Gonet: l'actualité des marchés au 1er février

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Nasdaq -2%, Dow -2,03%, SPX -1,93%, Russell -1,6%, SOX -1,64%, Eurostoxx -2,13%, SMI -2,38%.

Wall Street se réveille, la réalité rattrape la fiction bourse, illustrée par des doutes croissants dans le marché que la reprise économique n’est peut-être pas si proche qu’espéré. Le plan Biden n’est pas voté, ce weekend des républicains lui proposent une version édulcorée à 600 milliards de dollars, le vaccin est distribué mais trop lentement aux yeux des intervenants et les résultats de sociétés ne peuvent pas sauver les meubles à eux seuls. Ajoutez à ce cocktail une équipe de rebelles sociaux qui mettent un pataquès comme rarement et vous obtenez un coup de semonce. Oh, jusqu’ici tout va bien, il n’y pas le feu au lac, d’ailleurs les principaux indicateurs d’aversion au risque ne sont pas particulièrement recherchés. Mais, la semaine passée coup de semonce il y a eu c’est indéniable. Ceci dit, il faut savoir raison garder, j’entendais ce matin un chroniqueur économique de la RTS (Radio Télévision Suisse) parler de panique induite par la joyeuse bande de Reddit. Well, c’est aller un peu vite en besogne, parlons plutôt de déstabilisation, passagère ou pérenne? ça nous ne le savons pas encore.

Dans ce contexte idyllique, le Dow Jones, le S&P500 (SPX) et le Nasdaq100 (NDX) reculent entre 3,2% et 3,5% sur la semaine, du plus vu depuis longtemps. Les niveaux techniques sont de sortie en cette fin de mois de janvier. Le Dow repasse en-dessous des 30’000 points, le SPX clôture tout juste en-dessous de sa moyenne mobile à 50 jours et le NDX abandonne les 13’000 points. Notons par ailleurs que, selon l’analyse technique de Tom Demark, le SPX est sur le point d’envoyer un signal de vente. Les volumes d’échanges restent soutenus vendredi, avec 17,2 milliards de titres traités sur le NYSE. La volatilité repart vers le nord, l’indice VIX en hausse de 9,5% sur la séance à 33,09 après avoir touché 37,50 dans la journée. Regardez le niveau de 44 – 46, s’il y va alors l’idée de vendre la volatilité deviendra probablement bonne. Le VIX est en hausse de 51% sur la semaine. On vend les gagnants de ces derniers mois, les FAANGs sont tous attaqués (AAPL -3,7%,  MSFT -2,9%,  AMZN -1,0%, GOOGL -1,4%, TSLA -5,0%,  FB -2,5%,  BABA -2,7%), la fin du mois n’y est pas étrangère, mais également l’annonce qu’en Israël, bien que 40% de la population ait été vaccinée, le pays instaure un confinement d’un mois, son infrastructure hospitalière étant débordée.

Les titres visés par les robinhooders continuent de swinger (SIEB +121,6%, GME +67,9%, AMC +53,7%, KOSS +52,5%, LMFA +36,7%, CVM +28,6%, EXPR +27,7%, SOS +26,7%, NAKD +18,7%). L’argent bondit de 8,7% à l’ouverture ce matin, les futures atteignant 29 dollars, la frénésie sur le réseau Reddit se propage. Cette hausse survient après que les sites de retailers ont été submergés par la demande de barres et de pièces au cours du week-end. Les points de vente, dont Apmex, n’ont pas pu traiter les commandes avant l’ouverture des marchés asiatiques. En ce qui concerne les actions, Robinhood réduit de 50 à 8 la liste des entreprises pour lesquelles il impose des restrictions de négociation. On se demande du coup dans quelle direction les robinhooders vont regarder prochainement. Well, le hasard est taquin, qui publie une étude montrant que les hedge funds n’on jamais été aussi short sur le bitcoin, qu’Elon Musk (le nouveau meilleur ami des robinhooders) a récemment mis en avant, à suivre. L’hebdomadaire Barron’s publie un article à ce sujet ce weekend, écartant GameStop en termes d’importance pour le marché, mais affirmant que le nouveau pouvoir des petits porteurs ne fait que commencer et que le marché pourrait ne plus jamais être le même. Melvin Capital, le hedge fund qui a été ciblée dans l’affaire GameStop, a vu ses actifs fondre de 12,5 à 8 milliards de dollars en janvier, malgré des injections d’argent frais en fin de mois, indique le Wall Street Journal.

Les évolutions brutales de cours observées la semaine passée font craindre des turbulences plus larges dans l’écosystème financier. Le constat que la banque centrale chinoise s’est récemment montrée volontaire à accélérer la réduction de sa mise à disposition de liquidités, dans le but d’éviter d’éventuelles créations de bulles financières est une autre illustration du même sujet. Ces éléments contribuent à rappeler qu’il s’agira d’être attentif à la résistance des marchés financiers lorsque les banques centrales commenceront à sortir de leur politique monétaire ultra-accommodante. Il faudra pour cela suivre avec attention leur capacité à rester clairement «behind the curve» (c’est-à-dire à infléchir avec retard leur politique monétaire dans un sens moins accommodant, d’abord via un moindre ajout de liquidités, puis via un arrêt de celui-ci) lorsque l’environnement économique le permettra. Ceci sera crucial pour pouvoir continuer de tabler sur une orientation favorable des indices actions et plus généralement des actifs risqués à horizon fin d’année.

