La saison des bénéfices va s’avérer critique

François Savary

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Les chiffres agrégés devraient afficher un recul des EPS pour le 3e trimestre consécutif. Les sociétés qui ont déjà révélé leurs chiffres ont, pour l’heure, montré des résultats en repli.

Après un second trimestre 2023 qui aura vu les actions américaines retrouver leur leadership et progresser de plus de 8%, nous sommes ou allons être confrontés à des tests importants pour le rallye le «moins aimé de l’histoire». Pour ceux qui, sous l’effet des doutes, ont décidé de protéger leur exposition actions au début de l’automne dernier, le coup est rude quand on sait que les actions US ont gagné 20% depuis lors!

Tests immédiats et à venir disions-nous. En effet, voir les taux américains au plus haut en 16 ans tandis que les obligations d’état en dollars à 10 ans ont à nouveau franchi la barre des 4% est un facteur auquel l’investisseur en actions est déjà confronté, après des chiffres de créations d’emplois (ADP) particulièrement fort; voilà qui sonne le glas des doutes que l’on pouvait encore avoir sur une hausse des taux par la Réserve Fédérale en juillet. On pourrait même dire que la probabilité de voir cette dernière relever le coût de l’argent deux fois d’ici septembre semble être d’au moins de 50%, aujourd’hui.

Pour le marché des actions, il faudra donc gérer cette poursuite du mouvement restrictif de la politique monétaire, dans un contexte où les grands argentiers ont clairement réaffirmé leur volonté de ne pas relâcher leurs efforts dans la lutte contre une inflation, toujours trop soutenue à leurs yeux. Dans un contexte où les statistiques économiques US sont loin de toutes afficher une tendance positive, le risque d’une erreur de politique monétaire, de nature à favoriser davantage qu’un atterrissage en douceur de la croissance au pays de l’Oncle Sam, repart à la hausse.

A l’image des derniers mois, le marché peut tout à fait vivre avec une croissance négative des EPS mais encore faut-il qu’à un moment une perspective de «bottoming» se fasse jour.

D’une manière générale, maintenant que l’inflation est revenue dans des eaux plus raisonnables et étant parfaitement conscient (depuis longtemps) que la poursuite du chemin pour ramener la hausse de prix dans une zone plus proche des 2% sera forcément plus «ardue», la question de la croissance économique va prendre davantage d’importance, non seulement au cours des prochaines semaines mais sur l’ensemble du semestre, selon nous. Aux niveaux que l’indice S&P 500 a atteint des dernières semaines (en flirtant avec la barre des 4500), le moins que l’on puisse dire est que les investisseurs sont loin de pricer une récession US, voire simplement une croissance molle. L’économie américaine reste dopée par la consommation comme la révision à la hausse du PIB pour le premier trimestre l’a démontré; cela peut-il demeurer le cas au cours des prochains mois, alors que d’autres pans de l’économie américaine font face à des conditions de crédit plus restrictives? Vous me direz que jusqu’à maintenant cela a été le cas et que tant que le marché de l’emploi reste bien orienté, il ne faut pas peindre le dragon sur la muraille… Il n’en demeure pas moins que la période estivale restera sous l’influence d’un test de la consommation, sans préjuger, en l’état, d’une conclusion qui ne peut être que négative.

Dernier test important et pas des moindres, celui de la saison des bénéfices qui s’ouvre et qui culminera au cours des deux dernières semaines de juillet qui verront le «gros» des publications de résultats. Selon toute vraisemblance, les chiffres agrégés devraient afficher un recul des EPS, pour le troisième trimestre consécutif.

A cet égard, les sociétés qui ont déjà révélé leurs chiffres ont, pour l’heure, bien affiché des résultats en repli, une tendance qui ne devrait pas se démentir avec les autres membres de la cote au cours des prochaines semaines.

A l’image des derniers mois, le marché peut tout à fait vivre avec une croissance négative des EPS mais encore faut-il qu’à un moment une perspective de «bottoming» se fasse jour; en effet, il suffit de regarder les données agrégées du consensus sur la progression des bénéfices par action en 2024 pour se rendre compte que les investisseurs sont «convaincus» que le creux sur ces derniers est en vue! Dans un tel contexte, il faudra observer de près les perspectives que dresseront les sociétés pour les prochains trimestres. Les investisseurs sont-ils capables de supporter l’éventualité que le creux sur les bénéfices se révèle plus lent qu’escompté actuellement? Quand un marché se paye plus de 18 fois les bénéfices attendu, on peut légitimement dire que la corde est tendue et qu’une telle éventualité serait problématique.

Les actions US n’ont pas cessé de nous surprendre depuis 9 mois. Les tests qui s’annoncent, alors que celui de la capacité à reprendre le contrôle sur l’inflation est partiellement gagné, portent davantage sur la croissance tant économique que bénéficiaire; ils devraient nous accompagner au cours des prochains mois mais les prochaines semaines pourraient bien se révéler cruciales.  

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