Doris Leuthard démissionne pour la fin de l’année

AWP

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Le suspense durait depuis l’été 2017. La ministre avait alors indiqué qu’elle partirait d’ici la fin de la législature fin 2019.

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Doris Leuthard quittera le Conseil fédéral à la fin de l’année. L’annonce a été faite jeudi par le président du National Dominique de Buman. Le suspense durait depuis l’été 2017.

La ministre avait alors indiqué qu’elle partirait d’ici la fin de la législature fin 2019. La démocrate-chrétienne argovienne est la doyenne de fonction du Conseil fédéral. Elle est membre du gouvernement depuis le 1er août 2006.

Doris Leuthard a d’abord été ministre de l’économie avant de reprendre fin 2010 le Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC). Avant d’être élue au Conseil fédéral le 14 juin 2006, elle a siégé au National pendant six ans et demi et dirigé le PDC pendant deux ans.

L’annonce de la démocrate-chrétienne intervient après celle mardi du libéral-radical Johann Schneider-Ammann. Le ministre de l’économie partira lui aussi à la fin de l’année. La course à sa succession bat d’autant plus son plein.

La pression féminine sera forte, mais répartie sur le PDC et le PLR en raison de la double vacance. Si deux hommes sont élus, Simonetta Sommaruga serait la seule femme du gouvernement. La Suisse orientale, la Suisse centrale et la Suisse du Nord-Ouest feront aussi pression pour être représentées au Conseil fédéral.

Coup d’envoi d’une grande valse des départements
Le départ simultané de deux conseillers fédéraux pourrait entraîner une large redistribution des départements. Le portefeuille mammouth de Doris Leuthard risque d’être très convoité et la vacance à l’économie ouvre le jeu.
Rien n’assure à un nouveau conseiller fédéral de reprendre le dicastère laissé vacant par son prédécesseur. La tradition veut que les ministres déjà en poste puissent faire valoir leur préférence par ordre d’ancienneté: soit d’abord Ueli Maurer, puis Simonetta Sommaruga, Alain Berset, Guy Parmelin et Ignazio Cassis avant les deux nouveaux. S’ils ne se mettent pas d’accord, les conseillers fédéraux votent.
Le DETEC pourrait intéresser tous les partis. Jusqu’à l’annonce du départ de Johann Schneider-Ammann, il était peu probable que le Bernois soit sur les rangs car on savait déjà que cette législature serait sa dernière. Son successeur pourrait être tenté par les infrastructures, mais il sera parmi les derniers à pouvoir l’annoncer.
Le ministre des affaires étrangères Ignazio Cassis n’est quant à lui en poste que depuis un an. Lâcher déjà son dicastère apparaîtrait comme un aveu de faiblesse et une manière de refiler la patate chaude du dossier européen à un autre. Les deux libéraux-radicaux pourraient ainsi se retrouver en état d’arbitrer les voeux de leurs collègues.

A gauche

Les conseillers fédéraux socialistes pourraient vouloir laver l’affront fait au PS en 2010. Sous pression bourgeoise, le DETEC avait filé sous le nez du parti. Le département, qui réunit des dossiers importants de l’énergie, des transports, d’environnement et de la communication, était aux mains de Moritz Leuenberger.
Autant Simonetta Sommaruga qu’Alain Berset peuvent se prévaloir d’avoir mené à bien leur dicastère pendant des années et prétendre au changement. Cible répétée d’attaques de l’UDC, notamment sur l’asile et Schengen, la Bernoise pourrait vouloir céder la Justice et la Police, qui lui ont été imposées en 2010.
Le Fribourgeois pourrait de son côté mettre les partis bourgeois au défi de relever les défis des assurances sociales et de la santé. Mais il est loin d’être acquis que la majorité du Conseil fédéral veuille laisser à nouveau le DETEC en mains socialistes.
A défaut, les socialistes pourraient viser le Département de l’économie, de la formation et de la recherche (DEFR). Simonetta Sommaruga pourrait vouloir renouer avec des thèmes qu’elle connaît bien comme ancienne présidente de la fondation alémanique de défense des consommateurs et Alain Berset, docteur en sciences économiques, avec ses sujets de prédilection au Conseil des Etats.
L’UDC pourrait vouloir insuffler un élan nettement plus à droite au DETEC. Premier à se prononcer, le ministre des finances Ueli Maurer affirme vouloir rempiler au gouvernement, mais le Zurichois fêtera ses 68 ans en décembre. Grand argentier depuis début 2016 seulement, il a en outre plusieurs dossiers à boucler, réforme de l’imposition des entreprises en tête.

Coup de force

Guy Parmelin, qui lui a succédé au DDPS, pourrait en revanche très bien réclamer un autre dicastère. Avant lui, plusieurs ministres ont fait leurs premières armes à la Défense avant de prendre leur essor dans un autre département. Le paysan vaudois pourrait avoir envie de peser sur la politique agricole en reprenant les manettes de l’Economie.
Sauf si les deux nouveaux reprennent les postes vacants, au moins trois départements changeront de chefs. Les socialistes ont des départements intéressants à proposer comme monnaie d’échange. Guy Parmelin, qui s’était concentré sur les affaires sociales au Parlement, avait signalé son intérêt pour le DFI d’Alain Berset. Le médecin Ignazio Cassis s’est aussi fait un nom sur ces dossiers.
Si l’UDC veut montrer les muscles, elle pourrait non seulement revendiquer le DETEC, mais encore obliger le PS à reprendre la Défense en cédant un de ses départements à l’un des nouveaux élus. Il n’est toutefois pas sûr que le PLR veuille s’associer à une telle manoeuvre à un an des élections fédérales.
Les personnalités qui entreront au Conseil fédéral joueront aussi un rôle dans les négociations. Le collège pourrait être tenté de laisser la Justice et la Police à Karin Keller-Sutter, ancienne conseillère d’Etat st-galloise en charge de ces affaires. A condition évidemment que la favorite soit élue.

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