Transition énergétique: qui seront les gagnants?

Thomas Höhne-Sparborth, Lombard Odier IM

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Les entreprises chinoises dominent le marché international des infrastructures d’énergie renouvelable. La France vise à se hisser parmi les leaders de la production d’hydrogène vert.

L’électrification avance partout dans le monde. La baisse des coûts de production des énergies renouvelables telles que l’éolien et le solaire, ainsi que l’essor de technologies comme les voitures électriques et les pompes à chaleur, sont autant de raisons financières et environnementales de renoncer aux combustibles fossiles. L’électrification zéro-carbone est devenue l’emblème de la transition énergétique, ce qui soulève une question majeure pour les investisseurs. Quels sont les pays susceptibles de tirer le plus grand avantage de la course au renouvelable, en termes économiques et environnementaux?

Les fers de lance de la transition énergétique

En 2020, la Chine a annoncé qu’elle visait à devenir neutre en carbone d’ici 2060, et depuis, a consolidé sa place parmi les leaders de la transition énergétique. Le pays a investi 676 milliards de dollars dans les énergies renouvelables et autres infrastructures sobres en carbone en 2023, soit deux fois plus que tous les pays de l’UE réunis et plus du double de son concurrent le plus proche, les Etats-Unis.

La production d’énergie solaire et éolienne est plus importante en Chine que dans tout autre pays. Parallèlement, les entreprises chinoises dominent le marché international des infrastructures d’énergie renouvelable: elles ont fourni les équipements nécessaires à plus de la moitié de la nouvelle capacité éolienne installée dans le monde en 2022 et représentent plus de 80% de la capacité mondiale de fabrication de panneaux solaires. La Chine fait également partie des plus grands producteurs et exportateurs de véhicules électriques: ses exportations vers l’UE ont augmenté de plus de 300% depuis 2021, et sa part de marché sur le continent devrait doubler, atteignant 15% d’ici 2025.

Un intérêt mondial pour l’hydrogène vert

L’hydrogène vert pourrait offrir une alternative propre aux combustibles fossiles utilisés dans l’industrie lourde – même s’il jouera un rôle plus limité que l'électrification directe. La production d’hydrogène vert consiste à séparer les atomes d’hydrogène et d’oxygène au sein d’une molécule d’eau, à l’aide d’électricité générée à partir de sources renouvelables. La demande pour ce combustible de l’avenir étant susceptible d’exploser entre 2030 et 2050 selon une étude de PwC, les pays naturellement bien dotés en énergie solaire et éolienne attendent l’occasion de vendre leur électricité renouvelable excédentaire en vue de la production d’hydrogène. Ils pourraient également envisager de produire eux-mêmes de l’hydrogène afin de l’exporter.

Mais l’hydrogène vert apporte son lot de défis, et aura probablement un impact plus limité que certaines prédictions antérieures. Plus de 90% de l’hydrogène produit dans le monde vient du pétrole, du gaz et du charbon. Les coûts de production de l’hydrogène vert sont supérieurs à ceux des autres carburants à base de combustibles fossiles, et certains observateurs pensent qu’ils ne diminueront pas autant que prévu. Toutefois, certaines applications essentielles subsistent, par exemple dans l'acier.

La France vise à se hisser parmi les leaders mondiaux de la production d’hydrogène vert, notamment pour l’industrie et les transports. Son carburant alimente déjà certains trains, et il semble tout à fait possible que l’hydrogène puisse remplacer le charbon dans la production d’acier de qualité commerciale. La France espère qu’un investissement de 9,8 milliards de dollars fera d’elle le fournisseur de choix pour les électrolyseurs utilisés dans la production d’hydrogène.

L’avenir de la transition énergétique

Les investissements mondiaux dans la transition vers les énergies propres ont grimpé en flèche en 2023, augmentant de 17% sur l’année pour atteindre 1’800 milliards de dollars. Mais nous restons convaincus que cela n’est que le début. Environ 25’000 milliards de capitaux pourraient être investis durant la décennie actuelle. Des investissements seront nécessaires, du côté de l’offre, dans la production d’électricité et les équipements liés à l’énergie renouvelable. Et du côté de la demande, dans l’électrification des transports, et de l’industrie et des bâtiments, par exemple.

La transition énergétique touchera tous les secteurs et, avec le découplage de la croissance économique et des émissions de gaz à effet de serre, nous prévoyons l’émergence de nouvelles sources de rendement. Le passage à un taux d’électrification de l’économie de 70%, comme l’exigerait une société «zéro émission nette de carbone», ouvrira de nouvelles voies d’investissement, notamment dans l’optimisation des réseaux électriques au moyen de l’intelligence artificielle.

La transition vers l’énergie propre représente une opportunité financière majeure et sans précédent pour les investisseurs. Il s’agit d’une transformation comparable à celle de la révolution industrielle, mais qui se déroule à la vitesse de la révolution digitale. Aujourd’hui, les investisseurs ont une opportunité unique d’y participer.

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