C’est un marché au bord de la crise de nerfs qui démarre sa semaine hier, les déclarations du dimanche de Donald Trump ont terminé de convaincre le plus grand nombre qu’il ira «au bout de ses rêves», au mépris de toute logique et surtout de Wall Street. Début de séance sous forte pression des principaux indices d’actions américains, le Nasdaq100 (NDX) chute comme une pierre à l’ouverture (-5,2%), après deux séances de replis historiques. La peur est omniprésente, l’indice VIX (volatilité du SPX) démarre sa semaine à 60,13 pts, c’est tout bonnement le troisième plus haut niveau de tous les temps, uniquement précédé par la faillite de Lehman Brothers fin 2008 et le covid en mars 2020, ça permet de réaliser combien le marché est inquiet en ce lundi matin, il a d’ailleurs capitulé en fin de semaine passée, les volumes d’échanges sur l’ETF SPY (un des plus importants au monde, il réplique l’évolution du SPX) ont atteint des niveaux records.
Wall Street semble donc bien partie pour une troisième séance de punition collective hier, c’est alors que peu après 16h on apprend que Kevin Hassett indique à CNBC que Donald Trump considère une pause de 90 jours sur les droits de douane, et le marché de repartir vers le ciel, tout ébaubi et surpris. Kevin Hassett est le conseiller économique du président, l’information semble crédible, sauf que quelques minutes plus tard la Maison-Blanche dément, les journalistes auraient mal interprété les propos de M. Hassett, et le marché de repartir vers le sud. C’est là que ça devient intéressant, non seulement le marché ne rend pas tous les gains du jour, mais il résiste aussi à la nouvelle attaque de qui vous savez qui, non content de refuser une pause, menace la Chine de 50% de taxes supplémentaires si elle ne retire pas les 34% annoncés en réponse aux 34% de … qui vous savez. On est à 104% pour la Chine si je ne m’abuse, cela devient presque risible. On savait déjà que le SPX et le NDX étaient massivement survendus, le comportement des indices hier le confirme, il semble manifestement difficile d’entrainer le marché encore plus bas à ces niveaux de survente et de volatilité. On assiste au rebond en séance le plus important du NDX depuis 2008.
Revenons aux volumes d’échanges sur le SPY, qui s’élèvent à 256 millions d’ETFs traités hier, on n’avait jamais vu ça. La capitulation a donc eu lieu en fin de semaine et la participation au rebond/tentative de stabilisation hier est historique. Ajoutons à cela que le SPX parvient à défendre le niveau de 5'000 points à la cloche, mais surtout à se maintenir dans son canal haussier entamé en mars 2020. La volatilité se ratatine quelque peu en fin de séance, le VIX termine à 46,98, une hausse journalière de «seulement» 3,5% mais un niveau tout de même encore très élevé, le patient reste au soins intensifs, même si son pronostic vital ne semble plus engagé. La séance d’hier est donc encourageante, nous verrons rapidement si elle constitue un «dead cat bounce» ou le début de quelque chose. Le podium du jour du SPX se compose des services de communication, de la tech et des financières, le rendement du 10 ans US remonte significativement, ce matin à 4,14% contre 3,85% vendredi, il regarde sa moyenne mobile à 200 jours à 4,22%. Sur ce segment également l’aversion au risque semble se dissiper quelque peu hier. Les mastodontes de la tech se portent bien, hormis Apple (AAPL -3,6%) et Tesla (TSLA -2,5%).
Sur le front des monnaies, le dollar tente de résister face à l’euro, la paire traite ce matin à 1,0943, elle touche 1,1050 au plus haut d’hier, pile l’entrée de l’importante zone 1,1050 – 1,1100, ce portail de résistance que la paire doit traverser afin de mettre un terme à la tendance baissière de l’euro face au billet vert entamée en 2008. Hier matin les Fed Funds prévoyaient 5 coupes de 25 points de base chacune par la Fed cette année encore, ce matin il semble que l’on ne soit plus qu’à trois ce qui est une bonne nouvelle, moins le marché attend d’aide de la Fed moins il est à risque de repartir à la baisse. L’or se maintient légèrement au-dessus des 3'000 dollars l’once, le pétrole est au tapis, le baril de WTI Light Crude évolue à 60,58 dollars.
La Chine promet de «se battre jusqu’au bout» dans sa guerre commerciale avec les États-Unis. La Banque populaire de Chine affaiblit le taux de change quotidien du yuan. Pékin presse Shein de suspendre ses projets de délocalisation partielle de sa production, selon l’agence Bloomberg.
Scott Bessent affirme que les taux de droits de douane peuvent baisser pour les partenaires commerciaux des États-Unis qui ne ripostent pas, et que tout reste négociable. Il ajoute que le Japon obtient la priorité dans les discussions sur les droits de douane réciproques.
L’Union européenne propose des contre-mesures avec des droits de 25% sur une série de produits américains et laisse entendre qu’elle pourrait imposer des taxes sur les entreprises du numérique. Pendant ce temps, l’équipe Trump envisage un nouveau crédit d’impôt à l’exportation pour compenser les effets des mesures de rétorsion.
Larry Fink déclare que la plupart des CEOs lui disent que les États-Unis sont déjà en récession. Ken Griffin qualifie les droits de douane américains de «grave erreur de politique économique», affirmant qu’ils reviennent à un lourd impôt sur la classe moyenne.
Stellantis propose d'aider ses fournisseurs à payer les frais de douane, selon Bloomberg. Vinci signe le premier partenariat public-privé dans la transmission électrique en Australie. Novo Nordisk investit 1 milliard d’euros pour accroître la production d'Ozempic et de Wegovy au Brésil. Novo qui se prépare à lancer rapidement son médicament amaigrissant Wegovy en Inde. Frasers détient 49,8% du capital d'Hugo Boss. Sika met en service une nouvelle usine au Kazakhstan. Broadcom annonce un nouveau plan de rachat d'actions de 10 milliards de dollars. Apple prévoit de renforcer sa production d'iPhones en Inde pour remédier aux droits de douane, selon le WSJ. Le directeur financier de CVS Health va quitter son poste, selon Bloomberg. Levi Strauss gagne 7% hors séance après avoir confirmé ses prévisions 2025. Donald Trump demande un réexamen de l'offre de rachat de United States Steel par Nippon Steel, rouvrant la voie à un hypothétique accord. Samsung anticipe un bénéfice supérieur aux prévisions du marché au premier trimestre.
Cette nuit et ce matin en Asie, les indices rebondissent. Tokyo décolle de 6,03% à la cloche, les investisseurs apprécient que le Japon ait obtenu un billet coupe-file dans le grand barnum de négociations de droits de douane. Hong Kong gagne 1,6%, Shanghai prend 1,58%, Séoul grappille 0,26% et le Nifty50 avance de 2,2%. Le future SPX récupère 1,6% tandis que l’Europe ouvre en hausse de 1,7%.
Le VIX est un early bird, il a déjà ouvert et recule de 8% à 43,27, c’est à suivre.