Les derniers chiffres de l’inflation publiés mercredi aux Etats-Unis ont été meilleurs qu’attendu, la première salve de surtaxes sur les produits chinois n’ayant pas entraîné de surcoûts pour les consommateurs.
L’indice des prix à la consommation - mesurant l’évolution d’un panier de biens et services - a augmenté en février de 2,8% en rythme annuel, contre 3% en janvier, selon le ministère américain du Travail.
Sur un mois, l’indice a aussi ralenti à 0,2% (contre +0,5%).
Les analystes s’attendaient plutôt à une hausse de 2,9% en glissement annuel et de 0,3% sur un mois, selon le consensus publié par MarketWatch.
L’indice mesurant l’inflation dite sous-jacente - hors prix volatils de l’alimentation et de l’énergie - a aussi ralenti sur un mois (+0,2% après +0,4% en janvier) et sur un an (+3,1% contre +3,3%).
«Après plusieurs mauvaises surprises dernièrement, en voilà une bonne», a commenté auprès de l’AFP Steve Sosnick, chez Interactive Brokers. «Dans un contexte plus classique, cela aurait été la principale nouvelle du jour sur les marchés.»
Mais Steve Sosnick note que ceux-ci, qui ont ouvert en hausse, restent aux aguets face au flot d’annonces et de revirements du gouvernement sur les droits de douane.
En février, l’indice CPI avait accéléré en rythme annuel pour le quatrième mois d’affilée. Son rythme, supérieur aux attentes, avait déçu.
Le président Donald Trump, investi depuis le 20 janvier, avait immédiatement mis ce regain d’inflation sur le dos de son prédécesseur Joe Biden.
Mercredi, il a salué depuis la Maison Blanche «une très bonne nouvelle».
«Cette publication, comme celle sur l’emploi la semaine dernière, est bien meilleure que ce que les médias et les prétendus ‘experts’ prédisaient. Quand apprendront-ils à cesser de douter du président Trump?» a lancé sa porte-parole Karoline Leavitt sur X.
«Comme il l’a fait avec succès pendant son premier mandat, le président Trump fait baisser les coûts», a-t-elle poursuivi, citant sa volonté de déréguler massivement et d’augmenter la production d’énergies fossiles.
«Tempête politique»
L’exécutif fait face depuis plusieurs jours aux doutes croissants des investisseurs et des entreprises sur la finalité et les conséquences de ses initiatives sur les droits de douane.
Karoline Leavitt a appelé mardi à «faire confiance» à ce président qui veut «que les Américains finissent avec tellement d’argent dans les poches qu’ils ne sauront pas quoi en faire».
«Les progrès sur l’inflation sont toujours trop lents alors que des millions d’Américains sont toujours écrasés par le prix des courses et des loyers exorbitants», a jugé de son côté la sénatrice démocrate Elizabeth Warren.
«Le président devrait s’attacher à baisser le coût de la vie comme il l’a promis plutôt que de générer du chaos», a-t-elle ajouté dans un communiqué.
Les spécialistes s’attendent à voir les prix commencer à grimper sur le marché intérieur américain à mesure que les droits de douane entrent en vigueur.
En février, seuls les produits chinois ont réellement commencé à être surtaxés, de 10 points de pourcentage supplémentaires. Des droits de douane plus conséquents sont depuis entrés en vigueur, et d’autres sont prévus.
«Nous savons que cette tempête politique va nourrir l’inflation. Les chiffres ne le reflètent pas encore, car ils sont tout simplement antérieurs», a déclaré à l’AFP Michael Pearce, économiste chez Oxford Economics.
Le cabinet Pantheon Macroeconomics souligne que le ralentissement du CPI «découle largement du décrochage des prix des billets d’avion» (-4% sur un mois). Il ne s’attend pas à un rebond du coût des trajets aériens en mars, «le récent recul de la confiance des consommateurs laissant présager une plus grande réserve sur les dépenses dans des services non-essentiels».
Les analystes anticipent un ralentissement de l’économie au premier trimestre, les marchés commençant même à ruminer la perspective d’une récession si tous les droits de douane annoncés entrent en vigueur, et le restent dans la durée.
«Ce niveau d’incertitudes est pour ainsi dire une première (...) personne n’avait encore fait cela», a remarqué auprès de l’AFP Dan North, économiste à Allianz Trade North America.
Il anticipe que la Fed laissera encore ses taux inchangés la semaine prochaine à l’issue de sa réunion de politique monétaire. A ce stade, «les dépenses continuent à progresser, même au ralenti, le marché du travail reste solide, donc il n’y a pas besoin de baisse pour stimuler l’économie».