Au registre des statistiques économiques de vendredi, nous avons eu droit à la publication du  chiffre de l’inflation qui a accéléré plus que prévu en décembre à +0,4%, même si elle modère sur un an à 1,3%, ce qui pourrait capter l’attention des marchés. Les revenus des ménages américains ont augmenté en décembre pour la première fois depuis septembre, notamment grâce au plan d’aides de 900 milliards de dollars adopté récemment par le Congrès. Mais, mauvaise nouvelle pour la consommation, leurs dépenses ont reculé de 0,2%.

Au chapitre de la saison des résultats de sociétés US au quatrième trimestre, pour le moment, 37% des sociétés du S&P 500 ont publié leurs résultats trimestriels. On remarque que les firmes américaines sont plus nombreuses que d’habitude à dépasser les prévisions des analystes (données relatives), mais que les résultats restent inférieurs à ceux de la même période de 2020 (données absolues). La semaine qui débute sera riche en résultats avec notamment Amazon,  Alphabet et Alibaba demain, PayPal, Novo Nordisk et Sony mercredi, Roche, Merck et Unilever jeudi puis Sanofi et Linde vendredi.  

En Birmanie, l’armée arrête Aung San Suu Kyi, entre autres, et annonce prendre le contrôle du pays pendant un an dans ce que Suu Kyi décrit comme un coup d’État. Cette décision a été prise après que l’armée a déclaré l’état d’urgence, sous prétexte de fraudes électorales. Les États-Unis, l’ONU et l’Australie demandent la libération des détenus et le respect des résultats des élections. Les communications avec la capitale ont été pour la plupart coupées et la bourse de Yangon fermée.

La Banque Centrale Européenne (BCE) s’inquiète davantage d’une inflation trop faible que trop élevée, et une hausse des taux en ce moment aurait des «effets désastreux», déclare  Isabel Schnabel (membre du board de la BCE) à la radio Deutschlandfunk. Son collègue Klaas Knot (président de la Banque Centrale Néerlandaise) déclare que la hausse des prix des actions pourrait refléter les espoirs de reprise et ne sont pas nécessairement trop élevés, rapporte le National Post. La Banque d’Angleterre (BoE) publiera cette semaine les résultats de 160 réponses à une enquête sur les taux d’intérêt négatifs, faisant ainsi un grand pas dans le débat sur la viabilité de cette option politique.  

Le Royaume-Uni s’apprête à confirmer que les résidents de toutes les maisons de soins éligibles en Angleterre se sont vu offrir un vaccin. Le pays donnera la priorité aux vaccins pour l’Irlande dès qu’il en aura assez pour sa propre population, rapporte le Telegraph. AstraZeneca va livrer 9 millions de vaccins supplémentaires dans l’UE ce trimestre, annonce Ursula von der Leyen. Le bloc a fait marche arrière en ce qui concerne les nouveaux contrôles sur les vaccins visant à limiter les exportations vers l’Irlande du Nord. L’Italie va commencer à assouplir les restrictions aujourd’hui.

Les PMI manufacturiers finaux de janvier sont en approche pour les principales économies, tout au long de la journée. Celui de la Chine est ressorti à 51,3 points pour un consensus à 51,6 points pour l’indicateur officiel et à 51,5 points (consensus 52,6 points) pour le PMI Caixin. Il faudra aussi s’intéresser aux ventes de détail allemandes et à deux indicateurs américains, celui des dépenses de construction et celui de l’ISM manufacturier (16h00).

Les ventes mondiales de semiconducteurs ont progressé de 6,5% en 2020, grâce à une forte poussée en fin d’année, selon la SIA. Les patrons de Chevron et Exxon Mobil auraient discuté au début de l’année 2020 d’une éventuelle fusion. Ryanair accuse une perte trimestrielle plus lourde que prévu. BioNTech est en capacité de fournir davantage de doses de vaccin à l’UE au deuxième trimestre, selon son directeur financier.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent tous dans le vert. Tokyo progresse de 1,55% à la cloche, Hong Kong avance de 2,20%, Shanghai gagne 0,64% et Séoul grimpe de 2,7%. Le future SPX récupère 28 points et l’Europe est indiquée en hausse de 0,7% à l’ouverture de 9 heures. Le rendement de l’emprunt US à 10 ans est remonté à 1,08%, la paire eur/usd évolue légèrement au-dessus des 1,2100, le pétrole est stable, à 52,62 dollars le baril de WTI Light Crude et l’or remonte légèrement, à 1862 dollars par once. Un «dead cat bounce»  pour débuter la semaine?

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