Gonet: l'actualité des marchés au 2 avril

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

3 minutes de lecture

Nasdaq -4,4%, S&P500 -4,41%, Dow -4,44%, Russell -7,03%, SOX -5,48%, Eurostoxx -3,83%, SMI -1,54%.

Wall Street réalise sa pire première séance du trimestre depuis 1896. C’est le ton alarmiste de Donald Trump quant à l’impact potentiel du Coronavirus qui met le feu aux poudres et envoie le sentiment du marché au tapis. La Maison Blanche s’attend désormais à un nombre de 100’000 à 240’000 morts aux Etats-Unis, si les mesures actuelles de distanciation sociale, qui ont été prolongées jusqu’au 30 avril, sont correctement appliquées. Si ces mesures n’étaient pas prises, le nombre de morts pourrait atteindre 1,5 à 2,2 millions, précise l’administration Trump. Le marché prend (à nouveau ?) conscience que la première économie du monde n’échappera pas à un ralentissement brutal de son économie. Et les statistiques économiques tombent chaque jour, qui ne sont guère rassurantes. Sur le front de l’emploi, l’enquête ADP dans le secteur privé US montre que ce dernier a détruit 27’000 emplois en mars. Ce chiffre est inférieur aux attentes, mais l’enquête a été arrêtée au 12 du mois, alors que l’impact du COVID-19 a fortement augmenté dans la deuxième partie de mars. Les chiffres complets de l’emploi US en mars sont attendus demain, précédés aujourd’hui des demandes d’indemnisation chômage pour la semaine achevée le 28 mars. Le consensus prévoit 3,7 millions de demandes, Goldman 5,2 millions, CLSA pense que le chiffre pourrait grimper à 10 millions... publiés hier les indicateurs PMI (indices des directeurs d’achats) aux Etats-Unis reculent moins que prévu, mais cette enquête ne reflète pas non plus la rapide détérioration de la fin du mois de mars.

Les analystes commencent à intégrer le scénario d’une crise durable, qui va non seulement laminer les bénéfices des entreprises mais aussi réduire, voire suspendre le versement de dividendes et les programmes de rachat d’actions. Le plan américain de soutien budgétaire (baptisé CARES: Coronavirus Aid, Relief, and Economic Sécurité) prévoit que toute société ayant bénéficié d’emprunts garantis par l’Etat ne pourra plus verser de dividendes avant d’avoir remboursé en totalité ces prêts. Même les sociétés n’ayant pas besoin de recourir à ce soutien d’Etat pourraient être tentées de réduire leurs dividendes et leurs rachats d’actions afin de conserver de la trésorerie pour faire face à la crise actuelle. Dans une étude consacrée aux entreprises versant des dividendes, Goldman Sachs estime que les dividendes du S&P 500 vont reculer de 20% en 2020.

Dans ce contexte et pour en revenir au marché, l’indice S&P500 (SPX) termine sa séance près de son plus bas du jour, c’est sa plus vilaine clôture en près de deux semaines et il repasse en-dessous des 2500 points. Le Dow Jones revient sous la barre des 21’000 points et l’on assiste à un exercice de «derisking» qui confine au cas d’école. Tous les secteurs sensibles au virus sont impactés, notamment les titres de sociétés de croisières, l’énergie (aussi impactée par la géguerre que se livrent la Russie et l’Arabie saoudite), les banques, la chute du rendement de l’emprunt US à 10 ans à 0,57% en séance (le plus bas de tous les temps se situe à 0,53%) n’aide pas non plus, les automobiles sont massacrées avec notamment General Motors (GM) qui chute de 7,3%. Je n’aime pas beaucoup voir l’indice Russell2000, considéré par de nombreux investisseurs comme un indicateur avancé, perdre 7% d’un seul coup hier, à suivre de près.

Le dollar repart à la hausse, la paire eur/usd à 1,0958 ce matin, la volatilité prend l’ascenseur à nouveau, l’indice VIX (volatilité du SPX) revenant renifler le niveau de 60 pour clôturer à 57, ce qui représente tout de même une hausse de 6,5% sur la séance. On l’a dit, le rendement de l’emprunt US à 10 ans recule, ce qui indique que les investisseurs reviennent se réfugier dans les obligations gouvernementales, malgré le peu de potentiel à la hausse qu’elles semblent présenter. A noter que le ratio put/call remonte, qui nous indique que les intervenants rachètent des puts, des options les protégeant à la baisse, c’est à classer sur la pile des rares signaux encourageants actuellement. L’or ne fait pas grand chose, l’once traite à 1586 dollars ce matin, on ne s’y rue clairement pas ces jours.

Le pétrole rebondit de 10% ce matin, à 22,38 dollars par baril de WTI Light Crude. Vladimir Poutine appelle les pays producteurs et consommateurs de pétrole à trouver une solution, face à l’effondrement des cours, et Donald Trump se dit prêt à intervenir sur ce dossier, mais pour l’instant, aucune annonce concrète n’a été faite. Et ce matin on apprend que la Chine a commencé à faire son shopping dans l’or noir, profitant de la chute des cours.

Xerox (XRX -7%) ne rachètera pas HP inc (HPQ -14,5%). Les perturbations causées par l’épidémie de Covid-19 ont dégradé sa capacité financière et la firme a choisi de renoncer à cette opération de 35 milliards de dollars qui devait être financée essentiellement par de la dette. Caterpillar (CAT -4%) annonce l’annulation de toutes les hausses de rémunération pour ses cadres dirigeants comme pour ses salariés en contrat à durée indéterminée cette année. Novartis renonce à céder le portefeuille US de Sandoz, Meyer Burger et Georg Fischer introduisent le chômage partiel, Feintool va renoncer à son dividende et l’émission obligataire de Pernod Ricard (1,5 milliard d’euros en deux tranches) est un succès.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices sont partagés avec Tokyo qui recule de 1,36% à la cloche, Hong Kong qui grappille 0,1%, Shanghai qui avance de 0,8% et Séoul qui gagne 2,3%. Le future SPX récupère un maigre 1,45% en ce moment alors que l’Europe est indiquée autour de l’équilibre à l’ouverture.

A lire aussi...