Gonet: l'actualité des marchés au 26 mars

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

5 minutes de lecture

Nasdaq +0,12%, Dow +0,62%, SPX +0,52%, Russell +2,3%, SOX +0,20%, Eurostoxx inchangé, SMI +0,32%.

Wall Street s’offre un rebond de piètre qualité. Ne vous leurrez pas, le retournement des indices hier n’est quasiment que le fait de couvertures de positions short (vendues à découvert) et d’une situation survendue sur certains indices, comme par exemple le Russell2000 (RTY), dont le RSI (Relative Strength Index) avait atteint 37, un niveau plus observé depuis un an. Et si l’on considère les secteurs / titres qui montent hier, il n’y pas de quoi rassurer un taureau. L’indice Russell MicroCap grimpe de 3,2%, le Robinhood Index gagne 1,5% et on revient acheter les titres de grands magasins, les compagnies aériennes, les hôtels et les titres de voyagistes, sans parler des valeurs aimées des robinhooders, qui décollent (notamment Koss Corp (KOSS) +57,1%,  GameStop (GME) +52,7%, AMC Entertain (AMC) +21,3%. Du côté de la qualité en revanche, on fait maigre, tout comme les grosses capitalisations boursières, voyez plutôt: Netflix (NFLX -3,4%),  Microsoft (MSFT -1,3%),  Amazon (AMZN -1,3%),  Facebook (FB -1,2%),  NVIDIA (NVDA -0,9%),  Alphabet (GOOGL inchangée) et Apple (AAPL +0,4%). L’indice S&P500 (SPX) récupère le niveau de 3900 points et le Dow Jones teste les 32'000 mais les tient. Et on continue de se délester des valeurs chinoises cotées au NYSE.

Les actions ne rassurant pas leur monde, on se tourne vers d’autres classes d’actifs et le constat n’est guère meilleur. Le dollar est recherché comme rarement, la paire eur/usd à 1,1778, le rendement de l’emprunt US à 10 ans se maintient à 1,63% et le pétrole reste empêtré autour des 60 dollars le baril de WTI Light Crude, malgré la persistance du blocage du canal de Suez. Les statistiques économiques du jour sont bonnes (demandes hebdomadaires d’allocations chômage, PIB, j’y reviens), mais sont ignorées, le sentiment du marché reste fragile. D’ailleurs, à ce propos, la journée commence mal hier avec Jerome Powell, le boss de la Fed, qui indique que «Si l'économie se redresse et que nous faisons des progrès substantiels vers nos objectifs, nous réduirons les achats d'obligations». Oh my God! Il l’a dit! Well… rappelons que cette déclaration ne devrait en aucun cas constituer une surprise, mais le marché des actions est un peu comme un chaton, il faut lui mettre le nez dedans pour qu’il réalise certaines choses…

Les statistiques économiques encourageantes aux Etats-Unis n’ont donc pas suffi à insuffler de l’optimisme sur les marchés financiers, le contexte sanitaire dégradé continuant de peser, en particulier sur le pétrole dont l’extrême volatilité se confirme. Ce dernier ne profite d’ailleurs guère des informations de presse suggérant que le blocage du canal de Suez pourrait durer des jours voire des semaines, entraînant des perturbations majeures du commerce mondial, signe que les inquiétudes quant à la résilience de la demande sont bien plus exacerbées. Alors que l’Europe est déjà aux prises depuis plusieurs semaines avec une troisième vague particulièrement virulente, conduisant les Etats à refermer de plus en plus leurs économies, c’est au tour des Etats-Unis d’alimenter les craintes en raison du rebond des contaminations, d’autant plus qu’une part croissante de celles-ci provient des nouveaux variants de la Covid-19. L’aversion au risque se reflète dans l’écartement de l’indice itraxx crossover (+2 pb à 271 pb), Les secteurs cycliques de la cote peinent à s’attirer les faveurs des investisseurs et ce depuis plusieurs séances maintenant (basic resources). Le secteur bancaire fait également partie des moins performants (-0,7%), pénalisé par la chute additionnelle des principaux taux souverains à 10 ans.

On peut se dire que le sentiment du marché est impacté négativement par la persistance du coronavirus à nous tenir compagnie, la faillite de Greensil  ou encore le blocage du Canal de Suez. Mais cette semaine, quelque chose de probablement important est en train de se passer. La Chine nous rappelle qui fait la loi sous le préau. Les relations se durcissent entre de nombreuses nations occidentales et Pékin autour de la question des Ouïghours dans le Xinjang. On avait eu un avant-goût de l’état d’esprit chinois en entendant les propos agressifs et très arrogants de l’ambassadeur de Chine en France. Mais là Pékin passe la seconde en durcissant le ton, en adoptant une rhétorique agressive et en réagissant de façon surréaliste. Voyez par exemple la disparition quasi instantanée des produits de marques occidentales des sites de ventes en ligne, au prétexte qu’elles ont adhéré aux critiques sur le Xinjang ou ne s’approvisionnent plus dans cette région. Nike chute de 3.3% hier, elle est dans le viseur du politburo. Vous êtes en Chine et cherchez un magasin H&M sur le maps local? vous n’en trouverez plus un seul. Burberry est la première marque de luxe a être impactée, qui subit des tonnes d’injures sur les réseaux sociaux. En résumé, Pékin dit à tout un chacun qu’il vaudrait mieux acheter son coton, sinon vous allez voir votre figure à la récré…

