Le calme avant la tempête?

Salima Barragan

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Les taux de défaut en Europe resteront inférieurs à ceux des Etats-Unis, estime Jonathan Golan de Man GLG.

Jusqu’ici, tout va bien. Contrairement à ce que les Cassandres prédisaient, le retournement du cycle du crédit n’a pas (encore) eu lieu. Les segments des titres cycliques et de qualité inférieure ont bien résisté jusqu’à présent. Cependant, les effets des politiques monétaires et de la diminution d’octrois de prêts bancaires n’ont pas encore malmené le marché. Le futur donnera-t-il raison aux Cassandres? La réponse de Jonathan Golan, Head of Global Investment Grade de Man GLG.

Où nous situons-nous dans le cycle du crédit?

Malgré les hausses de taux, et à ce stade du cycle économique, les marchés du crédit restent beaucoup plus calmes que ce à quoi l'on pourrait s'attendre. Nous parlons depuis un certain temps du retournement du cycle du crédit, mais nous avons été surpris par la résistance des segments cycliques et de moindres qualités des marchés du crédit. Cependant, nous pensons que les conséquences du resserrement de la politique et de la réduction des prêts bancaires devraient conduire, en temps voulu, à une pression sur les segments de moindre qualité du marché des prêts et des obligations à haut rendement.

«Avec des rendements globaux supérieurs à 10%, les coûts d'intérêt plus élevés pour les entreprises restent prohibitifs.»
C’est-à-dire?

Avec des rendements globaux supérieurs à 10%, les coûts d'intérêt plus élevés pour les entreprises restent prohibitifs, et sur le marché des obligations à haut rendement, certains émetteurs sont confrontés à un refinancement plus élevé. Bien entendu, beaucoup seront exclus du marché et, par conséquent, nous nous attendons à ce que davantage d'opportunités de titre en détresse au cours des prochains trimestres.

Comment décrivez-vous le marché actuel?

Il s'agit davantage d'un marché de sélection de titres.  Si l'on considère la dispersion au sein du segment mondial investment grade, il est clair qu'il existe de nombreuses opportunités.

Historiquement, investir dans des crédits dont les écarts par rapport aux obligations d'Etat sont supérieurs à 300 points de base s'est avéré, en supposant que la notation investment grade soit maintenue, un investissement attrayant sur 18 à 24 mois. Notre indicateur de dispersion reste élevé, en particulier par rapport à l'ère de l'assouplissement quantitatif, ce qui signifie qu'il existe de nombreuses opportunités au niveau des titres individuels. Avec le ralentissement de la croissance, cette dispersion devrait s'accroître, élargissant le nombre d'options.

Pouvez-vous nous préciser ces opportunités?

Les investisseurs doivent être prêts à jouer à la fois l'attaque et la défense. Par exemple, nous sommes attirés par le secteur bancaire et immobilier européen où les valorisations continuent d'être bon marché. En revanche, nous sommes beaucoup plus défensifs sur les secteurs cycliques ou aux Etats-Unis, où nous sommes peu exposés.

«Nous pensons que les investisseurs doivent travailler un peu plus dur pour extraire de la valeur.»
Prévoyez-vous une augmentation significative du taux de défaillance de titres à haut rendement?

Oui, tout à fait. En Europe, le taux restera inférieur vis-à-vis des Etats-Unis, car il s'agit d'un marché globalement de meilleure qualité et moins cyclique. Cette combinaison de facteurs nous amène à penser que le crédit européen - en particulier les valeurs financières -, est bien mieux placé que le marché américain. Le risque de défaut demeure plus faible sur l’investment grade, mais nous devons nous méfier du potentiel de déclassement des titres à haut rendement, ce qui favorise une approche active, plutôt que passive.

Les titres investment grade sont-ils correctement valorisés?

Dans l'ensemble, les valorisations ne semblent pas bon marché par rapport à leur historique, mais cela masque le fait que la qualité de crédit de l'indice s'est considérablement dégradée au cours des 30 dernières années. Nous ne préconisons donc pas d'acheter simplement du bêta, c'est-à-dire de s'exposer à l'ensemble du marché: nous pensons que les investisseurs doivent travailler un peu plus dur pour extraire de la valeur.

Quels segments privilégiez-vous dans ce contexte?

L'Europe et le Royaume-Uni restent nos régions préférées. Nous restons prudents à l'égard des Etats-Unis, car les récentes fragilités bancaires sont susceptibles d'accroître les risques d'un atterrissage brutal au cours du prochain trimestre. De plus, les valorisations restent plus chères qu'en Europe, c'est pourquoi nous maintenons une faible exposition au marché américain.

La valeur reste en Europe, avec un accent sur les financières restant dans une position robuste par rapport à leurs homologues américaines. Nous ne trouvons que peu, voire pas, de valeur dans les parties cycliques industrielles du marché du crédit où les spreads continuent de tenir compte d'un ralentissement de la croissance. Dans l'ensemble, nous constatons que la dispersion augmente à mesure que la croissance ralentit, créant un ensemble d'opportunités attrayantes pour les investisseurs actifs.

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