Economie circulaire: de la parole aux actes

Mathias Talmant, DPAM

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Les pépites du «réduire-réutiliser-recycler» de l’alimentaire sont bonnes pour les portefeuilles, la planète et la société.

© Keystone

La croissance démographique et l’expansion économique pèsent lourdement sur les ressources naturelles de la planète qui sont en quantité limitée. Nous allons donc inévitablement arriver à un seuil critique, à moins de passer de l’approche traditionnelle fonctionnant sur le mode «extraire – produire - éliminer» à une économie circulaire axée sur le «réduire-réutiliser-recycler». Alors que la première dépend en bonne partie du consommateur, la seconde repose d’abord sur les entreprises qui fondent leur modèle d’affaires sur le recyclage.

Ce dernier étant généralement moins coûteux sur les plans opérationnel et d’impact sur l’environnement que la production utilisant des matières premières vierges, il semble parfait sur le plan de la logique économique. L’économie circulaire encourage en effet l’utilisation efficiente des ressources, réduit les coûts de production et permet d’accéder à de nouvelles opportunités sur le plan commercial. Les exemples qui suivent illustrent notre approche de l’investissement d’impact dans nos portefeuilles, notamment dans le secteur de l’alimentation.

Des déchets alimentaires au biocarburant

Darling Ingredients réutilise les sous-produits animaux et les déchets alimentaires et les transforme en composants destinés à toute une palette d’activités allant de l’agriculture à l’alimentation animale en passant par les énergies renouvelables. Ainsi, en 2023, Darling a retraité plus de 10 millions de tonnes de déchets qui, autrement, auraient fini dans les décharges. Dans le cadre de sa coentreprise avec le raffineur Valero, l’entreprise a installé des capacités de production de biodiesel de 1,2 milliard de gallons, soit l’équivalent d’environ 28,5 millions de barils (le biodiesel est élaboré à partir de produits d’équarrissage tels que les graisses animales). A cette installation s’ajoute dorénavant une nouvelle unité capable de produire du biocarburant pour les avions.

Sauvés par les enzymes?

Tomra Systems est leader mondial du secteur des distributeurs automatiques inversés (RVM), des appareils conçus pour automatiser la collecte et le recyclage des déchets et qui permettent d’introduire des systèmes de consigne. Cette entreprise fabrique également des trieuses qui, grâce à leurs capteurs, sont en mesure de reconnaître toutes sortes de matériaux ce qui permet de réduire les déchets et de faciliter le recyclage. En 2022, l’unité de collecte de Tomra Systems a traité 45 milliards d’emballages de boissons usagés, ce qui a permis de diminuer sensiblement le volume de déchets destinés à la décharge et de réduire de 21,1 tonnes les émissions de carbone.

En collaboration avec Novonesis, Carbios a élaboré un processus efficace pour la décomposition enzymatique des plastiques et en particulier du PET. Il permet de décomposer ce plastique en toute sécurité et de le réintroduire dans la chaîne de production où il remplace les matériaux vierges. Ainsi, le besoin en nouvelles matières premières est minimisé. Du fait des caractéristiques de ce processus, il devrait être possible d’étendre son utilisation à d’autres matériaux contenant du plastique tels que les textiles.

Des entreprises telles que Tomra et Carbios illustrent parfaitement les défis et les opportunités de l’économie circulaire. La combinaison de leurs technologies permet dans un premier temps d’arriver à un matériau à recycler très pur (pour les emballages en PET) grâce aux RVM de Tomra puis, dans un deuxième temps, de recycler ce matériau (au moyen de la technologie de Carbios) de manière à ce qu’il présente des caractéristiques similaires à celles du matériau d’origine tout en ayant une empreinte environnementale nettement moindre.  

C’est bon pour le goodwill

Comme le montrent tous ces exemples, l’utilisation judicieuse des matières premières est susceptible d’accroître les bénéfices d’une entreprise et la gestion efficace des déchets et des émissions peut limiter ses risques liés à la réglementation ou à sa réputation. Les entreprises qui adoptent des pratiques répondant aux critères de l’économie circulaire, notamment en concevant des produits destinés à durer et qui sont susceptibles d’être réutilisés ou recyclés, renforcent leur goodwill.

Elles devraient en outre bénéficier d’un environnement opérationnel plus stable, du soutien des autorités locales ainsi que de la fidélisation de leur clientèle. Ainsi, en sélectionnant méticuleusement les entreprises qui atteignent réellement leurs objectifs en matière d’impact (à l’inverse de celles qui se contentent de vagues promesses), les investisseurs peuvent à la fois réaliser des plus-values et avoir un impact sociétal et environnemental positif.

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