Et dans ce contexte d’un sentiment d’une humeur versatile comme rarement, la volatilité hésite. Le VIX (volatilité du SPX) décolle en journée, atteint les 23,50 pour finalement clôturer en recul de 6,5%, à 19,81. Le niveau de 20 est décidément voué à jouer le rôle de l’arbitre du VIX…

Les taux souverains restent sur une dynamique baissière depuis le 18 mars, soit la dernière réunion de politique monétaire de la Fed au cours de laquelle Jerome Powell a rappelé la prudence durable de l’institution. Un message que plusieurs membres de la Fed ont martelé depuis, à l’instar de la prise de parole hier de Richard Clarida, qui répète que l’institution restera en soutien de l’économie jusqu’à ce que la reprise soit pleinement engagée et aussi longtemps que nécessaire (il l’a piquée à Berset?). Si le soutien des banquiers centraux est toujours indispensable, le rôle des gouvernements reste lui aussi crucial pour sortir les économies de la crise sanitaire, comme le répètent les dirigeants de plusieurs compagnies aériennes hier en insistant sur la nécessité de mettre en place un passeport vaccinal et d’accélérer la campagne de vaccination pour espérer sauver la saison estivale. Les chefs d’Etats européens chercheront à trouver des solutions lors du Conseil qui se tient à partir d’aujourd’hui, avec comme objectif de préserver la capacité de rebond de l’économie européenne et donc la confiance dans les actifs européens.

Joe Biden redouble d'efforts en matière de vaccination, il vise l’administration de 200 millions de vaccins d'ici la fin avril. Lors de sa première conférence de presse officielle, le président jure de ne pas laisser la Chine dépasser les États-Unis en termes d'influence mondiale. «Cela n'arrivera pas sous ma surveillance». Il met en garde la Corée du Nord, s'engageant à répondre si Pyongyang intensifie ses essais de missiles, et déclare qu'un afflux de migrants à travers la frontière sud est en partie saisonnier.

Plus d'un demi-milliard de doses de vaccin ont été administrées dans le monde, selon le Bloomberg Vaccine Tracker. Les chauffeurs routiers entrant au Royaume-Uni devront passer des tests Covid obligatoires dans le cadre d'un nouveau plan qui devrait être dévoilé ce week-end, selon le Telegraph. Un deuxième été perdu à cause de la pandémie pourrait déclencher une série de faillites de compagnies aériennes et de dépôts de bilan, selon IBA Group. Le Mexique est devenu le troisième pays à compter plus de 200’000 décès dus au Covid, tandis que le Brésil a établi un nouveau record d'infections quotidiennes.

L'UE d'abord, les exportations ensuite. Selon Ursula von der Leyen, AstraZeneca doit respecter ses engagements en matière de fourniture de vaccins à l'Union européenne avant de pouvoir exporter des doses. Entre-temps, Angela Merkel a fait savoir que l'Allemagne déclarerait la France zone à forte incidence de virus, ce qui signifierait que toute personne entrant en France devrait d'abord subir un test de dépistage du Covid. Emmanuel Macron déclare que tous les adultes français auront la possibilité de se faire vacciner d'ici la fin de l'été et que de nouvelles restrictions pourraient être nécessaires.

Le navire géant Evergreen reste fermement bloqué et les tarifs de transport maritime continuent de grimper en flèche. Des hélicoptères de transport lourd pourraient être nécessaires pour retirer au moins une partie de son chargement. Même si le navire était libéré et pouvait repartir immédiatement, il y a un retard d'environ 200 navires qui prendrait des jours à se résorber.

Les ventes de détail britanniques (légèrement meilleures que prévu), l'indice de confiance des consommateurs français (8h45), et l'indice Ifo allemand de confiance des milieux économiques (10h00) occuperont la matinée, avant aux États-Unis la publication des revenus et dépenses des ménages et des stocks des grossistes (13h30) et de l'indice de confiance des consommateurs de l'université du Michigan (15h00).

Microsoft est désormais en négociations exclusives pour racheter Discord sur la base d'une valorisation de 10 milliards de dollars, selon le Wall Street Journal. Aux États-Unis, la Fed va lever les restrictions sur le versement des dividendes par les banques. Allianz serait en pole position pour racheter la filiale polonaise d'Aviva pour 2,9 milliards de dollars, selon Bloomberg. Moody's relève la notation crédit de Tesla de B2 à Ba3 avec une perspective positive. Burberry devient la première marque de luxe à souffrir de mesures de rétorsion à cause de sa position sur le Xinjiang. Xiaomi va produire des véhicules électriques. ABB prévoit un rachat d'actions géant de 4,3 milliards de dollars à partir d'avril. Greensill se place sous la protection de la loi des faillites américaines à New York. Aux dernières rumeurs, Robinhood souhaiterait faire participer ses utilisateurs à son introduction en bourse.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en hausse. Tokyo progresse de 1,56% à la cloche, Hong Kong avance de 1,66%, Shanghai gagne 1,63% et Séoul 1,09%. Le future SPX avance de 15 points et l’Europe est indiquée en hausse de 0,8% à l’ouverture de 9 heures. Dead cat bounce?

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