Des interrogations légitimes, mais priorité au thème de la reprise

François-Xavier Chauchat, Dorval Asset Management

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Les questions se bousculent au sujet des conséquences politiques, fiscales, sociales, économiques et financières de la crise.

Alors que le confinement sévère prend fin, on voit déjà les tensions renaître entre les Etats-Unis et la Chine, et la Cour constitutionnelle allemande vient de lancer un ultimatum déstabilisant à la BCE, lui donnant trois mois pour justifier certains aspects de son programme d’achat de dettes publiques. A court terme, cependant, les gouvernements, les entreprises et les investisseurs vont demeurer focalisés sur la dynamique de réouverture des économies, et sur l’approfondissement des mesures déjà massives de soutiens budgétaires et monétaires. A cet égard, le gouvernement allemand cherche à minimiser l’impact de l’arrêt de la Cour de Karlsruhe, laissant la BCE poursuivre son action.

Le déblocage de l’arsenal budgétaire milite pour une vision constructive.

C’est du côté du virus que les risques sont les moins contrôlables, mais là aussi les nouvelles récentes sont assez encourageantes. A ce stade, aucun des pays qui a déjà rouvert son économie (Chine, Autriche, Corée, etc.) n’a eu à faire face à une deuxième vague majeure de nouveaux cas. C’est évidemment le point crucial car plus rapide et complète sera la réouverture de l’économie, moins les dégâts causés par la crise perdureront. Comme en Chine, le marasme des secteurs du tourisme, des loisirs et des transports, ainsi que les mesures de précaution encore en vigueur, pèsent fortement. Mais cela devrait évoluer. Par ailleurs, plusieurs protocoles de soins pourraient être validés dans les semaines qui viennent. De plus, le déblocage de l’arsenal budgétaire milite pour une vision constructive, avec des plans de relance encore à venir. Enfin, malgré l’explosion du chômage technique, la plupart des revenus ont été préservés grâce à l’action publique, ce qui autorise une reprise rapide de la demande. Dans les pays développés, un retour au niveau du PIB de 2019 est donc envisageable au deuxième semestre 2021. Ce n’est pas un scénario particulièrement optimiste, car ce niveau resterait malgré tout plus de 3% inférieur aux prévisions d’avant coronavirus. La reprise devra donc se poursuivre en 2022 et 2023.

Les secteurs qui étaient déjà les moins chers
avant le choc sont encore moins chers.

Après le fort rebond boursier du mois d’avril, beaucoup de voix s’élèvent pour s’inquiéter d’une supposée complaisance des investisseurs. Ce n’est pas notre analyse. Nous n’observons pas de décrochage inquiétant entre le prix des actions et la trajectoire prévisible du PIB mondial. Et surtout, l’écroulement des valeurs bancaires, cycliques et de matières premières cadre mal avec les craintes d’une complaisance des marchés. Nous n’observons pas non plus d’optimisme dans les mesures d’appétit pour le risque, mais plutôt une détente partielle des primes de risques de solvabilité et de liquidité qui s’étaient entassées au mois de mars. Au contraire de 2007/08, qui avait vu un renversement complet du leadership de marché, le choc du coronavirus a surtout accéléré des tendances déjà bien en place. Les taux quasi-nuls sur les dettes publiques se sont étendus à presque tout le monde développé, le thème de la numérisation de l’économie triomphe, et les investisseurs privilégient les entreprises au bilan solide. Résultat: la valorisation du Nasdaq et des valeurs de croissance s’envole, et les secteurs qui étaient déjà les moins chers avant le choc sont encore moins chers. Ces écarts plaident pour un rééquilibrage des portefeuilles vers les actifs les plus à même de bénéficier de la réouverture des économies, dont les secteurs cycliques et les petites valeurs.

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