La Suisse et la Chine prônent le «dialogue» face aux taxes

AWP/ATS/AFP

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Le ministre des affaires étrangères, Ignazio Cassis, a insisté sur les bonnes relations entre Berne et Pékin, rappelant les 75 ans de relations diplomatiques et l’accord de libre-échange qui les lient.

La Suisse a affiché jeudi des relations fortes avec la Chine, opposée aux Etats-Unis dans une guerre commerciale qui touche aussi le reste du monde. Le ministre des affaires étrangères Ignazio Cassis a prôné le «dialogue» à l’issue d’une rencontre avec son homologue chinois à Pékin, tout en évitant de se positionner clairement pour l’une ou l’autre partie.

Les deux hommes ont parlé des tarifs douaniers importants appliqués par les Etats-Unis à la Chine. La Suisse risque aussi de subir 30% de taxes supplémentaires sur ses exportations vers le pays nord-américain.

«La Suisse et la Chine veulent résoudre ce problème par le dialogue et dans le respect mutuel», a déclaré M. Cassis lors d’une conférence de presse. Le but est de «convaincre les Etats-Unis à revenir dans une discussion multilatérale».

A la question de savoir si un canal alternatif pour éviter les droits de douane américains a été discuté avec la Chine, M. Cassis a répondu que cela n’a jamais été un sujet de discussion.

Il a insisté sur les bonnes relations entre Berne et Pékin, rappelant les 75 ans de relations diplomatiques et l’accord de libre-échange qui les lient. Une invitation a été lancée à M. Yi pour une rencontre en Suisse cet automne.

Pas de camp privilégié

Le ministre a toutefois pris ses précautions, ne privilégiant pas un camp. Les Etats-Unis, l’UE et la Chine sont les trois partenaires les plus importants de la Suisse, a-t-il rappelé. «On ne peut pas en biffer un», a-t-il dit.

La Suisse est obligée d’avoir des relations très vastes sur le plan commercial, a-t-il expliqué, mentionnant des «bons contacts» entre Berne et Washington. Ce qui se passe actuellement est un «accident», a déclaré M. Cassis, se disant convaincu qu’une «solution sera trouvée».

Le déplacement du Tessinois en Chine a eu lieu alors que la présidente et le vice-président de la Confédération Karin Keller-Sutter et Guy Parmelin se trouvent actuellement à Washington, notamment pour défendre la cause de la Suisse face à la menace de taxes américaines sur le pays. «Nous sommes en contact», a déclaré M. Cassis sans donner plus de détails.

Levier de négociation pour la Suisse

L’actuelle guerre commerciale pourrait servir Berne dans un autre gros dossier: l’accord de libre-échange entre la Suisse et la Chine. Les deux pays ont convenu en octobre de moderniser ce traité vieux de dix ans. Premier accord de ce genre entre la Chine et l’Europe, il est souvent présenté comme un modèle de réussite. Or, des droits de douane sont toujours appliqués sur les exportations suisses vers la Chine.

«La Suisse pourrait avoir une plus grande marge de manœuvre» pour faire valoir ses intérêts dans ces négociations, la Chine étant actuellement dans une situation économique délicate, indique Simona Grano, professeure au Centre d’analyse chinois de l’ONG Asia Society. «Les taxes américaines vont frapper très fort la Chine, déjà affaiblie économiquement depuis le Covid», précise-t-elle.

Un avis soutenu par Thierry Theurillat, professeur de la HEG-Arc à Neuchâtel spécialisé dans le développement économique et urbain en Suisse et en Chine notamment. Il rappelle l’intérêt que Berne revêt aux yeux de Pékin pour son commerce d’or et ses qualifications qu’elle veut de plus en plus importer.

M. Cassis a indiqué avoir réitéré la volonté de la Suisse d’avancer rapidement sur la modernisation de l’accord auprès de son homologue chinois. Le conseiller fédéral a évoqué une «coopération nécessaire entre tous les pays du monde pour garantir le multilatéralisme et une économie efficace». Les points spécifiques n’ont pas été abordés.

«Opportunité pour la Chine»

M. Cassis s’est en outre dit en faveur d’un accord entre l’UE et la Chine. La guerre commerciale pourrait être une opportunité pour Pékin sur le long terme, selon Mme Grano. «Le pays pourra se placer comme un partenaire bien plus fiable et se présenter comme protecteur de l’espace économique», analyse-t-elle.

L’Europe est toutefois prudente dans son rapprochement avec le pays asiatique, compte tenu des relations proches entre la Chine et la Russie et les problèmes liés aux droits humains.

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