Investir dans les semi-conducteurs peut s’avérer relativement complexe. Il s’agit d’un secteur très technique où les perspectives des entreprises sont influencées par de multiples facteurs tels que la réalisation effective de leurs feuilles de route en matière d’innovation, la santé des marchés finaux sur les plans structurel et cyclique et, plus récemment, la géopolitique. Ces derniers mois, l’essentiel de la discussion autour des semi-conducteurs a porté sur leur cycle et, en particulier sur la question de savoir si ce cycle avait déjà, ou non, atteint son pic.
D’un point de vue fondamental, il vaut la peine de faire l’effort pour comprendre toutes les interactions à l’œuvre dans ce secteur, car il croît plus rapidement que l’économie mondiale. Cette progression soutenue s’explique par le fait que nos objets du quotidien contiennent toujours davantage d’électronique et, sans semi-conducteurs, il n’y aurait pas de téléphones intelligents, pas d’ordinateurs personnels, ni même d’automobiles. Il ne semble donc pas exagéré d’affirmer qu’ils constituent la colonne vertébrale de notre société moderne.
Un marché en porte-en-faux
Cependant, leur industrie est cyclique par nature du fait que la mise en place de nouvelles capacités de production prend du temps. Par conséquent, offre et demande se trouvent souvent en déséquilibre, ce qui se répercute sur les cours des actions des entreprises du secteur. Pour investir à court terme, il est donc essentiel de comprendre à quel moment du cycle se trouve le secteur.
Jusqu’à présent, le cycle a été largement soutenu par la croissance de l’IA, une tendance qui est particulièrement marquée au niveau des profils de revenus des centres de données.
Pour l’heure, selon les données de l’association pour l’industrie des semi-conducteurs, il se situerait dans la phase d’accélération de la croissance du cycle. Historiquement, cette période a été favorable aux performances des actions du secteur. Pourtant, et bien que les entreprises enregistrent encore une accélération de la croissance de leurs revenus, leur valeur de marché, exprimée au travers de l’indice équipondéré SOX, se situe plus de 20% au-dessous de leur pic touché au début de l’été dernier. Cette contradiction apparente soulève une question importante pour les investisseurs. Pourquoi le marché cède-t-il du terrain alors que les indicateurs montrent que nous devrions connaître une phase haussière? Une partie de la réponse réside dans les inquiétudes quant à l’amplitude de la reprise qui est en cours.
Une reprise lente, mais qui dure
Jusqu’à présent, le cycle a été largement soutenu par la croissance de l’intelligence artificielle (IA), une tendance qui est particulièrement marquée au niveau des profils de revenus des centres de données d’entreprises telles que Nvidia ainsi qu’à celui des chiffres d’affaires des fournisseurs de mémoires DRAM. En effet, l’explosion des technologies liées à l’IA et plus particulièrement à l’IA générative a entraîné une forte progression de la demande de puces d’ordinateurs à hautes performances et sobres en énergie ainsi que de puces mémoire puissantes.
Par ailleurs, les segments de marché traditionnels tels que les téléphones intelligents, les ordinateurs personnels, les équipements industriels et les applications destinées à l’automobile entament tout juste leur reprise (le secteur automobile reste confronté à des problèmes de stocks). Cette reprise a été plus lente que prévu par les entreprises, mais elle se poursuit.
La progression anticipée des volumes de téléphones intelligents et d’ordinateurs portables, à laquelle viendra s’ajouter ce stimulant que représente l’augmentation du besoin en semi-conducteurs pour les applications avancées de l’IA, devrait continuer à soutenir le cycle en 2025. A une condition près, à savoir que les investissements des fournisseurs d’infonuagique dans l’infrastructure d’IA générative ne diminuent pas, un scénario qui n’est pas le scénario central à l’heure actuelle.
Des marges très confortables
Depuis l’été dernier, le marché s’interroge sur la capacité du cycle à se maintenir. Cette inquiétude sur laquelle se sont greffées des attentes moins optimistes pour ce qui concerne les investissements chinois en équipements destinés aux semi-conducteurs (en partie en raison des risques découlant des restrictions à l’exportation) ainsi que les défis opérationnels auxquels se heurtent des géants de l’industrie tels qu’Intel et Samsung ont conduit à une réévaluation à la baisse des fabricants d’équipements destinés à l’industrie des semi-conducteurs. Cependant, comme nous tablons sur un rebond probable des investissements en équipements en 2025, ces fabricants pourraient être une aubaine pour les investisseurs.
Sur le plan structurel, ils possèdent plusieurs atouts. Leur modèle économique très peu gourmand en actifs fixes, leur marché de type oligopolistique ainsi que la complexification toujours croissante de la fabrication des semi-conducteurs de pointe représentent de puissants soutiens à une croissance assortie de marges très confortables.