US Treasuries: AA+ depuis le 6 août… 2011

Eric Vanraes, Banque Eric Sturdza

2 minutes de lecture

Chronique des taux de la banque Eric Sturdza.

Vague de chaleur sur les taux longs

Il fallait s’y attendre, en pleine torpeur estivale, le moindre accroc met le feu aux poudres. Lorsqu’il s’agit d’un événement majeur comme la décision de la BoJ de modifier sa politique de YCC en faisant passer le plafond du JGB 10 ans de 0,5% à 1%, les conséquences sont fortes et amplifiées. Nous affirmions depuis quelques semaines qu’une telle décision des banquiers centraux japonais pousserait inévitablement les taux longs US au-dessus de 4% et, par ricochet, le Bund à 2,6%. C’est exactement ce qui s’est passé mais ne pavoisons pas trop vite: si l’on y prête attention, la remontée des taux longs a eu lieu juste avant la réunion de la BoJ. Il y a certes un phénomène d’anticipation de la décision mais la réalité est plus proche de ceci: les taux longs US sont passés au-dessus de 4% le 27 juillet après la publication du GDP du deuxième trimestre à 2,4% QoQ au lieu de 1,8% attendu. Certes, le mouvement haussier a pris de l’ampleur début août (avec un point culminant les 3 et 4 août) après cette fameuse décision de la BoJ, suivie par la décision de Fitch d’abaisser la notation des Etats-Unis de AAA à AA+. Mais la stricte vérité, c’est que le déclencheur du mouvement est bien le niveau du PIB au second trimestre qui valide encore plus le scénario de soft landing, éloignant de facto le spectre d’une récession. Cela vaut bien un mini sell-off, compte tenu du niveau de liquidité des marchés traditionnellement faible début août.

Fitch met les pieds dans le plat

Janet Yellen a beau crier à l’injustice, Fitch a (enfin serions-nous tentés de dire) mis sa menace à exécution et a retiré le AAA à la dette américaine. Est-ce que cette décision mérite tant de commentaires enflammés ? Nous estimons que non car cela n’affecte en rien notre perception de la qualité des emprunts du Trésor US ainsi que notre gestion. Depuis de très nombreuses années, nous affectons à chaque obligation que nous détenons le moins bon rating et non un rating moyen. Ainsi, dans nos portefeuilles, les Treasuries sont AA+ depuis août 2011. Nous avons toujours estimé que cette approche «worst of» est plus sincère que toute espèce d’appréciation de rating moyen. Que Fitch soit passé à l’acte, après le énième sketch du plafond de la dette mais surtout en constatant la taille monstrueuse de la dette gouvernementale américaine, n’est ni une surprise ni un événement majeur. Nous serions mauvaise langue, nous pourrions signaler qu’ils n’ont que douze ans de retard sur Standard & Poor’s. Le seul problème (car soyons honnêtes, il y aura quelques conséquences) concerne les indices et par conséquent les fonds indiciels. Dans les grands indices et benchmarks obligataires, pour qu’un émetteur conserve son AAA, il faut qu’il détienne cette note chez au moins deux agences de notation sur trois. Malgré un AA+ chez S&P, la dette américaine était encore considérée AAA puisque notée AAA chez Fitch et Aaa chez Moody’s. La perte de la notation maximale chez Fitch laisse la dette US orpheline puisqu’il ne lui reste (pour combien de temps?) que son Aaa chez Moody’s. Combien de fonds, ETF ou portefeuilles de compagnies d’assurances ou caisses de pension dont le mandat précise «uniquement AAA» seront forcés de se séparer de leurs titres du Trésor américain? C’est la seule question qui vaille. Les gérants obligataires dignes de ce nom n’ont jamais attendu les décisions des agences de notation pour se faire leur propre opinion sur la qualité d’un émetteur. Nous constatons simplement que la notation moyenne de la dette US retenue par les marchés vient de converger avec celle que nous utilisons depuis août 2011. Dont acte.

A lire aussi...