investisseurs à effectuer une transition vers les sociétés cycliques à des prix dévalués.

De nombreuses entreprises, ayant actuellement des valorisations
au plus bas depuis des années, sont innovantes et résilientes.

Par ailleurs, les prévisions inflationnistes ont également poussé les investisseurs à prendre leurs bénéfices sur les valeurs de croissance en faveur des valeurs de rendement et des valeurs cycliques de moindre qualité.

Les titres value en début de cycle, comme les banques et les automobiles, et surtout ceux liés aux matières premières, ont nettement surperformé en 2021 (Fig. 1), car les investisseurs ont investi dans ces secteurs pour tenter de bénéficier de la faiblesse des cours boursiers. Cependant, si la rotation du marché a été sévère, elle est pratiquement terminée, les prix étant remontés à des niveaux plus «normalisés».


 

Nous restons positifs à l'égard d'un certain nombre de secteurs de croissance durables qui offrent des opportunités à long terme. De nombreuses entreprises, ayant actuellement des valorisations au plus bas depuis des années, sont innovantes et résilientes. Elles ont été en mesure de maintenir des rendements élevés de capitaux propres et sont bien placées pour accroître leur part de marché à long terme. En effet, la pandémie a accéléré les tendances de croissance à long terme qui étaient déjà en place au Japon, comme l'automatisation des usines, le commerce électronique, la numérisation, l'e-santé, les fintechs et les technologies environnementales. La dynamique concurrentielle s'est également améliorée - ce qui signifie que les entreprises bien positionnées et résilientes sont susceptibles d'en sortir encore plus fortes.

Soutien budgétaire et monétaire favorable

En août 2020, le premier ministre japonais, Shinzo Abe, a annoncé sa démission en raison d'une santé déclinante. Cette annonce soudaine a fait craindre que le programme de réforme économique et réglementaire «Abenomics» ne prenne également fin. Toutefois, Yoshihide Suga, secrétaire général du gouvernement et bras droit de M. Abe, a remporté une victoire écrasante lors de l'élection du Parti libéral démocrate, devenant ainsi Premier ministre. Cette victoire a non seulement permis une continuité et une stabilité politique au Japon, mais aussi une poursuite du programme de réformes structurelles Abenomics. 

L'économie japonaise a progressé à un rythme annualisé
de 12,7% au quatrième trimestre de 2020.

Depuis son arrivée à la tête du pays, M. Suga a intensifié les dépenses publiques et les efforts de réforme structurelle, il a maintenu l'accent sur la croissance économique comme priorité numéro un du Japon. M. Suga s'est également engagé à réduire les émissions de gaz à effet de serre à un niveau net zéro d'ici 2050, en s'engageant à transformer la politique japonaise en matière de production d'électricité à partir du charbon et à stimuler l'innovation dans le domaine des énergies renouvelables. Par ailleurs, la Banque du Japon a réaffirmé son engagement à maintenir une politique monétaire ultra-libre.

Sur le plan domestique, un budget record de 976 milliards de dollars a été approuvé pour l'exercice 2021 afin limiter les répercussions liées à la pandémie ainsi que la hausse des coûts de la sécurité sociale et de la défense. La Banque du Japon a publié une étude sur ses moyens d'action, indiquant qu'elle maintiendra ses mesures d'assouplissement pour une période prolongée et poursuivra sa stratégie de «contrôle de la courbe des taux», mais avec une plus grande souplesse.

D’un point de vue économique, un rapport sur le produit intérieur brut a révélé que l'économie japonaise a progressé à un rythme annualisé de 12,7% au quatrième trimestre de 2020, grâce à la dynamique des exportations (notamment vers la Chine), de la consommation et des dépenses d'investissement. Un signe positif pour le marché cyclique japonais, les bénéfices des entreprises étant fortement liés à la santé de l'économie mondiale et à la demande d'exportations (Fig 2).


 

A suivre en 2021: vaccins, confinements et Jeux Olympiques

Malgré ses villes densément peuplées et sa population vieillissante, le Japon a réussi à contenir largement la propagation du coronavirus et à maintenir le taux de mortalité à un niveau relativement bas. Cela dit, le Japon a récemment connu une accélération du nombre d'infections et l'état d'urgence a dû être déclaré dans certains districts. Bien qu’inquiétant, il convient de noter que la situation actuelle est moins restrictive que les mesures de confinement en Europe et aux Etats-Unis. Le Japon a géré efficacement les précédentes vagues bien mieux que la plupart des pays du monde, mais il ferait bien de freiner cette dernière épidémie avant les Jeux Olympiques de Tokyo. Etant donné le succès avec lequel le Japon a géré les vagues précédentes, et du fait que le programme de vaccination s'accélère, nous pensons que la flambée actuelle sera gérée efficacement.

Perspectives

La voie de la reprise économique est semée de doutes, car elle dépend de l'avancement du déploiement du vaccin, de l'éventualité de «nouvelles vagues» et de l'efficacité des réponses de santé publique à ces épidémies, tant au niveau national que mondial.

Cela dit, nous pensons que la reprise économique mondiale devrait continuer à se développer jusqu'en 2021 et au-delà et que nous retrouverons lentement un semblant de «normalisation». Le Japon étant l'un des marchés les plus cycliques et les plus ouverts, fortement tributaire de la santé de l'économie mondiale, nous pensons qu'il sera l'un des principaux bénéficiaires du rebond. La reprise économique que l'on observe en Chine, principal partenaire commercial du Japon, aura certainement un impact positif.

 

*Au 28 mai 2021
 

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