FOMC demain: stop ou encore?

Eric Vanraes, Banque Eric Sturdza

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Chronique des taux de la banque Eric Sturdza.

 

Un choix pas évident pour la Fed

Demain, la Fed a théoriquement le choix entre trois décisions, baisser ses taux, ne rien faire ou les monter. La première solution est à écarter d’emblée. Elle n’était pas du tout saugrenue il y a quelques semaines lorsque le système bancaire régional US était sous pression et en potentiel risque systémique. Fort heureusement, SVB et First Republic n’ont pas (encore?) entraîné une vague géante de débâcles bancaires et dans ces conditions il est hors de question d’envisager toute baisse de taux de la Fed ce mercredi.

Laisser les taux Fed funds inchangés est la piste privilégiée par les marchés. Une pause est estimée salutaire et si les chiffres d’inflation (entendez désinflation) ne sont pas suffisamment encourageants, le ralentissement économique commence à inquiéter et les excellents chiffres de l’emploi peuvent apparaître comme un trompe-l’œil lorsque l’on examine de plus près les jobless claims publiés tous les jeudis. Il se passe visiblement quelque chose du côté des inscriptions hebdomadaires au chômage avec des points bas systématiquement plus haut que les derniers points bas et des points hauts également plus hauts que les derniers points hauts. Ces données sont également le reflet d’une évolution récente rendant de facto les données mensuelles un peu obsolètes. On peut se gargariser des 339’000 créations d’emplois le mois dernier mais les jobless claims devraient nous inciter à envisager un possible chant du cygne du marché de l’emploi.

Un dernier mouvement de resserrement monétaire pour combattre cette inflation qui refuse de décélérer rapidement nous semble utile.

Un relèvement de taux de 25 points de base est la piste que nous privilégions. Un dernier mouvement de resserrement monétaire pour combattre cette inflation qui refuse de décélérer rapidement nous semble utile. James Bullard, de la Fed de Saint-Louis, a estimé récemment que, selon lui, deux relèvements de 0,25% étaient encore nécessaires avant d’entamer une pause. Nous sommes partisans de la hausse de taux tout en étant pratiquement persuadés d’avoir tort car la règle de base, pour tout Fed follower qui se respecte, est que la banque centrale ne procède jamais à un changement de taux (hausse ou baisse) si la grande majorité des marchés ne s’y attend pas.

Or, un relèvement de taux demain soir est pronostiqué par seulement 25% des intervenants de marché. C’est trop peu et la Fed va sans doute renoncer à prendre une décision qui, en théorie, ne devrait pas être trop difficile à envisager. Un statu quo est d’autant plus probable que 55% s’attendent en revanche à un relèvement de taux lors du prochain FOMC du 26 juillet. En conclusion, nous allons reprendre l’un de nos dictons favoris: ne jamais confondre le souhaitable et le probable. Et dans notre esprit, il est clair que le souhaitable serait une dernière (ou avant dernière pour faire plaisir à Jim Bullard) hausse de taux de 25bp alors que le probable sera vraisemblablement un «wait and see» jusqu’au 26 juillet.

Conséquences limitées sur les taux US

Normalement, il ne devrait pas y avoir de grands chamboulements. En cas de maintien des taux Fed funds actuels, nous devrions assister à un léger bullish steepening marqué par une petite détente des taux 2 ans à 5 ans. La partie longue 10-30 ans devrait se stabiliser sur les niveaux actuels voire se tendre à la marge. Actuellement, le 30 ans se situe dans une étroite fourchette 3,85%-3,90%. S’il devait remonter à 4%, nous en achèterions à dose homéopathique afin d’augmenter légèrement notre duration. Cette dernière se situe déjà proche d’un niveau historiquement élevé (5,7). Dans un passé récent, nous avions seulement dépassé le seuil de 6 de janvier à avril 2020 pendant le pic de la crise du Covid.

Les crédits de qualité devraient poursuivre leur beau parcours, soutenus à la fois par la bonne tenue des taux gouvernementaux et le bull market des marchés actions que rien ne semble ébranler. La dette corporate hybride que nous privilégions dans la poche high beta nous semble un peu moins attrayante. Nos récentes prises de profit s’inscrivent dans une stratégie de prudence et de gestion des risques. Nos hybrides affichaient vendredi soir une performance de 3,59% depuis le début de l’année et 0,67% depuis le début du mois (en neuf jours!). Il y a fort à parier que ce rally n’est pas terminé. Par conséquent, dans les portefeuilles qui sont censés détenir des hybrides en permanence, nous avons simplement diminué très légèrement certaines positions alors que dans les portefeuilles dans lesquels les hybrides étaient censées jouer le rôle de booster de performance, nous avons fortement réduit ce pari gagnant mais risqué. Les marchés obligataires ont encore de beaux jours devant eux!

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