Gonet: l'actualité des marchés au 16 octobre

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow -0,75%, S&P 500 -0,76%, Nasdaq -1,01%, Russell +0,05%, SOX -5,28%, Eurostoxx -1,87%, SMI -0,33%.

Un gros pavé est lancé sans prévenir dans le long fleuve tranquille de la hausse boursière hier peu avant la clôture européenne. En provenance directe de Veldhoven, Pays-Bas, le pavé se nomme ASML et parvient à faire tanguer le secteur des semi-conducteurs.. En parallèle, après la cloche de 17h30, c’est au tour de LVMH de publier ses trimestriels qui déçoivent, son chiffre d’affaires recule et quelques craquelures apparaissent dans des bastions comme par exemple le Japon. Joli test de résistance proposé par l’Europe à Wall Street donc, deux de ses trois titres phares claudiquent, le marché en prend acte mais garde son calme et fait le tri.

On commence par la séance de Wall Street, qui se termine dans le rouge pour presque tous les indices, l’un d’entre eux résiste en effet à l’envahisseur, le Russell2000 (RTY) des semi-conducteurs qui se permet l’outrecuidance de progresser légèrement à la cloche. C’est là un premier signe d’un marché plutôt serein en l’état, qui nous dit qu’il y a une vie après les semi-conducteurs et que les baisses de taux à venir de la Fed restent dans les esprits. Pas de 47e record historique pour l’indice S&P500 (SPX) donc, qui parvient ceci dit à se maintenir au-dessus des 5800 points, son podium du jour se compose de l’immobilier, des biens de consommation de base et des utilities. Son alter ego équipondéré, le SPW recule de 0,43%, il surperforme donc son grand frère et indique là encore que le marché ne jette pas le bébé avec l’eau du bain hier soir. Le vilain petit canard du jour est sans surprise à chercher du côté du SOX, dont les chaussettes tombent à l’annonce d’ASML (je sors…) et qui chute de plus de 5%. En Europe le Stoxx Europe 600 (SXXP) perd 0,8% soit un peu moins que l’Eurostoxx, tandis que le SMI, en valeurs technologiques fort dépourvu, ne rend que 0,33%, l’indice phare du marché helvétique des actions fait nettement mieux que la Nati et se maintient aisément au-dessus de ses moyennes mobiles à 50 et 100 jours.

La volatilité gagne un peu de terrain, le VIX prend 4,77% hier et le moins que l’on puisse en dire c’est que cela est très peu au vu de l’annonce d’ASML. Le ratio put/call remonte de 0,44 à 0,52, c’est un début mais cela indique que les volumes de trading en options call restent nettement supérieurs à ceux en puts. Pas de retour marqué de la peur à signaler hier donc, la hausse du dollar et le repli des rendements obligataires sont à attribuer à Donald Trump, qui répète dans une interview accordée à l’agence Bloomberg qu’il veut imposer d’énormes droits de douane s’il est élu. Le Dollar Index (DXY) traite ce matin à 103,33, il teste sa moyenne mobile à 100 jours qui évolue actuellement à 103,21. La paire EUR/USD est à 1,0883, sa 200 jours à 1,0874. Le rendement du 10 ans US est de retour à 4,02%, il voit sa résistance la plus proche à 4,05% (100 jours), son principal support se situe à 3,83% (50 jours). Notons tout de même que l’indice MOVE (le pendant obligataire du VIX) gagne 7,4% à 127,23 hier, il évolue désormais nettement au-dessus de son niveau du 5 août dernier, c’est à suivre.

Les annonces continuent de tomber au compte-gouttes à Pékin, par le truchement de son ministre du logement cette fois-ci, qui devrait annoncer demain des détails sur le plan de soutien au secteur immobilier. 

Penchons-nous maintenant sur ASML, qui passe hier du statut de «Hero to Zero» en quelques minutes, mais minute papillon… Que nous dit la société en substance? Que tout ce qui a trait à l’IA reste en forme olympique (rappelez-vous les récents commentaires de Nvidia au sujet de la demande «insane» pour sa puce Blackwell) mais que les marchés de volume (PCs, smartphones) ne se rétablissent pas au rythme attendu. Les annulations de commandes d’Intel et de Samsung ont certainement eu un impact sur les perspectives pour 2025. L’automobile et l’industrie mettent également plus de temps à se rétablir, ce qui ne devrait surprendre personne. 

