Une réduction prématurée des risques est inopportune

Beat Thoma, Fisch Asset Management

1 minute de lecture

La reflation fonctionne comme prévu et un dollar US légèrement sous-évalué est même un point positif à court terme.

Le principal risque auquel font face les marchés financiers à l’heure actuelle réside dans la grande dépendance du système aux stimulations monétaires et donc dans la très grande sensibilité au moindre changement, aussi modeste soit-il, de l’approvisionnement en liquidités ou de la dynamique des masses monétaires. Les modifications de la dynamique monétaire ne résultent pas nécessairement des banques centrales. Des modifications internes au système peuvent aussi se faire jour (chute de la masse monétaire M1, évolution de la vitesse de circulation, chute des multiplicateurs monétaires), sur lesquelles les banques centrales ne peuvent pas influer directement. Cela complique encore le timing de marché, car les investisseurs anticipent actuellement bien en amont les évolutions futures de la politique monétaire et peuvent donc réagir fortement à de telles oscillations monétaires endogènes au système.

Parmi les raisons de la très grande sensibilité actuelle du système aux stimulations monétaires, on trouve, d’une part, la baisse durable du dollar US et la montée qui en résulte des anticipations inflationnistes aux États-Unis. Cette évolution montre que la quantité toujours plus importante de monnaie centrale nouvellement créée déborde des marchés d’action et de l'économie vers les marchés de devises où elle engendre des inquiétudes quant à la stabilité monétaire. On en voit la confirmation dans la nouvelle augmentation récente des prix de l’or et du bitcoin. D’autre part, le creusement des déficits budgétaires est de plus en plus financé par la planche à billets, ce qui augmente encore la dépendance du système aux facteurs monétaires. Pour ainsi dire, le système financier tremble sur tous les fronts à l’heure actuelle. Cependant, la situation diffère nettement de celle de 2009. À cette époque, le dollar US avait pu reprendre de la valeur, les déficits étaient plus faibles et la politique monétaire avait encore plusieurs années de généreuses mesures d’assouplissement quantitatif devant soi. La marge de manœuvre des banques centrales était bien plus importante.

Malgré les dangers que nous venons d’évoquer et la vulnérabilité du système face à des perturbations mineures, les facteurs fondamentaux du moment sont encore clairement bien orientés: la politique monétaire est très souple, les programmes nationaux de relance font leur effet et la conjoncture mondiale est sur le chemin de la reprise. La reflation fonctionne comme prévu et un dollar US légèrement sous-évalué est même un point positif à court terme. Il permet à de nombreux pays émergents d’assouplir leur propre politique monétaire et de creuser leurs déficits budgétaires. Des taux plus élevés à long terme sont synonymes d’une pentification de la courbe des taux, ce qui est une bonne chose pour l'économie. Historiquement, ce genre de contexte a toujours entraîné une augmentation des cours sur les marchés d’actions et du crédit. C’est seulement lorsque la tendance de reflation s’accélère que la situation devient dangereuse. C’est pourquoi nous surveillons l’évolution de très près, mais jugeons inopportune une réduction prématurée des risques.

A lire aussi...