Les marchés luttent toujours contre la Fed sur les taux

Mark Holman, TwentyFour Asset Management

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La poursuite de l'effondrement des corrélations ne se justifie guère, à moins que la Fed ne réduise ses taux à relativement court terme.

Vendredi dernier, la forte hausse du PIB américain au premier trimestre a suscité plusieurs jours de débat parmi les gestionnaires de portefeuille de 24 AM. Le chiffre de annoncé de 3,2% était près de 100 points de base au-dessus du consensus, de quoi faire la une des journaux, mais les composantes qui l'expliquent, comme la reconstitution des stocks, suggéraient que le chiffre était une anomalie et que la tendance pourrait s'inverser au deuxième trimestre. Cela a également recentré le débat sur ce que le marché anticipe en matière de politique de taux de la Fed et sur ce qu'elle pourrait signifier pour les rendements des bons du Trésor.

À la fin de la semaine dernière, les marchés anticipaient 70% de probabilité que la Fed réduise ses taux d'ici janvier 2020. Il semblait alors que le marché avait pris un peu trop au sérieux le récit de la Fed, contribuant au très fort soutien des bons du Trésor américain, ce qui était tout à fait inhabituel compte tenu du puissant rebond des actifs risqués en 2019. Sans compter que les corrélations se sont jusqu'à présent effondrées cette année, et comme ces épisodes ne durent généralement pas très longtemps, il était dès lors indispensable d'en examiner de plus près les raisons.

La fin des hausses a également donné le signal d'un rebond des actifs risqués.

Or l'absence de corrélation jusqu'à présent cette année est justifiée, car il s'agit de renverser la tendance qui avait érigé, l'année dernière, la possibilité d'une hausse des taux ou d'une erreur de politique comme la source principale du risque. Les taux d'intérêt des bons du Trésor avaient atteint des niveaux (3,25% sur 10 ans début novembre) qui n'étaient plus justifiés dans un contexte où on ne s'attendait pas à de nouvelles hausses en 2019. La fin des hausses a également donné le signal d'un rebond des actifs risqués. Au premier trimestre, tout cela semblait logique. Aujourd'hui, cependant, la poursuite de l'effondrement des corrélations ne se justifie guère, à moins que la Fed ne réduise ses taux à relativement court terme.

Le cœur du débat

A 2,5%, les rendements à 10 ans semblaient à peu près corrects, compte tenu de l'inflation et de la croissance en 2019, tous deux proches de 2%, et d'un taux de la Fed entre 2,25 et 2,5%. De même, il semblait logique que les bons du Trésor bénéficient d'un fort soutien en cette fin de cycle, avec un ralentissement de la croissance et neuf hausses de taux déjà effectuées. Il semblait alors peu probable que la Fed réduise ses taux en 2019 après tout ce qu'elle avait dit pour clarifier sa position. Elle s'était en effet trompée au quatrième trimestre 2018 et avait fait des efforts démesurés pour clarifier ses positions. Mais le marché estimait tout de même à quelque 70% la probabilité d'une baisse, même si aucun des membres du FOMC, votant ou non, ne voyaient de baisse ni en 2019, ni en 2020, ni même en 2021.

Une probabilité de 50% persiste en faveur d'une baisse des taux d'ici janvier 2020.

Nous estimions que cette conviction du marché à 70% devait avoir une incidence sur la courbe de rendement des bons du Trésor. Donc, malgré le fait que les taux étaient restés inchangés, les rendements auraient potentiellement eu une chance de dériver légèrement à la hausse, d'autant plus après la réunion du FOMC cette semaine et que le discours ciblé du président de la Fed, Jérôme Powell, à cette occasion.

Lors de la conférence de presse, Jérôme Powell a confirmé que la Fed aurait besoin d'une période prolongée d'inflation inférieure à son objectif avant qu'une baisse des taux ne soit envisagée. Il a même ajouté que le léger recul récent de l'inflation était transitoire.

Cependant, même si les attentes du marché pour une baisse des taux ont légèrement diminué, une probabilité de 50% persiste en faveur d'une baisse d'ici janvier 2020. Depuis la conférence de presse, l'effet sur les bons du Trésor a été faible, le 10 ans a augmenté d'environ 10 points de base, ce qui montre toute l’ampleur du soutien dont il bénéficie.

La Fed ne devrait pas réduire ses taux cette année. De fait, si les attentes d'une baisse des taux fondées sur le marché venaient à se dissiper, les rendements des bons du Trésor demeureraient vulnérables à court terme.

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