La taille des hedge funds est à relativiser

Cyril Gomez

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«Les investisseurs ont renforcé cette classe d’actif suite à la résistance du COVID et aux tensions des élections US», selon Cédric Vuignier de SYZ.

«Si les flux nets positifs de huit milliards de dollars enregistrés durant le troisième trimestre de cette année peuvent sembler dérisoires, ils n’en constituent pas moins le premier trimestre positif depuis les trois premiers mois de l’année 2018», commente Peter Laurelli, directeur de la recherche au sein de la plateforme d’informations financières eVestment (filiale du Nasdaq), à l’occasion de la revue mensuelle des flux de fonds au sein de l’industrie des fonds alternatifs. 

L’expert attire également l’attention sur le nombre de hedge funds de petite taille étant parvenus à accroître leurs masses sous gestion grâce à des entrées nettes de capitaux, un nombre relativement plus élevé par rapport aux périodes précédentes. Et qui coïncide avec d’excellentes performances. Pour Peter Laurelli, la concentration des capitaux au sein des gros fonds n’est pas aussi marquée que par le passé dans le contexte actuel du COVID. 

«L’augmentation des actifs dans les hedge funds s’est produite surtout sur le troisième trimestre», confirme de son côté Cédric Vuignier, Head of Liquid Alternative Managed Funds chez le Groupe SYZ à Genève. «Le fait que le COVID n’a malheureusement pas disparu durant l’été et que les élections américaines étaient sous tension a conduit les investisseurs à renforcer cette classe d’actif au sein des portefeuilles», poursuit le gérant, contacté par Allnews.

«Après une excellente performance au premier trimestre,
les avoirs sur la stratégie macro-discrétionnaire ont bien augmenté.»

«Nous pouvons également mentionner le fait que les hedge funds ont bien tenu durant le premier trimestre et se sont donc trouvés en position extraordinaire pour profiter des dislocations des marchés», souligne l’expert de la banque privée suisse. Qui précise que la volatilité persistante et la dispersion sur les marchés des actifs risqués a favorisé les traders sur actions. «La sélection des actions était en bonne partie binaire, avec les gagnants du COVID-19 via des positions longues ou les perdants via des positions courtes.»

Par secteur, les stratégies macro demeurent depuis le début de l’année une des principales bénéficiaires des flux de capitaux alternatifs, avec des entrées nettes de 1,48 milliard de dollars, d’après les données eVestments. Ces allocations pourraient toutefois être sous-tendues par des perspectives de court terme liées aux performances récentes. Sur les dix fonds alternatifs enregistrant les plus importantes entrées nettes, neuf affichent en effet des performances positives et significatives sur l’ensemble de l’année. 

«Après une excellente performance au premier trimestre, les avoirs sur la stratégie macro-discrétionnaire ont bien augmenté», observe Cédric Vuignier. «En revanche, la stratégie convertible arbitrage n’a pas vraiment profité de grosses rentrées, mais elle s’est très bien comportée cette année grâce une envolée des nouvelles émissions, de la volatilité des marchés et des opportunités qui se sont créés durant le premier trimestre», explique le manager.

«Il devient difficile de diversifier un portefeuille
uniquement avec des actions et obligations.»

Le crédit, quant à lui, continue de souffrir de rédemptions depuis le creux de mars. Celles-ci ne se concentrent pas sur quelques fonds mais sur un grand nombre de produits. Dans ce segment, les plus gros fonds affichent toutefois les rachats de parts les plus significatifs et, selon eVestments, les stratégies axées sur la finance structurée ou la titrisation (ABS, MBS, CLO…) sont les plus affectées. En Europe, il est cependant intéressant de noter que les données de Morgan Stanley pour le mois d’octobre font état d’une reprise de l’activité des émissions de produits titrisés et finalisations (pricing) de transactions de CLO et d’ABS du secteur automobile.

C’est le cas, par exemple, du pricing en fin octobre du CLO First Swiss Mobility 2020-2 AG, consistant en un pool de crédit-bails à des entreprises et des particuliers et dont le réseau suisse de concessions Emil Frey en est l’originateur. Citons également l’émission à la même période du CLO automobile Silver Arrow FCT 2020-1, adossé à des prêts automobiles structurés par Mercedes-Benz Bank.

Enfin, Cédric Vuignier entrevoit le maintien d’un intérêt structurellement élevé vis-à-vis des solutions alternatives, même si un vaccin définitif devait être trouvé à court ou à moyen terme. Ce, en raison de la présence de risques aussi permanents que significatifs, tels que le Brexit, le commerce international, la géopolitique énergétique, le retour potentiel de l’inflation, pour ne citer que ceux-là. «A mon avis, la relativement bonne performance des hedge funds cette année va pousser les investisseurs à ajouter encore un peu plus cette classe d’actifs dans les portefeuilles, tout particulièrement à un moment où il devient difficile de diversifier un portefeuille uniquement avec des actions et obligations», anticipe Cédric Vuignier.

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