La Chine victorieuse

Emmanuel Ferry, Evooq

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La pandémie couronne le leadership économique chinois. Sa domination est bien réelle, mais pas encore pleinement valorisée par les marchés financiers.

Au lendemain des élections américaines, la Chine a opportunément annoncé la signature du plus grand accord commercial de la planète avec 14 pays d'Asie, créant de fait la première zone de libre-échange représentant 30% de la population mondiale. Cette initiative multilatérale confirme le leadership économique chinois. La Chine est le grand gagnant de 2020 et a réussi à limiter la propagation du virus parmi sa population à des niveaux très faibles par rapport à d'autres pays. Les bonnes performances du pays face à la pandémie renforcent son statut de seul challenger de la suprématie économique américaine, et ce vingt ans après son adhésion à l’OMC.

D'un point de vue macroéconomique, la Chine se classera au premier rang en termes de performances économiques cette année et réussira à limiter les dégâts au minimum par rapport à d'autres pays. Selon les projections du FMI, la Chine est la seule grande économie qui enregistrera une croissance positive de son PIB en 2020-21. En conséquence, le poids du pays dans le PIB mondial passera de 16% à 18% entre 2019 et 2021, tandis que la part des États-Unis restera stable à 24%. Au cours de la décennie 2010, le niveau d'endettement du secteur privé en Chine était un sujet d'inquiétude. Cela ne semble plus être un facteur de fragilité par rapport aux autres économies développées en termes de déséquilibres économiques. Les déséquilibres macroéconomiques s'étant considérablement accentués dans le monde occidental à la suite de la pandémie, le risque chinois ne semble plus supérieur en comparaison.

Les marchés actions chinois et du reste de l'Asie
sont devenus la principale force des marchés émergents.

Le succès de la Chine sur les marchés financiers a bénéficié de l'amélioration de son statut économique. Sa pondération dans les indices émergents a récemment augmenté, en partie grâce aux progrès continus de l'ouverture des marchés onshore et à leur inclusion progressive dans les indices MSCI, augmentant l'importance de la Chine pour les investisseurs étrangers. Mais la dynamique sous-jacente va bien au-delà de simples changements d'indices. Les marchés actions chinois et du reste de l'Asie sont devenus la principale force des marchés émergents, avec un quasi-doublement de leur performance au cours de la dernière décennie, contre un recul de 25% des marchés émergents hors-Asie. Cela reflète en grande partie la divergence des modèles économiques- Les secteurs de la technologie, de la consommation et de la santé représentent en effet plus de la moitié des indices asiatiques, tandis que les marchés actions des autres pays émergents sont encore largement dominés par l'énergie et la finance.

Les marchés asiatiques sont devenus une source essentielle de croissance pour les investisseurs et, contrairement à de nombreux autres thèmes de croissance aujourd'hui, c'est une source de croissance encore assez bon marché. l'Asie EM ne présente qu'une faible prime de valorisation par rapport aux autres marchés émergents. Et si l'on examine plus spécifiquement la Chine par rapport aux États-Unis, le MSCI Chine se négocie à 15,5x les BPA prospectifs contre 20,4 pour le S&P 500, ce qui représente une décote de 25%. Rappelons que Amazon se négocie à 70x les BPA prospectifs contre seulement 29x pour Alibaba. La formule «la Chine fascine mais n’attire pas» ne s’applique plus vraiment au monde financier.

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