Pékin et Washington continuent de se renvoyer la balle sur les droits de douane, alimentant l’incertitude quant à l’issue de la guerre commerciale qui devrait provoquer un recul des échanges mondiaux cette année, a prévenu l’OMC mercredi.
«Si les Etats-Unis veulent véritablement résoudre le problème par le dialogue et la négociation, ils doivent (...) cesser de menacer et de faire du chantage, et discuter avec la Chine sur la base de l’égalité, du respect et du bénéfice mutuel», a dit mercredi Lin Jian, un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.
La veille, la porte-parole de la Maison-Blanche Karoline Leavitt avait affirmé que la balle était «dans le camp de la Chine».
Donald Trump «a de nouveau clairement affirmé qu’il était ouvert à un accord avec la Chine. Mais c’est la Chine qui a besoin d’un accord avec les Etats-Unis» et non l’inverse, avait-elle affirmé devant la presse.
L’incertitude autour du commerce mondial pourrait dans tous les cas «avoir de sévères conséquences négatives», notamment pour les économies les plus vulnérables, a averti mercredi la directrice générale de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) Ngozi Okonjo-Iweala.
La suspension temporaire des droits de douane punitifs américains les plus importants atténue la contraction des échanges, mais le recul du commerce mondial de marchandises pourrait atteindre jusqu’à 1,5% en volume en 2025, en fonction de la politique protectionniste de Donald Trump, selon les prévisions annuelles de l’OMC.
«Pression»
Les nouveaux fronts ouverts par Donald Trump, ciblant certains minerais et objets électroniques, pèsent sur les Bourses mondiales mercredi, les valeurs technologiques souffrant en particulier des restrictions sur les puces imposées au géant américain du secteur Nvidia.
La Bourse de New York a ainsi ouvert en baisse, le Dow Jones reculant de 0,35%, l’indice Nasdaq lâchant 1,92% et l’indice élargi S&P 500 perdant 1,01%.
En Europe, les Bourses évoluaient également dans le rouge aux alentours de 13h45 GMT, les marchés asiatiques ayant clôturé en recul, à l’instar de Bourse de Tokyo (-1,01%).
La Chine, qui a publié mercredi une croissance économique de 5,4% au premier trimestre 2025, plus forte qu’anticipé, a par ailleurs suspendu toute réception d’avions fabriqués par l’américain Boeing.
Un geste dénoncé par le président américain, qui a affirmé sur son réseau Truth Social que la Chine s’était rétractée pour des avions pourtant «couverts par des engagements fermes».
Selon l’agence de presse Bloomberg, Pékin a également demandé aux compagnies aériennes du pays «de stopper tout achat d’équipements et de pièces détachées pour avions auprès d’entreprises américaines».
La Chine semble aussi résolue à s’en prendre à l’agriculture américaine: la fédération des exportateurs de viande américaine a confirmé à l’AFP le non-renouvellement des licences de la majorité des exportateurs de bœuf depuis mi-mars.
«Position de force»
Le président chinois Xi Jinping poursuit mercredi en Malaisie sa tournée en Asie du sud-est pour essayer d’organiser une riposte coordonnée aux droits de douane américains.
Chine et Etats-Unis sont entrés dans une surenchère: Washington a imposé au total 145% de taxe sur les produits chinois entrant sur son territoire, qui s’ajoutent à ceux existants avant le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, pour un total pouvant ainsi atteindre jusqu’à 245%. Pékin a répliqué avec une surtaxe qui atteint désormais 125% pour les produits américains.
Le président américain a cependant atténué ses annonces en exemptant les ordinateurs, smartphones et autres produits électroniques, ainsi que les semi-conducteurs, dont la majorité provient de Chine.
Pour tous les autres pays, les droits de douane réciproques supérieurs à un plancher de 10% ont été mis en pause pour 90 jours, la Maison-Blanche ouvrant la porte à la négociation.
Le président américain a d’ailleurs annoncé qu’il prendrait part aux négociations prévues mercredi à Washington avec le ministre dépêché par le Japon, Ryosei Akazawa, pour trouver un accord sur les droits de douane.
Dans les discussions qui s’annoncent, l’Union européenne (UE) est «en position de force», a assuré de son côté la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, au magazine allemand Die Zeit, car «nous, Européens, savons exactement ce que nous voulons et quels sont nos objectifs».
Autre pays dans le collimateur de Trump, le Canada a fait mardi un geste envers les constructeurs automobiles: il s’agirait de les laisser importer un certain nombre de véhicules fabriqués aux Etats-Unis en échange de leur engagement à maintenir leur production au Canada, sans droits de douane.
Ottawa a imposé 25% de droits de douane sur ces produits en représailles aux 25% imposés par Washington sur les automobiles livrées aux Etats-Unis.
En plus de l’automobile, Donald Trump a aussi imposé des droits de douane de 25% sur l’acier et l’aluminium. Il pourrait faire de même sur les semi-conducteurs et les produits pharmaceutiques dans les prochaines semaines.