Le «midmarket» américain, générateur de performance

Axel Favre, Hermance Capital Partners

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Le «midmarket», ou marché intermédiaire, est le segment des sociétés américaines dont les revenus se situent entre 10 millions et 1 milliard de dollars.

Ce marché composé de 200’000 entreprises contribue à hauteur d’un un tiers du produit intérieur brut (PIB) américain et emploie 50 millions de personnes. Cela en fait l’un des principaux moteurs de l’économie nationale, bien que de nombreuses entreprises individuelles du secteur soient peu connues du grand public. Pour se faire une idée de la profondeur de ce marché, si celui-ci était un pays, son PIB le classerait au cinquième rang des économies mondiales!

Le «midmarket» américain, dont plus de 85% des sociétés sont privées, est depuis longtemps un terrain de prédilection pour les acteurs du capital-investissement et a historiquement généré des performances supérieures au marché des sociétés à grande capitalisation. Une des raisons de cette surperformance s’explique par l’impact réel de création de valeur qu’amènent les fonds. Ces entreprises de tailles moyennes sont généralement agiles, mais manquent souvent de ressources et les gérants spécialisés ont des expertises uniques qui permettent de soutenir les stratégies de transformation digitales ou d’acquisitions, entre autres. Par exemple, une des stratégies favorites des fonds «midmarket» américains est le «buy & build» et consiste à réaliser méthodiquement plusieurs acquisitions sectorielles autour d’une société – une plateforme. Le principal objectif de la stratégie «buy & build» est de créer de la valeur au travers de la réalisation d’économies d’échelles grâce aux synergies notamment, de gagner en part de marché et d’augmenter la taille de la plateforme afin de bénéficier d’un premium sur le profit généré par la société, l’EBITDA, un indicateur primordial pour déterminer le prix de revente. La profondeur et l’homogénéité du marché intermédiaire américain – un pays, une langue, une monnaie, des centaines de milliers de cibles – permettent d’exécuter une stratégie d’acquisition plus agressive qu’ailleurs, afin de créer des leaders dans des industries vastes et peu consolidés. En 2020, plus de 70% de toutes les transactions américaines en capital-investissement concernaient ce genre d’acquisitions.

Le nombre d'entreprises du marché intermédiaire continue de croître et la plupart d’entre elles sont actuellement détenues par leurs fondateurs.

De manière plus générale, les investisseurs apprécient également le fait que les multiples d'entrée du marché intermédiaire sont inférieurs à ceux des transactions dans des sociétés de grande taille (proche de 11x l’EBITDA pour le «midcap» contre 13.5x pour le «large cap») et que la création de valeur s’appuie moins sur le levier d’endettement traditionnellement utilisé dans les LBOs plus matures. De plus, les options de sortie sont moins limitées que pour les grandes entreprises, avec notamment des possibilités de revente à un autre fonds de capital-investissement, à un acteur stratégique industriel ou via une entrée en bourse.

La crise du Covid-19 a bien entendu impacté une grande partie des sociétés américaines, mais de manière inégale. Un certain nombre d'industries, y compris la technologie et la santé, ont connu un essor, tandis que d'autres, comme les loisirs et le transport, ont été durement touchées. La reprise a néanmoins été rapide, grâce à la vaccination et aux milliards de dollars distribués aux ménages, et l’économie américaine a retrouvé au deuxième trimestre son niveau d’avant-crise. Les entreprises du marché intermédiaire, agiles et moins endettées que les grandes entreprises, se sont souvent mieux adaptées aux conditions de crise et ont même enregistré d’excellents résultats, avec une amélioration des bénéfices grâce à la baisse des coûts et à une efficacité opérationnelle optimisée.

Le nombre d'entreprises du marché intermédiaire continue de croître et la plupart d’entre elles sont actuellement détenues par leurs fondateurs. Aux États-Unis, on estime entre 30 et 40’000 milliards de dollars les richesses qui seront transmises par la génération des baby-boomers à leurs successeurs au cours des 25 à 30 prochaines années, ce qui suggère que de nombreuses entreprises du marché intermédiaire auront besoin de capitaux pour faire face aux différents défis liés à cette transition. Aujourd’hui, moins de 5 % des 200’000 entreprises du marché intermédiaire américain sont détenues par des fonds, ce qui représente une opportunité pour l’industrie du capital-investissement. Le «midmarket» américain reste néanmoins un terrain de jeux local, c’est-à-dire que le marché est dominé par des fonds de capital-investissement domestiques investissant principalement dans des entreprises qui restent nationales, ce qui limite l’accès au marché à des investisseurs étrangers.

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