Refroidi par la BoJ, le yen sur un vertigineux grand huit

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Après son envol de début de semaine, la devise nipponne a brièvement perdu plus de 2% mercredi face au billet vert, à la suite de commentaires d’un responsable de la Banque du Japon.

Après une envolée spectaculaire en début de semaine, le yen a rechuté face aux principales devises mercredi après que la Banque du Japon a plombé les attentes de hausse de taux directeurs à courte échéance.

La devise nipponne a même brièvement perdu plus de 2% mercredi face au billet vert, à la suite de commentaires d’un responsable de la Banque du Japon (BoJ).

La Banque du Japon «ne relèvera pas son taux directeur lorsque les marchés financiers et les marchés des capitaux sont instables», a déclaré mercredi Shinichi Uchida, l’un des deux gouverneurs adjoints de la BoJ.

«Le gouverneur adjoint de la Banque du Japon (..) semble avoir mis fin à la fête», commente Derren Nathan, analyste chez Hargreaves Lansdown, le yen chutant immédiatement en réaction aux commentaires perçus comme accommodants du responsable de la BoJ.

Les investisseurs ont en effet «commencé à réduire les attentes de nouvelles hausses des taux de la BoJ cette année», explique Lee Hardman, analyste chez MUFG.

L’institution monétaire «fait à nouveau marche arrière en raison de la chute du marché boursier au début de la semaine», souligne Antje Praefcke, de Commerzbank.

Pour l’analyste, les «déclarations d’Uchida ne signifient pas nécessairement que le cycle [de relèvement] des taux au Japon est déjà terminé avant même qu’il n’ait réellement commencé», mais que la BoJ se montre sensible à une dépréciation trop rapide du yen, ou s’il s’apprécie trop vite.

Grand huit

Car depuis le début de semaine, le yen enregistre des variations vertigineuses.

Lundi, la monnaie s’était envolée en pleines craintes de récession aux États-Unis et chaos sur les marchés boursiers, poussé par un mouvement de liquidation d’opérateurs spéculatifs.

Le yen avait alors atteint 141,70 yens pour un dollar, un plus haut face au billet vert depuis janvier, décollant brièvement de plus de 3%, une variation d’une ampleur rare pour les paires principales du marché des changes.

La devise nipponne évoluait pourtant encore mi-juillet à son plus bas niveau depuis 1986, frôlant les 162 yens pour un dollar.

Derren Nathan attribue cette volatilité considérable à l’ampleur des opérations de «carry trade» sur le yen.

Le «carry trade» consiste à emprunter de l’argent dans la monnaie d’un pays dont la banque centrale pratique des taux faibles pour l’investir dans une devise aux rendements plus élevés.

«Il s’agissait d’une stratégie populaire parmi les spéculateurs, qui ont emprunté à bon compte en yen, tout en surfant sur la vague de gains impressionnants des méga-capitalisations américaines, dominée par le dollar», explique M. Nathan.

Car jusqu’à récemment, la BoJ naviguait à contre-courant de nombreuses autres banques centrales optant pour une ligne beaucoup plus ferme pour combattre l’inflation avec des relèvements successifs de taux, la Banque du Japon préférant conserver une politique monétaire dite ultra-accommodante, afin de soutenir l’économie nippone.

Après des années de taux négatifs, la BoJ a fait la semaine dernière un pas de plus sur le chemin de la normalisation monétaire en relevant son taux directeur à 0,25%, un niveau plus vu depuis 2008, et avait alors ouvert la porte a des hausses supplémentaires, entraînant une vague de liquidation des positions de «carry trade».

Les liquidations de ces opérations ont «amplifié la réaction à quelques données économiques américaines peu encourageantes la semaine dernière», explique Derren Nathan.

Et aussitôt qu’un membre de la BoJ indique que de nouvelles hausses de taux ne sont pas à l’ordre du jour tant que les marchés demeurent instables, la logique s’inverse, faisant immédiatement sombrer le yen.

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