Zone euro: les PMI exagèrent-ils les risques?

Bruno Cavalier, ODDO BHF

2 minutes de lecture

Les chances de rebond des indices des directeurs d’achat sont bridées par la politique restrictive de la Banque Centrale Européenne.

Au printemps dernier, les indices des directeurs d’achat (PMI) en zone euro semblaient annoncer une accélération des rythmes d’activité sur fond de reflux des prix de l’énergie. Après un point bas à 47,3 en octobre 2022, le PMI composite était remonté à 54,1 en avril, proche de sa normale. Mais la confiance a lourdement rechuté depuis. En juillet, le PMI-composite est retombé à 48,9, en zone de légère contraction du PIB réel. La rechute est très forte dans le secteur manufacturier. Les services ne sont pas épargnés pour autant. Il y a plusieurs risques baissiers. L’investissement (particulièrement la construction résidentielle) souffre des taux élevés, l’inflation recule mais cela ne suffit pas encore pour relever le pouvoir d’achat. Plusieurs pays ont amorcé des resserrements de leur politique budgétaire. A ce stade, les données «dures» (croissance du PIB réel) résistent mieux que le signal négatif donné par les PMI. Il est possible que la morosité récente des directeurs d’achat reflète davantage le reflux des perspectives de prix de vente (futures pressions sur les marges) qu’une contraction du volume des ventes. L’industrie subit une déflation des prix de matières premières (corrigeant les excès post-Covid) mais la situation n’est pas aussi dégradée que durant la grande crise financière de 2008 ou la pandémie de 2020. Attention donc à une lecture sommaire de ces chiffres (en Allemagne, par exemple, le PMI-manufacturier est inférieur à 40 points, ce qui ne correspond pas à la situation de stagnation de l’économie). Le reflux des PMI a l’avantage de tempérer les ardeurs restrictives de la Banque Centrale Européenne (BCE).

La confiance des directeurs d’achat avait nettement baissé en juillet sans raison apparente. Il n’y a pas eu de choc depuis mais les chances de rebond sont bridées par la politique restrictive de la BCE et la faiblesse du commerce mondial. La confiance des directeurs d’achat est plus élevée aux Etats-Unis qu’en Europe. La résilience de l’économie US, en particulier du côté de la demande domestique, suggère que cet écart va se maintenir en août. La croissance japonaise quant à elle, a fortement accéléré au deuxième trimestre 2023 grâce à une reprise du tourisme (d’où le haut niveau du PMI-services) et une politique monétaire qui ne pèse pas sur les investissements. Les pressions sur les prix sont encore assez contenues.

Dans l’ensemble, la confiance des ménages européens a timidement rebondi ces derniers mois avec le reflux de l’inflation et la résistance du marché du travail.
Des signaux contradictoires

Pour autant en France, selon l’INSEE et la Banque de France (BdF), le climat des affaires résiste mieux que ce que les indices des directeurs d’achat suggèrent (qui sont eux en territoire de contraction). L’indice synthétique INSEE était sur sa moyenne historique en juillet. La BdF prévoit une croissance légèrement positive au troisième trimestre. Le resserrement budgétaire pourrait toutefois accentuer les risques baissiers.

En Allemagne, un fort effet de base sur les prix de l’énergie va faire passer l’inflation de l’indice des prix à la production en territoire négatif en juillet (attendue à environ -5% sur un an). La baisse pourrait s’accentuer jusqu’à -10% en septembre. La modération des pressions inflationnistes est visible aussi, quoiqu’à un degré moindre, sur l’indice hors énergie qui stagne depuis le début de l’année. Dans ces conditions, la désinflation devrait aussi se poursuivre à l’échelon des prix à la consommation. Après un rebond au printemps, l’indice IFO du climat des affaires est reparti à la baisse au début de l’été. La composante des conditions actuelles (a priori la mieux liée à l’activité) est tombée à des niveaux seulement vus lors de la crise financière ou de la pandémie. Cela semble exagéré. Un redressement est possible mais il semble difficile d’espérer mieux qu’une stagnation de l’activité au troisième trimestre.

Dans l’ensemble, la confiance des ménages européens a timidement rebondi ces derniers mois avec le reflux de l’inflation et la résistance du marché du travail. Mais la récente remontée des prix du pétrole pourrait inverser la tendance.

Aux États-Unis, les données économiques continuent d’envoyer des signaux divergents aux membres de la Fed. D’un côté, l’inflation se replie rapidement et le climat des affaires est morose. De l’autre, le marché du travail reste très solide, les ventes au détail résistent. Dans ces conditions, il n’est pas certain que le président de la Fed donne un signal très clair en vue de la réunion du FOMC du 20 septembre. Pause ou hausse des taux sont les deux options en débat, la première a la préférence des marchés à ce jour.

A lire aussi...