Les méga-caps tirent la cote

Axel Botte, Ostrum AM

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L’espoir d’une avancée sur le plafond de la dette entretient la hausse sur fond de tensions sur les taux.

Sundar Pichai, CEO de Google et Alphabet. ©Keystone

Après les banques centrales et la publication de l’IPC américain, les marchés ont trouvé un nouveau catalyseur pour progresser cette semaine. Les rumeurs d’un accord sur le plafond de la dette ce weekend alimentent le rebond des actions américaines mené par les stars technologiques de la cote. La concentration de la performance boursière est frappante, de sorte que l’indice FANG s’adjuge 6% cette semaine. L’once d’or repasse sous 2000 dollars. Les marchés de taux traduisent aussi une détente. La remontée du 2 ans vers 4,20%-4,30% replace le T-note aux alentours de 3,70%. Le Bund suit le marché directeur vers 2,50% entraînant une amélioration modeste des swap spreads (68 pb à 10 ans; -2 pb). Les spreads souverains sont stables, dans l’attente d’un possible relèvement de la note grecque. Le crédit connait également une évolution favorable qui fait écho à la diminution de la volatilité sur les actions. Les primes de risque ont tendance à se réduire. Le dollar s’est renforcé, poussant l’euro temporairement sous 1,08 dollar. La pression revient sur le yen qui s’échange de nouveau au-delà de 138 yens contre le billet vert.

Sur le plan conjoncturel, le consommateur continue de tirer la croissance aux Etats-Unis. Les ventes au détail ressortent à +0,4% en avril. Hors éléments volatils, les dépenses progressent de 0,7%. La stabilisation des transactions immobilières témoigne aussi de la bonne tenue de la demande des ménages. La confiance des promoteurs s’améliore en mai (NAHB à 50) et les mises en chantier sont désormais stables autour de 1,4 million en rythme annuel. La baisse des prix du logement s’est arrêtée. Le Philly Fed (-10 après -31 en avril) est encourageant, mais la plupart des enquêtes manufacturières demeurent médiocres. Cela étant, le second semestre sera plus difficile avec une croissance nulle, au mieux. En zone euro, l’inflation a été confirmée à 7%. L’indice hors énergie et alimentaire se situe à 5,6%. L’emploi en hausse de 0,6%, malgré une croissance limitée à +0,1% au premier trimestre, implique une baisse de la productivité apparente qui renforce les pressions sur les prix. Enfin, les publications chinoises sont moins bonnes qu’attendu. La consommation des ménages est bien orientée (ventes au détail à +18% sur un an), mais moins forte qu’anticipé, d’où la faiblesse chronique de l’inflation. L’activité industrielle est aussi fragile et les signaux sur le logement semblent contradictoires.

Ce sont encore les grandes capitalisations de la technologie qui tirent leur épingle du jeu autour de la thématique de l’intelligence artificielle.

Les incertitudes économiques n’empêchent pas les actions de progresser. Les négociations en cours à Washington semblent avancer, de sorte qu’un accord mettant fin à la crise du plafond de la dette devrait être trouvé dans les prochains jours. Le S&P s’adjuge ainsi plus d’1,5% au-delà des 4200 points, mais ce sont encore les grandes capitalisations de la technologie qui tirent leur épingle du jeu autour de la thématique de l’intelligence artificielle. La concentration de la performance ne constitue pas un bon signal. La saison des publications s’est soldée par une baisse des bénéfices des entreprises américaines de 2,8% sur un an, malgré des ventes en hausse de 4%. Les situations sont disparates d’un secteur à l’autre. Le marché est protégé par le positionnement spéculatif vendeur. Les comptes spéculatifs (positions non-commerciales) sont vendeurs à hauteur de 375’000 contrats sur le S&P 500. De la même façon, l’Euro Stoxx 50 surperforme les indices européens plus larges. Le DAX est au plus haut historique. Les volumes sont néanmoins trop étroits pour totalement valider une accélération haussière.

Perspectives de l’obligataire

Concernant l’obligataire, l’optimisme sur les marchés ravive le risque d’un nouveau tour de vis de la Fed. Plusieurs membres du FOMC ont laissé entendre qu’une pause en juin pourrait être suivie d’une nouvelle hausse. Les marchés financiers estiment à une chance sur trois la possibilité d’une hausse des taux en juin. Ce changement s’est traduit par une tension sur le 2 ans au-delà de 4,20%, probablement alimentée par les comptes CTA qui tendent à amplifier les tendances. Ce mouvement entretient l’environnement de volatilité élevée sur les maturités courtes. Le niveau des taux dépendra également de l’évolution des conditions de crédit dans l’économie, selon Jerome Powell. Le T-note à 10 ans suit le mouvement du 2 ans en se rapprochant de 3,70%. A l’instar des actions, les positions spéculatives sont nettement vendeuses, ce qui peut signifier que le portage négatif justifie une position d’attente investie en trésorerie, d’autant que la prime sur les T-bills de maturité supérieure à 1 mois devrait se dégonfler en cas de sortie de crise sur le plafond de la dette. En zone euro, le Bund s’est tendu, touchant 2,50% en séance vendredi. Le niveau des swap spreads reste anormalement élevé autour de 80 pb sur le 2 ans. Au Royaume-Uni, le 10 ans (4%) a réagi à une communication de la BoE laissant supposer une accélération des ventes de Gilts dans le cadre du QT.

Les spreads de crédit en zone euro sont bien orientés, en particulier les primes des dettes financières subordonnées et du high yield. La collecte des fonds de crédit IG s’améliore depuis le début du mois, alors qu’on observe un léger tassement des fonds investis sur le high yield. Le marché primaire reste très actif sur le crédit de bonne qualité. Outre les 25 milliards d’euros émis dans le segment des souverains et assimilés, les émissions financières avoisinent 18 milliards d’euros (principalement senior) cette semaine et 13 milliards d’euros sur les non-financières. Le marché du high yield s’anime également sans préjudice à l’évolution des spreads du marché. L’ITraxx crossover s’échange autour de 430 pb.

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