Finance comportementale: moteur de l’investissement?

Christophe Collet, Vanguard

2 minutes de lecture

La plupart des êtres humains prennent des décisions sur la base d’informations imparfaites.

La finance comportementale est un domaine de la recherche qui intègre des modèles rationnels de comportement issus de l'économie et de la finance avec des modèles affectifs ou émotionnels issus de la psychologie. L'une des principales contributions est l'identification de biais, comme la procrastination, et l’analyse de la manière dont un biais donné peut améliorer ou affaiblir des déci-sions rationnelles.

Il y a probablement plus de 100 biais identifiés dans le domaine de l'économie comportementale, les suivants semblent être les plus significatifs:

  1. Le biais de la préférence pour le présent ou l'impatience - de nombreux individus se con-centrent sur le présent au détriment de l'avenir. Par exemple, nous n'économisons pas as-sez pour nos vieux jours.
  2. Le biais de statu quo ou l’inertie - beaucoup d'entre nous, lorsqu'ils sont confrontés à une décision compliquée, optent pour la voie de la moindre résistance et ne font rien. C'est pourquoi les stratégies par défaut, comme l'inscription automatique à un plan d'épargne d’entreprise, sont si efficaces pour modifier les comportements.
  3. Le biais de cadrage - la manière dont une question est posée, par exemple si elle est posée en tant que question positive ou négative, conduira à des réponses complètement diffé-rentes.
  4. L'aversion pour les pertes - pour un niveau donné de gain ou de perte, les individus ressen-tiront la perte plus de deux fois plus fortement que le gain. Ceci est particulièrement vrai quand les marchés sont en baisse, comme c’est le cas actuellement.
  5. La confiance excessive - la plupart d'entre nous pense que nous sommes meilleurs que la moyenne et surestimons nos capacités. 

Les biais affectent tous les types d'individus, quelles que soient leurs compétences. La question de savoir si les biais peuvent être corrigés par l'éducation financière reste ouverte, mais des études préliminaires suggèrent que c'est possible.

La finance comportementale peut aider à améliorer les résultats.

La finance comportementale ne postule pas un comportement irrationnel ou rationnel. Elle pourra aider les gestionnaires à améliorer les résultats. Ceux-ci sont déterminés non seulement par la constitution d'un portefeuille diversifié d'actifs à faible coût, mais aussi par la capacité à prendre des décisions judicieuses en matière de montant épargné, de répartition des actifs, d’échéance pour investir ou désinvestir. Une bonne prise de décision est donc clé pour améliorer sa perfor-mance, pas seulement le fait de disposer de véhicules d'investissement de qualité et à faible coût.

Dans un contexte de crise comme aujourd’hui, les biais comportementaux les plus flagrants, et les plus dangereux sont l’aversion pour les pertes et l’excès de confiance sans aucun doute.

La plupart des êtres humains prennent des décisions sur la base d’informations imparfaites. La question est seulement de savoir si vous le faites de manière impulsive ou réfléchie. Si vous savez que les marchés qui baissent de manière brutale poussent les êtres humains à agir de manière im-pulsive, ce qui est important est d’élaborer des règles de comportement pour y remédier.

Question ouverte de savoir si les investisseurs
sont devenus plus résistants et moins réticents aux pertes.

Nous avons des preuves scientifiques solides que le comportement caractéristique d’une classe d’âge tend à persister dans le temps - par exemple, les personnes touchées par la Grande Dépres-sion ont des comportements financiers différents de celui des baby-boomers. Mais on n’a pas en-core étudié si certains biais spécifiques évoluent dans le temps ou non. Par exemple, nous avons subi trois chocs importants sur les marchés au cours des 20 dernières années. Une question de recherche ouverte est de savoir si les investisseurs sont devenus plus résistants et moins réticents aux pertes - ou non.

Combattre ces biais et tendre vers une rationalité

Etre conscient de ses propres biais est un bon point de départ, même si, en pratique, cela peut s'avérer difficile. De même, coller à ses objectifs pour ne pas perdre de vue ce pourquoi on investit, ou suivre un processus d’investissement préétabli, par exemple une règle systématique en ma-tière de repositionnement du portefeuille, peuvent aider à surmonter ses biais comportementaux.

Cependant, même si la sensibilisation et l'auto-éducation aux différents biais peuvent aider, une étude célèbre sur le comportement en matière d'épargne-retraite a montré que, même si les sala-riés savent qu'ils doivent épargner pour leur retraite, ils n’arrivent pas à s’y contraindre.

Une idée prometteuse - que ce soit pour l’épargne-retraite ou l'exercice physique - est l'idée d’essayer de changer petit à petit, de manière progressive. Ne pas se fixer comme objectif d’épargner 10% de ses revenus, mais plutôt 1 ou 2% de plus chaque année. Ne pas se forcer à faire une promenade de 2 heures, mais commencez par 15 minutes par jour et augmenter progressive-ment. C'est en grande partie l'histoire de la fable d'Esope, sur la tortue qui finit par dépasser le lièvre malgré ou grâce à son cheminement lent et régulier…

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