Baromètre des banques centrales en 2025

Eric Vanraes, Banque Eric Sturdza

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Chronique des taux de la banque Eric Sturdza.

 

Fed: dovish mais pas trop

Nous l’avons longuement évoqué dans nos diverses chroniques depuis le triomphe électoral de Donald Trump, la Fed est face à un dilemme. Les marchés penchent pour une dernière baisse de taux le 18 décembre puis encore deux autres en 2025. Cela paraît raisonnable sauf si, comme nous le suggérons, le soft landing se transforme en no landing et si l’inflation core ses situe toujours aux alentours de 3%. Le scénario central reste celui du consensus mais dans un scénario «Goldilocks 3%+3%» (inflation core + croissance réelle) on peut imaginer l’impensable: une hausse de taux de la Fed vers la fin de l’année 2025. En attendant, la duration est dangereuse. Elle l’était la semaine dernière avec un 10 ans à 4,35%, elle l’est d’autant plus aujourd’hui à 4,20% avec l’effet Bessent. Les marchés actions vont adorer la croissance nominale tandis que les obligations risquent de moyennement apprécier le réajustement des Dot Plots à long terme, aujourd’hui à 2,875%-3%, ce qui nous semble bien trop bas.

BCE: dovish mais pas assez

Si on nous avait dit il y a encore un an qu’un jour la BCE baisserait ses taux pour sauver une Allemagne moribonde, on aurait crié au poisson d’avril! L’Allemagne est malade de son mode économique et va faire face à une instabilité politique digne de son voisin français. Ce dernier, au beau milieu des mauvaises nouvelles qui s’amoncellent et notamment son spread qui passe au-dessus de celui de la Grèce, a eu la bonne surprise (et nous également!) de se voir accorder un sursis par Standard & Poor’s concernant sa note et la perspective de cette dernière. La BCE va devoir baisser ses taux, rapidement et fortement. L’inflation est relativement sous contrôle et la croissance s’effondre dans certaines régions et non des moindres. La revanche des PIGS en quelque sorte.

La BNS a bien compris que le niveau des taux n’a aucune influence sur le niveau de cherté de notre monnaie nationale.

BoJ «hawkish» contre PBoC «whatever it takes»

La Banque de Japon était allée sans doute trop vite en besogne en relevant ses taux au-dessus de zéro. Malheureusement, la croissance commence déjà à piquer du nez et les commentateurs évoquent l’erreur de politique monétaire. Il semblerait que le gouverneur de la BoJ, Ueda San soit enclin à poursuivre la normalisation. Fin octobre, un statu quo avait succédé à deux hausses amenant le taux directeur à 0,25%. La croissance est atone, l’inflation est sans cesse révisée à la baisse mais cela ne devrait pas freiner les ardeurs de la BoJ. Le yen était en forte hausse vendredi mais il convient de remettre les choses dans leur contexte: une hausse de taux à 0,5%, ce n’est pas ce que l’on peut considérer comme une politique véritablement restrictive. Nous resterons vraisemblablement proche des taux nuls avec un JGB 10 ans aux alentours de 1%.

Si nous restons dans le domaine du taux à 10 ans, la Chine vient de voir son taux long passer au-dessous de 2%. Le pays est au bord d’une grave récession et le seul moyen d’éviter un scénario «à la japonaise», c’est d’ouvrir les vannes à fond. La PBoC sera méga dovish et fera tout ce qu’il est nécessaire pour participer au redressement du pays. Redresser la croissance, c’est d’abord redresser la consommation domestique, donc la confiance des ménages. Cela passe par un message clair: l’immobilier a touché son point bas, il ne faut pas craindre des chocs supplémentaires et consommer de nouveau.

BNS: des baisses de taux sans influence sur la force du franc

La BNS a bien compris que le niveau des taux n’a aucune influence sur le niveau de cherté de notre monnaie nationale, valeur refuge par excellence. Elle va sans doute poursuivre ses interventions sur les marchés des changes pour tenter de maîtriser, si cela est possible, le niveau du CHF. Nous avions quitté Thomas Jordan en croyant que la BNS avait plus ou moins pris la décision que le taux directeur à 1% était un niveau plancher et que repasser au-dessous ne serait possible qu’en cas de crise sévère. Aujourd’hui, son successeur réhabilite en quelque sorte les taux négatifs en jugeant que ce n’est pas un sujet tabou. La BNS va baisser ses taux, à 0,75% dans un premier temps, sans doute à 0,50% par la suite. Envisager des gestes accommodants supplémentaires reste prématuré aujourd’hui. 

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