La fin du leadership américain sur les marchés?

Philippe Ferreira, Kepler Cheuvreux Solutions

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En moins de deux mois, Donald Trump a fait vaciller les marchés avec des guerres commerciales sans précédent. Mais les actions US ont toujours trouvé les ressorts pour repartir à la hausse.

 

Depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche le 20 janvier, les investisseurs ont été confrontés à un tourbillon d’annonces politiques, parfois contradictoires, qui alimentent le risque de récession aux États-Unis. Les menaces de hausse brutale des tarifs douaniers et leur implémentation partielle, pour l’instant, inquiètent les consommateurs américains. Dans ce contexte, le manque de visibilité perturbe aussi les marchés. Le S&P 500 est en repli de 10% par rapport à ses points hauts de mi-février, et le Nasdaq est en baisse de 12-13%.

La surprise est que les actions américaines ont été les plus vulnérables face à la montée des incertitudes. Les marchés européens et chinois ont nettement surperformé au cours des trois derniers mois. C’est une surprise car ces derniers sont plus sensibles aux guerres commerciales que l’économie américaine, qui dépend davantage de la demande intérieure. Mais le marché a raison : nuire au consommateur américain qui est le moteur de la croissance peut se retourner contre l’économie de manière brutale. A moyen terme toutefois, les Etats-Unis devraient en ressortir gagnants. La hausse des tarifs douaniers crée une incitation pour attirer de nouveaux investissements et produire sur le sol américain.

Le risque majeur pour les marchés est que la démarche de la nouvelle administration apparaisse si chaotique et génère une telle incertitude qu’elle cause une récession et une défiance vis-à-vis des actifs américains dans leur ensemble. On l’oublie souvent mais la crédibilité est le principal actif intangible d’un débiteur. La puissance et l’hégémonie américaine depuis de nombreuses décennies impliquent que le dollar est devenue la monnaie de réserve globale, les bons du Trésor américains sont l’actif sans risque de référence, et les actions américaines ont été les plus performantes et les plus convoitées. Une remise en question de ce statut serait la fin du leadership américain sur les marchés.

Nous pensons toutefois que Donald Trump reste réceptif aux signaux du marché. Les ménages américains sont largement investis dans les actions et la cote de popularité de Trump est en recul. De notre point de vue, la stratégie de Trump consiste à trouver des marges de manœuvre budgétaires pour réduire les impôts dans un deuxième temps. Par ailleurs, une résolution du conflit Ukraine/ Russie et le retrait des sanctions à l’encontre de la Russie devrait contribuer à baisser davantage les prix de l’énergie. Cela est positif pour les consommateurs, et compensera en partie la hausse des droits de douane. Passer des guerres commerciales aux baisses d’impôts serait beaucoup plus positif pour les marchés. 

Pour conclure, à l’instar des théories sur la fin du capitalisme qui ont émergé après la crise financière de 2008/2009, la fin de l’exceptionnalisme américain sur les marchés est peu probable. D’autant plus que la politique du «made in America» va attirer des investissements et soutenir la croissance. Comme le disait Mark Twain alors que la presse annonçait son décès, «l’annonce de ma mort est très exagérée». Pour autant, l’Europe devrait être le grand gagnant de la fin probable du conflit Ukraine/ Russie, à travers la baisse des prix de l’énergie qui soutiendrait les secteurs industriels intensifs en énergie et les consommateurs.

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