À mesure que les taux d'intérêt mondiaux sans risque diminueront et cesseront d'être un investissement attractif, toutes les sous-classes d'actifs de la dette émergente devraient bénéficier de la baisse des taux d'intérêt mondiaux grâce à des coûts de financements moins élevés et une attractivité relative accrue face aux alternatives des marchés développés.
Les haut rendements des taux d'intérêt sans risque ont entraîné un certain désintérêt pour les marchés émergents au cours des trois dernières années. En effet, la forte inflation mondiale de 2022 a conduit les banques centrales des marchés développés à relever leurs taux à des niveaux encore jamais atteints depuis des décennies. En conséquence, les investisseurs étrangers n'ont pas jugé pertinent de prendre davantage de risques en déployant leurs capitaux sur les marchés émergents pour obtenir des rendements satisfaisants.
Mais la Fed et les autres banques centrales des pays développés s’étant désormais engagées dans un cycle de baisse de taux, les rendements sans risque perdent peu à peu leur intérêt, ce qui pousse de fait les investisseurs obligataires à accroître leur exposition au risque pour retrouver des rendements intéressants.
Dès que les obligations des pays émergents commenceront à recevoir des flux de capitaux, phénomène déjà perceptible sur les dernières semaines de septembre, les primes de risque devraient se contracter. Cela stimulera les prix des obligations et facilitera les conditions de financement pour les pays et les entreprises de la zone euro.
L'affaiblissement du dollar américain pourrait également avoir un impact positif sur la dette émergente en devise locale.
Par ailleurs, la baisse des taux d'intérêt mondiaux va réduire les coûts d'emprunt pour les émetteurs émergents. Cela facilitera le refinancement des dettes existantes et réduira le coût du capital pour les investissements futurs, renforçant ainsi la viabilité économique pour plus d'investissements et stimulant la croissance. Nous observerons ainsi une augmentation la rentabilité des entreprises des pays émergents ainsi qu’une amélioration de la soutenabilité des dettes souveraine, car les recettes fiscales allouées au remboursement de la dette diminueront, et pourront être utilisées pour d'autres projets ou pour réduire la taille de l’endettement.
Les coûts d'emprunt ont d’ailleurs déjà commencé à diminuer, avant même les premières baisses de taux de la Fed en septembre dernier, car les anticipations de baisses de taux par les marchés avaient déjà réduit les primes de risque tant en monnaie locale qu'en monnaie forte.
Pour les obligations en devises fortes, l'effet est direct. Les États émergents, et leurs entreprises, qui empruntent à l'extérieur en devises fortes voient leurs coûts de financement ajustés presque automatiquement à la baisse lorsqu'ils se refinancent sur les marchés, les coûts de financement externes des pays émergents étant déterminés par un écart de pourcentage avec le taux sans risque.
Pour les obligations en monnaie locale, l'effet est indirect mais tout aussi puissant. Les banques centrales des pays émergents ont réduit leurs taux dès 2023, mais certaines d'entre elles ont depuis fait une pause ou ont adopté une approche plus prudente cette année. Cependant maintenant que la Fed a entamé son cycle de baisses, plusieurs banques centrales émergentes ont à leur tour repris leurs propres cycles. Cela va renforcer la valorisation des obligations émergentes en monnaie locale et réduire les coûts de financement pour les États et les entreprises.
L'affaiblissement du dollar américain pourrait également avoir un impact positif sur la dette émergente en devise locale. Ce dernier a reculé pendant trois mois consécutifs jusqu'à la fin du mois de septembre, en raison de la faiblesse des données économiques américaines. La tendance s'est inversée en octobre à la suite de meilleurs chiffres pour le marché du travail américain. Mais si l'affaiblissement de l'économie américaine reprend et marque la fin de l'exceptionnalisme américain sans entraîner de récession aux États-Unis, le dollar se déprécierait davantage. Cela renforcerait considérablement le sentiment positif des marchés à l'égard des économies émergentes et favoriserait les rendements des obligations en devises locales. Cependant, comme l'a montré son regain de force en octobre, l’affaiblissement du dollar américain reste une question en suspens.