L’avantage à long terme des valeurs cycliques

Emmanuel Garessus

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Tandis que les indicateurs avancés sont favorablement orientés au plan global, une étude souligne les vertus des actions cycliques.

Les perspectives économiques sont dans l’ensemble assez prometteuses. L’indice JP Morgan Global PMI Composite a bondi à 53,7 en mai contre 52,4 en avril. Un chiffre supérieur à 50 indique une croissance de l’économie. L’accélération s’étend à tous les secteurs, de l’industrie aux services. Les indicateurs conjoncturels anticipent une inflation toujours persistante et une croissance qui peine à s’affaiblir. Le nombre de baisses des taux directeurs attendues par le marché continue donc de se réduire. Les statistiques de l’emploi américaines renforcent ce sentiment. Et ailleurs, si l’économie reste bien orientée, l’économie européenne s’améliore progressivement et la Chine semble enfin s’engager sur la voie de la reprise. 

Sur le plan boursier, une telle constellation est habituellement favorable aux valeurs cycliques, généralement moins pénalisées par une légèrement inflation, une hausse modérée des coûts de production et des taux d’intérêt modérés.

La relation entre la croissance macroéconomique et le rendement des actifs est un thème essentiel de la recherche financière. 

«Même s’il est de bon ton de critiquer les économistes pour leurs errements et leurs contradictions, ceux-ci jouent un rôle important sur le plan institutionnel».

Après une année boursière 2022 horrible pour les actions et les obligations, qui avait aussi souligné les valeurs défensives d’un secteir comme la consommation courantes, le cru 2023 s’était traduit par de solides gains. Les cycliques, qui regroupent les sociétés qui dépendent de la conjoncture, comprennent par exemple les sociétés de divertissement, le luxe, le tourisme, l’essentiel de l’industrie, les bancaires, sont bien orientées. En 2023, les titres liés à la consommation discrétionnaire amércaine ont par exemple gagné 42% en 2023 et restent bien orientés en 2024.

Surperformance des cycliques

Sur le plan académique, une étude du NBER (Procyclical Stocks Earn Higher Returns; WP 32509, de William Goetzmann, Akiko Watanabe, Wasahiro Watanabe, mai 2024) démontre que les actions cycliques surperforment les anticycliques à long terme. Cette étude sort des sentiers battus. 

Traditionnellement, la recherche se fonde sur des données macroéconomiques portant sur le passé et divers instruments des marchés financiers. Mais, selon les auteurs,  «la plupart des données relatives aux anticipations ne sont pas disponibles sous forme de séries chronologiques sur des périodes suffisamment longues pour permettre de tirer des conclusions sur les primes de rendement des actifs». Le nouveau travail de recherche publié par le NBER se base sur des données de croissance particulièrement riches puisqu’elles remontent aux 75 dernières années. Le travail de recherche utilise en effet un sondage auprès des économistes du nom de Livingston Survey, initié en 1946 par Joseph Livingston et poursuivi jusqu’à ce jour par la Fed de Philadelphie.

En utilisant ce sondage, l’étude utilise aussi les opinions et les intuitions des économistes : «Les attentes concernant les facteurs macroéconomiques ne sont pas formées mécaniquement, mais au contraire créées par un processus de raisonnement humain qui, à tout le moins, s'appuie sur les conditions actuelles observées et l'expérience passée d'une manière qu'il est difficile d'attribuer simplement à un modèle linéaire et à une poignée de variables quantitatives», relèvent les auteurs.

Même s’il est de bon ton de critiquer les économistes pour leurs errements et leurs contradictions, ceux-ci jouent un rôle important sur le plan institutionnel, et finalement sur les prix des actifs financiers. Pour les auteurs, «les participants au marché des actions s'appuient vraisemblablement sur un vaste réseau institutionnel de prévisionnistes économiques professionnels dans les secteurs public et privé». Les institutions financières disposent souvent d’un économiste ou d’une équipe d’économistes. Ces dernières publient des rapports, s'adressent aux médias, transmettent des informations exclusives aux entreprises qui les emploient, écrivent des blogs. Pour les auteurs, «les économistes sont des agents importants dans le développement d'un consensus (ou d'une absence de consensus) sur l'orientation de l’économie.» L’originalité de ce travail de recherche consiste donc à filtrer les données économiques à travers l’esprit de l’économiste et à montrer que le rendement des cycliques dépasse celle des anticycliques.

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