Le risque COVID-19 probablement intégré dans les marchés

François-Xavier Chauchat, Dorval Asset Management

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Après avoir été décrits comme «complaisants» face aux risques économiques liés au coronavirus, les investisseurs paniquent.

©Keystone

La fin du mois de février aura vu une des plus fortes et rapides corrections de l’histoire boursière des Etats-Unis, Wall-Street perdant près de 15% en une semaine. Malgré les nouvelles rassurantes en provenance de Chine, la probabilité d'une pandémie mondiale a augmenté avec la forte hausse des infections en Corée du Sud et en Italie. En attendant les vaccins et remèdes, et malgré un taux de mortalité nettement inférieur au SRAS de 2002-2003, les mesures de confinement vont sans doute se multiplier. Les politiques monétaires et budgétaires vont être mises à contribution afin de réduire au minimum la destruction du potentiel de croissance pendant cet épisode difficile. En attendant, la panique boursière actuelle crée des opportunités d‘investissement pour les épargnants qui sont prêts à s’inscrire dans le moyen terme.

Le scénario d’un très fort impact négatif en février puis une reprise
progressivement puissante dès mars est toujours d'actualité.

Au moment où nous écrivons, la première vague dite «chinoise» de l’épidémie de coronavirus se déroule comme la plupart des experts l’imaginaient. Sauf nouvelle dégradation surprise toujours possible, le nombre de «cas infectés actifs» continuera à baisser, ce qui favorise la reprise progressive du travail. Plusieurs provinces chinoises ont d’ailleurs baissé leur niveau de vigilance ces derniers jours (Anhui, Guangdong, Jiangsu, etc.). Le scénario de la courbe en «J», avec un impact négatif extrêmement fort en février puis une reprise économique progressive mais puissante à partir du mois de mars, est donc toujours d'actualité à ce stade.

Hors de Chine, en revanche, la situation se dégrade, avec plus de cinquante pays touches, et donc autant de chocs successifs liés aux mesures de confinement, comme on le voit déjà en Corée et en Italie (60% des cas hors Chine). Si cette tendance se poursuit, et qu’aucun remède et/ou vaccin n'est trouvé à moyen terme, la succession de ces courbes en «J» au niveau mondial finirait par produire un profil global en «U» nettement plus inquiétant, surtout si les pays développés sont touchés massivement. Nous n’avons aujourd’hui évidemment aucun moyen de spéculer en faveur de telle ou telle hypothèse.

Après avoir parié sur un scenario en «J» (ou en «V») limité à la Chine, les investisseurs craignent désormais une succession de chocs au niveau mondial liés aux mesures de confinement contre le coronavirus. Celle-ci interviendrait à un moment ou l’économie mondiale commençait à se relever après presque deux années de ralentissement. Les estimations instantanées de la croissance du PIB américain au premier trimestre 2020 n’ont d’ailleurs cessé d’être revues à la hausse ces dernières semaines (à +2,7%, contre +1,9% attendus par le consensus). Les dernières statistiques outre-Atlantique et, dans une moindre mesure, européennes, témoignent le plus souvent d'une reprise du climat des affaires. 

Une partie de l’impact sur la croissance viendra de l’évolution
des conditions financières et donc des marchés financiers.

L'impact de la lutte contre l‘épidémie et du fort ralentissement chinois est bien entendu sensible dans le tourisme, le transport aérien et dans certaines industries très liées à la demande et aux chaînes de production chinoise. Mais le reste de l‘économie mondiale bénéficie toujours à ce stade des hausses de pouvoir d’achat, de la dynamique positive du secteur de la construction, de la baisse des taux d’intérêt et de la solidité des marchés de l'emploi. Enfin, certaines industries-clés, comme le secteur automobile européen, semblent avoir achevé le processus d'ajustement des stocks entamé mi-2018.

Les effets potentiels des mesures actuelles et futures de confinement contre le coronavirus ont commencé à produire un mouvement de révision à la baisse de la croissance mondiale 2020 (qui pourrait baisser en-dessous de 3%, contre 3,5% initialement prévu par le FMI), et par voile de conséquence de révision à la hausse de la croissance mondiale 2021. Les chiffres qui circulent n'ont à ce stade que peu de crédibilité, d’autant qu’une partie de l’impact sur la croissance viendra de l’évolution des conditions financières et donc des marchés financiers. C'est là ou les banquiers centraux sont comme toujours attendus. Dans ses dernières déclarations, Christine Lagarde ne voit pas encore de raison suffisante pour agir, mais les choses pourraient évoluer.

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