Dans les faits, le troisième trimestre a été correct, avec une hausse des revenus des services qui a donné un coup d’accélérateur. Les prévisions du quatrième trimestre sont en avance sur les revenus mais en baisse sur la marge brute. Le problème d’ASML réside dans le carnet de commandes et les perspectives pour 2025, selon les chiffres publiés hier soir. Ils voient un chiffre d'affaires 2025 entre 30 et 35 milliards d'euros contre 36 milliards d'euros estimés et une marge brute de 51 à 53% contre 54 à 56% selon les prévisions précédentes et 53,9% estimés. La marge brute est donc en danger. Les ventes en Chine sont également sous pression en raison de la géopolitique – attendez-vous à ce que la Chine représente 20% du chiffre d'affaires en 2025 contre 30% en 2024. En mettant tout cela ensemble, on peut s'attendre à un résultat d'exploitation de 2025 d'environ 10 milliards d'euros contre 13,3 milliards d'euros précédemment attendus. En conclusion, ASML a besoin d'une IA en grande forme pour stimuler les volumes de remplacement des PC et des téléphones portables. Plus largement, les craintes dans le marché hier soir que l’avertissement d’ASML implique un ralentissement général de la demande en IA ne semblent pas fondées, ce matin d’ailleurs l’hebdomadaire Barron’s publie un article indiquant que la baisse de Nvidia d’hier n’est pas justifiée (la fameuse demande «insane»). 

En résumé, le marché fait le tri et c’est une bonne chose, la baisse d’hier crée probablement des opportunités pour les retardataires mais un tri encore plus sélectif s’impose au sein du secteur technologique et plus particulièrement des semi-conducteurs, en revanche ASML elle-même devra digérer l’annonce, cela pourrait prendre un peu de temps, on dit qu’un titre met en moyenne trois jours à digérer une mauvaise nouvelle, en l’espèce elle l’est particulièrement. 

Hier, la publication macro-économique la plus notable est l'indice manufacturier de la Fed de New York d'octobre, qui sort à -11,9 soit bien en dessous du consensus de +3,0 et de +11,5 de septembre. Le rapport note une baisse des nouvelles commandes et des expéditions, bien que les conditions du marché du travail se soient améliorées. L'attention du marché se portera surtout sur un jeudi chargé marqué par les ventes au détail de septembre. L'enquête d'octobre de la Fed sur les attentes des consommateurs de New York note une légère augmentation des attentes d'inflation à moyen et long terme (attentes à court terme inchangées). Mary Daly, de la Fedde San Francisco, déclare que même avec les récentes baisses, les taux fonctionnent toujours pour faire baisser l'inflation. Elle ajoute que la Fed doit rester vigilante.

À suivre… Les hedge funds renforcent leurs positions baissières contre le yuan et le peso mexicain en pariant sur une victoire de Donald Trump.

Au menu macro-économique du jour, l'inflation britannique de septembre (le CPI et le RPI sortent en-dessous des attentes). 

LVMH affiche des revenus en baisse au troisième trimestre (-7,6% hier soir pour l'action cotée à New York). Bercy évoque la possibilité d'une prise de participation du gouvernement français dans Opella (Sanofi). Stellantis guide le marché sur une baisse de ses facturations sorties d'usines de 20% au troisième trimestre. Par ailleurs, le groupe envisage de fabriquer des pick-up Ram au Mexique, selon le WSJ, ce qui devrait faire grand plaisir à qui vous savez. ASML chute de 15,6% hier après avoir annoncé en séance des prises de commandes nettement inférieures aux attentes au troisième trimestre. Le groupe attribue la publication anticipée des résultats du troisième trimestre à une erreur technique. Adidas relève légèrement son objectif d'EBIT annuel. British American Tobacco confirme ses perspectives pour l'exercice 2024. Salvatore Ferragamo enregistre une baisse de 7,2% de son chiffre d'affaires au troisième trimestre. Holcim envisage une double cotation pour ses activités US. Liberty Global prévoit d'introduire Sunrise en bourse en novembre. Qualcomm pourrait attendre l'élection présidentielle américaine pour éventuellement revenir à la charge sur Intel, selon l’agence Bloomberg. Boeing mobilise 35 milliards de dollars de fonds, alors que la grève affecte ses finances. Intel et AMD s'associent pour faire face au défi croissant d'ARM Holdings. Meta doit faire face aux poursuites engagées par des États américains qui l'accusent d'encourager la dépendance aux médias sociaux chez les adolescents, décide un juge fédéral de Californie. KKR s'apprête à lancer la vente de Goodpack, évaluée à environ 1,8 milliard de dollars.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en baisse, hormis en Chine où Hong Kong prend 0,3% tandis que Shanghai grappille 0,05%. Tokyo perd 1,83% à la cloche, Séoul recule de 0,88% et le Nifty50 abandonne 0,42%. Le future SPX traite autour de l’équilibre et l’Europe ouvre en repli de 0,8%. Le pétrole se maintient à grand peine au-dessus des 70 dollars par baril de WTI Light Crude tandis que l’or profite du repli des rendements obligataires pour remonter  à 2675 dollars l’once. ASML recule de 4% supplémentaires en ce début de séance, le titre est sur le point d’entrer en territoire survendu, il a testé en début de séance ses bas de janvier 2024. 

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