L’inflation reste provisoire

Jonathan Baltora, AXA Investment Managers

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Mais il est raisonnable de protéger le portefeuille.

  • Malgré l’augmentation de la demande des consommateurs, la pénurie de matières premières et les interruptions durables des chaînes logistiques, l’inflation est inhabituellement élevée.
  • Néanmoins, nous restons d’avis que ce développement ne sera pas durable.

Il existe des signes indiquant que l’inflation pourrait déjà avoir atteint son apogée aux Etats-Unis. Le prix à la consommation des Etats-Unis (VPI) a augmenté de 0,3 pour cent au mois d’août. Il est donc repassé au niveau du mois de janvier après avoir atteint 0,5 pour cent en juillet1. Dans la zone euro, le taux d’inflation annuel s’élevait à 3,4 pour cent en septembre – du jamais vu depuis 13 ans. La Banque centrale européenne a argumenté que des facteurs uniques – comme par ex. les goulots d’étranglement dans l’approvisionnement – sont responsables d’une grande partie de cette valeur et que l’augmentation des prix sera probablement moins élevée au début de 20222.

Nous partons du fait que l’inflation continuera d’être supérieure à quatre pour cent aux Etats-Unis et qu’elle diminuera vers la fin du premier trimestre 2022. Pour la zone euro, nous nous attendons à ce que l’inflation reste proche de 2,5 pour cent jusqu’à la fin du deuxième trimestre 2022 et qu’elle commencera ensuite à baisser quand les problèmes inhérents à la chaîne logistique seront partiellement résolus et que la demande se sera normalisée.

Si l’on compare cette évolution aux années passées, même si la hausse des prix diminuera, les prix resteront en général relativement élevés. L’année prochaine à la même date, l’inflation devrait être d’environ 2,5 pour cent aux Etats-Unis et de 1,5 pour cent dans la zone euro. L’Organisation de coopération et de développement économiques a averti que les prix augmenteront plus rapidement au sein du groupe des G20 qu’avant la pandémie, au moins pendant les deux années à venir3.

Risques pour les perspectives d’inflation

Bien entendu, il est difficile de faire des prévisions pour l’inflation. L’évolution des prix peut prendre une autre forme en raison de facteurs inattendus ou uniques. La pandémie du coronavirus a transformé la phase de croissance et d’inflation modérées dans de nombreuses économies nationales. La reprise après les confinements, suivie des phases de «Stop and Go» ont fait hésiter de nombreuses entreprises. Elles n’ont pas augmenté leurs capacités de production, ce qui a entraîné des perspectives économiques et d’inflation plus volatiles.

Les transformations politiques en Chine constituent un autre risque pour l’inflation globale. La Chine modifie son modèle de croissance pour passer d’une économie centrée sur l’exportation à la consommation. Ceci pourrait avoir de grandes conséquences sur les prix. A ceci s’ajoute la pénurie actuelle d’énergie en Chine qui freine la production de certaines usines, ce qui influence également l’inflation.

A l’heure actuelle, nous considérons la spirale prix/salaire comme le plus grand risque d’inflation. Elle est causée par une pénurie de main d’oeuvre qui apparaît lors de la reprise des économies nationales. Les salaires augmentent dans de nombreux secteurs pour attirer de nouveau la main d’oeuvre. Une augmentation du revenu disponible entraîne généralement une hausse de la demande de biens et de services, et donc une augmentation des prix. La hausse des prix augmente alors la demande concernant des salaires plus élevés, ce qui peut entraîner une spirale des prix. Elle risque de cesser quand les taux d’intérêts réaugmenteront.

Stratégies d’investissement adaptées pour protéger de l’inflation

Nous sommes d’avis que le choc inflationniste actuel sera provisoire. Toutefois, le terme «provisoire» est de plus en plus difficile à définir étant donné que le taux d’inflation continue à nous surprendre. Ceci crée les conditions nécessaires pour que les Banques centrales normalisent leur politique monétaire. Il faut s’attendre à ce que la Fed annonce une diminution progressive de ses acquisitions d’obligations (tapering) au cours de sa réunion du mois de novembre. Peu après, le tapering va commencer et devra être terminé d’ici le milieu de l’année prochaine.

La commission de la Fed chargée du taux d’intérêt a également avancé ses attentes et la première augmentation du taux d’intérêt devrait avoir lieu en 2022. Par ailleurs, la Bank of England a signalé lors de sa réunion de septembre qu’elle pourrait être l’une des premières grandes Banques centrales à augmenter les taux d’intérêts, et ce probablement avant la fin de l’année. Toutefois, nous pensons que ceci aura lieu plutôt en 2022.

  • Au regard de ces informations, nous préférons les obligations indexées sur l’inflation situées à l’extrémité avant de la courbe de rendements – autrement dit, des obligations avec une duration plus courte, qui sont potentiellement mieux protégées des taux d’intérêts supérieurs.
  • Nous préférons également les obligations indexées sur l’inflation avec une duration plus courte car par le passé, elles ont réagi davantage aux prix des matières premières.
  • Dans la zone euro, le relâchement quantitatif semble constituer un élément durable de la politique monétaire alors que l’inflation reste à un niveau relativement bas. Un risque supplémentaire car la politique monétaire changera à un moment donné. Les obligations souveraines françaises et allemandes caractérisées par une faible duration peuvent être adéquates pour équilibrer les différences importantes entre les rendements obligataires nominaux et les rendements réels des obligations indexées sur l’inflation (taux d’inflation breakeven) tout en offrant une protection éventuelle contre un changement de politique.
  • Aux Etats-Unis, nous misons sur des obligations souveraines indexées sur l’inflation avec une duration d’un ou de deux ans («Treasury Inflation Protected Securities») en raison du carry positif obtenu par l’indexation de l’inflation. Toutefois, nous prenons nos distances par rapport aux TIPS sur cinq ans et plus qui, selon nous sont concernés par la baisse des acquisitions d’obligations.

L’année 2021 a montré que l’inflation peut augmenter sans avertissement. Pour le moment, l’une des meilleures stratégies semble consister à maintenir une certaine protection contre l’inflation dans les portefeuilles de titres, malgré la normalisation probable de la politique monétaire.

 

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