Plus ça change moins ça change

François Savary, Prime Partners

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En économie comme en finance, un prix n’a pas de sens à lui tout seul, c’est bien son caractère relatif qui indique quelque chose de «significatif».

Il est légitime, au tournant d’une année, de réfléchir aux tendances en place sur les marchés et de chercher les raisons qui pourraient justifier la poursuite des mouvements en cours ou la remise en cause de ces derniers. Cela fait partie de l’activité des professionnels de l’investissement, qui parfois cherchent à établir la liste des meilleurs arbitrages possibles dans un portefeuille, pour s’engager dans la nouvelle année; en d’autres termes et en simplifiant, il s’agit de «vendre» le momentum et de se positionner sur les actifs qui sont les moins aimés, dans une version extrême.

Force est de constater que ceux qui ont opté pour une telle attitude, en fin 2019, en sont pour leurs frais. Regardez un graphique avec l’évolution de la performance des différents secteurs depuis le 1er janvier et vous constaterez qu’il valait mieux rester sur les valeurs technologiques et résister à l’attrait «value» de l’énergie et des matières premières. Au demeurant, l’image de la performance relative des secteurs actions n’est pas très différente de celle que l’on a pu observer en début d’année dans le passé récent.

Acheter quelque chose comporte toujours un coût d’opportunité
qu’il s’agisse d’une belle paire de chaussures ou d’une action.

La persistance de cette surperformance de la croissance contre le value, des grosses capitalisations par rapport aux petites, aux USA en particulier, ou encore le bon comportement des valeurs refuge peut susciter de légitimes interrogations. On pourrait même dire qu’il y a de quoi trouver une forme d’inconfort dans ce mouvement de «plus ça change, moins ça change».

En économie comme en finance, un prix n’a pas de sens à lui tout seul, c’est bien son caractère relatif qui indique quelque chose de «significatif», ce que l’on peut observer sous la forme de la prime de risque, par exemple. Acheter quelque chose comporte toujours un coût d’opportunité qu’il s’agisse d’une belle paire de chaussures ou d’une action. Alors pourquoi les investisseurs continuent-ils à se jeter sur les valeurs techno dont l’évaluation n’est pas bon marché plutôt que considérer des investissements dans des secteurs ou des segments délaissés de la cote? Le fait que nous soyons une nouvelle fois sous l’influence d’un marché de liquidités abondantes grâce à l’action des banques centrales rend-il le coût d’opportunité de l’investissement momentum quasi nulle? En d’autres termes, alors que l’on écrit que le consensus est désormais largement convaincu que le scénario de reprise de la conjoncture mondiale se matérialisera, le comportement des investisseurs ne dit-il pas exactement l’inverse? Ce dernier ne continue-t-il pas à privilégier les titres de croissance visible parce qu’il reste peu certain de l’avenir économique? De même, la vigueur des valeurs refuge, Franc suisse en tête, ne démontre-t-elle pas une fébrilité des opérateurs de marché? Je n’ai bien évidemment pas les réponses à ces questions. En revanche, j’avoue une forme de malaise à voir ces positionnements devenir de plus en plus dominants, au mépris du prix relatifs qu’ils incorporent.

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