Gardons le cap: la neutralité carbone d’ici 2050

Jan Amrit Poser, J. Safra Sarasin

2 minutes de lecture

L'économie mondiale se dirige vers un réchauffement de 4°C. Les adaptations liées au COVID-19 éviteront peut-être ce triste scénario.

©Keystone

Médiatisé par Al Gore, le changement climatique est un sujet de préoccupation depuis près de 15 ans. Les grèves d'écoliers, initiées par Greta Thunberg, et les manifestations de masse de l’année dernière ont mis le sujet à l'ordre du jour des sommets mondiaux de l'UE, du G7 et des Nations unies. Le WEF du début de l’année y était quasiment consacré. Même si le COVID-19 a, en quelques semaines, éclipsé tous les autres sujets, monopolisant l’attention et les ressources de tous les dirigeants, le problème du réchauffement climatique ne va pas disparaître. Les banques centrales et les responsables de la politique financière s'interrogent sur la manière d'adopter des pratiques plus durables dans le monde de «l’après COVID-19». Nous pensons que les réflexions initiées il y a plusieurs mois déjà par les capitaines d'industrie – notamment ceux présents au Forum économique mondial et au Conseil mondial des entreprises pour le développement durable (WBCSD) – vont se poursuivre. De grands fonds de pension et des compagnies d'assurance ont uni leurs forces pour créer l'initiative «Net Zero», dont l'objectif est de disposer d'un portefeuille d'investissement dont les émissions nettes de gaz à effet de serre seront nulles d'ici 2050.

Tôt ou tard, nous devrons capturer
le CO2 de l'atmosphère et le stocker.
Pourquoi la neutralité carbone?

L'objectif de l'Accord de Paris sur le climat (qui, pour rappel, vise à limiter le réchauffement climatique à bien moins de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels) est certainement très ambitieux et il est difficile de savoir exactement quelles mesures concrètes les entreprises doivent mettre en place pour y parvenir. Il était donc nécessaire de rendre cet objectif opérationnel en l'interprétant comme une trajectoire de réduction des émissions mondiales de CO2. Toutefois, cette trajectoire de réduction montre l'énorme défi que représente cette tâche : pour atteindre la neutralité carbone, chaque tonne de gaz à effet de serre émise après 2050 doit être compensée d'une manière ou d'une autre, par exemple en plantant des arbres. Tôt ou tard, nous devrons capturer le CO2 de l'atmosphère et le stocker.

Trajectoires de réduction d’émissions de CO2

Source: Glen Peters, CICERO, Oslo

 

Préparer la transition climatique

Cette visualisation montre l'immense défi que représente le changement climatique pour l'humanité. Pour atteindre cet objectif, les gouvernements devront adopter des réglementations plus radicales. Les consommateurs vont devoir modifier radicalement leur comportement. Les grands propriétaires d'actifs et les fonds de pension s'engagent eux aussi à utiliser de plus en plus leur capital pour encourager les activités ayant un impact positif sur l'environnement. Les entreprises qui ne se préparent pas suffisamment à cet avenir seront mises sous pression sur tous les fronts: du côté des ventes, du côté du financement et par le biais de taxes et d'éventuelles sanctions de l'État. Enfin, le secteur immobilier, l'un des plus grands émetteurs de gaz à effet de serre, devra lui aussi s'adapter à cette réalité.

Les investisseurs doivent examiner les plans et challenger les intentions
de chaque entreprise en matière de réduction d’émissions de CO2.
Construire des portefeuilles à l'épreuve du temps

Il est donc d'autant plus important pour les investisseurs de créer des portefeuilles à l'épreuve du temps (et de la température!). Pour atténuer les risques et améliorer les rendements, il est impératif de parier sur les gagnants de la transition climatique tout en évitant ceux qui vont rater l’objectif (ou qui ont décidé de ne pas l’atteindre). Les investisseurs doivent donc examiner les plans et challenger les intentions de chaque entreprise en matière de réduction d’émissions de gaz à effet de serre. Il est également important d'examiner la crédibilité des discours des entreprises en se demandant si elles ont réussi à atteindre les objectifs de durabilité qu’elles s’étaient fixé précédemment. De cette façon, il est possible d'évaluer les progrès de chaque entreprise du portefeuille en matière de réduction des émissions de carbone. Cela s'applique également aux portefeuilles immobiliers. Outre l’évaluation de leur empreinte carbone, les mesures de réduction des émissions futures sont tout aussi importantes. En fin de compte, il devrait être possible de mesurer la température moyenne vers laquelle le portefeuille se dirige. Nous avons calculé cette température pour les principaux indices de référence. Le résultat donne à réfléchir, mais n'est guère surprenant : l'économie mondiale se dirige actuellement vers un réchauffement de quatre degrés. Il reste encore beaucoup de travail à faire! La crise du COVID-19 nous indique que des adaptations que nous n’aurions jamais crues possibles ont été mises en place en quelques jours. Il y a donc de l’espoir pour que nous atteignons notre but!

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