Tour d’horizon des grands thèmes porteurs des prochaines années et des stratégies gagnantes pour en profiter.
Si l’énergie est au centre de toutes les préoccupations, les conséquences de la crise actuelle sont bien plus profondes et durables. Les hedge funds sont particulièrement bien placés pour tirer le meilleur parti des bouleversements profonds que vont connaître nos modèles économiques. Tour d’horizon des grands thèmes porteurs des prochaines années et des stratégies gagnantes pour en profiter.
La dépendance énergétique d’une bonne partie des pays développés vis-à-vis de la Russie et les problèmes de chaîne d’approvisionnement qui ont sévèrement impactés de nombreux secteurs inquiètent légitimement les gouvernements, les entreprises et les consommateurs. Mais ces deux facteurs remettent surtout profondément en question nos systèmes économiques, ce qui rebat en conséquence les cartes également dans le domaine de l’investissement. Face à ces changements qui se profilent, les gérants alternatifs, grâce à la grande variété des stratégies qu’ils proposent, semblent les mieux placés pour tirer les marrons du feu de ces nouvelles thématiques.
Les canicules à répétition de l’été dernier ont accéléré la prise de conscience générale sur l’urgence de la situation. Face au réchauffement climatique, les gouvernements du monde entier ont ainsi initié des plans pharaoniques de décarbonisation de leurs économies afin d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. De fait, aux USA, la loi IRA prévoit 400 milliards de dollars de budget pour la lutte contre le réchauffement climatique. En Europe, au Green Deal d’un montant total de 7 trillions d’euros, on a ajouté en plus le programme «Fit for 55» (3,7 trillons d’euros) et le plan d’indépendance énergétique REPowerEU.
Concrètement, cela se traduit par des grands projets d’électrification afin d’augmenter la part de l’électricité dans le mix énergétique. Naturellement, le secteur des énergies renouvelables et de la production d’hydrogène vert vont avoir le vent en poupe. Par ailleurs, des infrastructures massives sont nécessaires, qu’il s’agisse d’usines de fabrication de composants et de batteries, mais aussi de réseaux de stations de recharge pour véhicules électriques.
Pour l’investisseur, plusieurs options se présentent pour jouer ce thème: les stratégies Long Short Equity bien sûr, mais également les fonds Macro ou les spécialistes des matières premières, qui peuvent se positionner sur les matériaux stratégiques nécessaires à la production et au transport de l’électricité, ainsi qu’à la fabrication de batteries, comme le cuivre, l’aluminium, le lithium et le nickel. A cet égard, il est intéressant de noter que, depuis janvier 2014, les gérants Long Short investissant dans l’énergie ont largement surperformé ceux qui s’en abstiennent (+173,3% contre +112,5%1). Enfin, il existe plusieurs fonds spécialisés dans le trading en quotas d’émission de carbone. Il faut relever que les institutionnels du monde entier sont très peu positionnés sur ces thématiques, car personne n’aime les matières premières. Nous nous trouvons donc tout au début d’une réallocation à ce secteur. Parmi les gérants actifs sur les matières premières et l’énergie, on peut citer KLI, Westbeck, Andurand ou encore Soroban. Parmi les gérants Global Macro capables d’investir dans toutes les classes d’actifs et notamment les matières premières, on trouve Caxton, Gemsstock, Rokos ou encore Kirkoswald.
En soulignant de façon criante l’étendue de leur dépendance à un régime totalitaire, la fermeture du robinet du gaz et du pétrole russe a forcé les pays européens – en premier lieu l’Allemagne - à se livrer à un sévère examen de conscience. Il s’en est suivi une revue générale de leurs sources d’approvisionnement et une volonté politique affirmée d’arriver à une meilleure sécurité et indépendance énergétiques. La crise actuelle a également mené à un certain retour en grâce de l’énergie nucléaire, qui est désormais perçue comme un moindre mal, à la fois du point de vue de l’autonomie (si l’on ne tient pas compte de l’approvisionnement en uranium) que des émissions de gaz à effet de serre. Hormis la question des déchets (dont on sait toutefois comment les stocker à défaut de les traiter), le nucléaire est une énergie relativement propre. Dans notre mode multipolarisé, les matières premières deviennent plus que jamais un enjeu stratégique.
Une autre conséquence inattendue de la pandémie de COVID-19 et de la crise énergétique a sans conteste été le retour de balancier sur la globalisation, un phénomène que l’on croyait pourtant irréversible. En effet, les graves goulots d’étranglement, les ruptures des chaînes d’approvisionnement et l’attitude de plus en plus expansionniste de la Chine, qui ne se contente désormais plus d’être l’usine du monde, ont mis en lumière les limites du modèle économique qui prévalait depuis 50 ans. De nombreux gouvernements, mais aussi d’entreprises de toutes tailles ont ainsi entrepris de relocaliser leur production ou de rapprocher leurs sources d’approvisionnement et leurs fournisseurs. La nouvelle loi IRA prévoit d’ailleurs de nombreuses incitations fiscales pour privilégier la relocalisation et la production locale. Ici encore, par leur réactivité, leur capacité à jouer aussi bien à la hausse qu’à la baisse et leur aptitude d’investir en monnaies, en matières premières ou en produits dérivés, les gérants alternatifs sont les plus à même de tirer le meilleur parti de cette nouvelle tendance de fond. Il faut s’attendre à une volatilité accrue dans les prochaines années et à des différences importantes d’un secteur à l’autre. La gestion active devrait donc prendre le pas sur les techniques indicielles.