Potentiel des obligations vertes

Chris Iggo, AXA Investment Managers

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Les investisseurs attendent fébrilement le lancement de la stratégie du gouvernement britannique en matière d’obligations vertes.

Prêt au lancement

La semaine dernière, le Bureau britannique de gestion de la dette a communiqué le lancement le 20 septembre du premier emprunt obligataire vert du Royaume-Uni. Une demande très importante est attendue pour les emprunts avec une durée jusqu’au 21 juillet 2033. Le gouvernement britannique s’est engagé à lancer cette année deux emprunts obligataires verts pour un volume d’émission d’au moins 15 milliards de livres. Compte tenu des attentes, le premier emprunt devrait être de huit à dix milliards de livres, avec un coupon de 0,75% environ. Plus tôt cette semaine, l’Espagne avait émis un emprunt vert et encaissé cinq milliards d’euros pour un emprunt sur (un peu plus de) 20 ans, avec un coupon de 1%. L’émission a fait l’objet d’une souscription douze fois excédentaire . Le marché pour les emprunts d’Etat verts est donc ouvert.

Les obligations comme pièce maîtresse du financement vert

Pour atteindre l’objectif zéro carbone, les marchés obligataires occupent un rôle décisif dans la mobilisation des épargnes globales. Les marchés boursiers pourraient récompenser les entreprises qui contribuent à la transition technologique et qui appliquent le mieux possible les divers facteurs ESG. Les emprunts permettent dans le même temps de disposer de fonds pour de nouveaux investissements. Les obligations souveraines en particulier peuvent y contribuer à large échelle. En achetant 4000 bus à moteur électrique ou à hydrogène, le gouvernement britannique va financer des technologies à faible émission de carbone qui ont un potentiel de croissance et qui contribuent par ailleurs au financement du développement de nouveaux projets visant à réduire les émissions de CO2. A l’échelon international, les fonds susceptibles de favoriser les investissements verts sont donc énormes.

Des rendements faibles favorisent des emprunts à long terme

Les obligations vertes espagnoles ont été émises avec un coupon de 1%, alors que le coupon du Royaume-Uni devrait être inférieur. Les trois obligations vertes allemandes sont toutes assorties d’un coupon à 0%. La situation sur les marchés boursiers rend très attrayant le fait d’émettre des titres de créance à long terme pour financer la protection du climat. Certes, il est sans cesse prétendu que le niveau d’endettement mondial est trop important, raison pour laquelle les taux ne pourraient monter, avec pour corollaire inflation et instabilité financière. L’inverse est cependant vrai: le problème n’est pas un surendettement, mais un endettement insuffisant. Si nous nous préoccupons du rapport entre la dette et le PIB, nous devons nous focaliser sur le dénominateur commun. Si les mesures prises pour contrer le réchauffement climatique ne suffisent pas, la croissance du PIB va se rétracter. Les dépenses consenties aujourd’hui et ces prochaines années vont soutenir la croissance et créer le potentiel d’inverser les baisses de productivité à long terme et de réduire les coûts et risques externes.

Pas l’heure d’économiser

Dans de nombreux pays, la pandémie a conduit à une hausse des emprunts d’Etat, et les débats font en ce moment rage sur la future politique financière à adopter. Les élections prochaines au Bundestag et le potentiel sursaut de la gauche au sein de nouveau gouvernement fédéral allemand pourraient encore intensifier ces débats. A cet égard, les dépenses pour lutter contre le réchauffement climatique doivent être considérées comme un complément à l’activité normale, et, à notre avis, une plus grande souplesse est de mise dans la gestion du déficit et de la dette. L’augmentation annoncée cette semaine des cotisations d’assurance sociale pour financer les dépenses plus élevées en matière de santé et de prévoyance sociale au Royaume-Uni est certes considérée comme neutre sur le plan fiscal, mais elle contribue tout de même à une augmentation de la charge fiscale générale et à une impulsion fiscale ressentie négativement par beaucoup. L’Europe bénéficie quant à elle d’une impulsion fiscale positive due en particulier au financement accéléré du Plan de relance européen (NextGenerationEU). Considérant ce qui précède, il est concevable que le cours euro/sterling avoisine les 0.90 livre pour 1 euro. Les dépenses vertes au Royaume-Uni pourraient, dans une certaine mesure, compenser le déficit fiscal en raison de potentiels effets multiplicateurs.

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